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Pourquoi les nouveaux maires écologistes auront du mal à s'opposer à la 5G

Le nouveau maire écologiste de Bordeaux appelle à un moratoire sur la 5G.

Le nouveau maire écologiste de Bordeaux appelle à un moratoire sur la 5G. - NICOLAS TUCAT

Des candidats EELV, fraîchement élus aux élections municipales, ont fait de la défiance à l'égard de la 5G un argument électoral. Sans être pour autant en mesure de concrétiser leur discours.

La vague verte qui a déferlé sur les élections municipales serait-elle aussi anti-5G ? À Bordeaux, comme à Strasbourg, Lyon ou encore Besançon, les maires écologistes sortis gagnants du deuxième tour ont tenu, au fil de leur campagne, des propos appelant à la plus grande vigilance à l'égard de cette technologie. Johanna Rolland (PS), réélue à Nantes après une union avec les écologistes, et qui accueillait avant sa campagne le déploiement de la 5G comme une "excellente nouvelle", a fait volte-face sur le sujet, pour finalement afficher sa méfiance envers la descendante de la 4G. Interviewé sur RTL ce 29 juin, le nouveau maire écologiste de Bordeaux, Pierre Hurmic, a appelé de ses vœux un "vrai débat" à propos de la 5G, pour mieux "indiquer à nos concitoyens quels sont ses dangers". Anne Vignot, élue à Besançon, avait quelques jours auparavant pourfendu les "problèmes de santé publique" posés par ce si décrié standard de téléphonie mobile.

La vague 5G

Si la 5G a fait figure d'argument électoral, peut-on concrètement s'opposer à son déploiement ? Pour le Conseil d'État, la réponse est non. Dans une décision d'octobre 2011, l'institution reconnaît une compétence exclusive aux autorités de l'État pour réglementer l'implantation des antennes relais sur le territoire. Et cible spécifiquement les mairies. "Le maire ne saurait adopter, sur le territoire de sa commune, une réglementation relative à l’implantation des antennes relais de téléphonie mobile et destinée à protéger le public contre les effets des ondes émises par ces antennes, sans porter atteinte aux pouvoirs de police spéciale conférés aux autorités de l’Etat", souligne le texte. L'idée d'un moratoire sur la 5G, brandie en étendard par bon nombre de candidats aux municipales, a quant à elle été purement et simplement écartée par le gouvernement.

Les mairies ne sont néanmoins pas totalement dénuées de recours pour faire valoir leur opposition à la 5G. Elles devront se contenter, au mieux, de ralentir l'implantation d'antennes sur leur territoire, par de simple arrêtés d'opposition.

"Ces derniers sont systématiquement contestés par les opérateurs, qui gagnent à plus de 90% les procédures", rappelle Alexandre Archambault, avocat spécialisé en droit des nouvelles technologies, auprès de BFM Tech. "Il ne suffit pas de brandir le principe de précaution, encore faut-il démontrer par des arguments étayés qu’il y a dangerosité". Ces arguments font pour l'heure cruellement défaut.

Quasiment impossible à concrétiser, le discours anti-5G a le mérite de faire mouche. Comme le notait Martin Bouygues lui-même, cette technologie "suscite aujourd’hui bien plus de méfiance et de scepticisme que d’engouement et d’enthousiasme", alors même que ses usages concrets pour le grand public ne surviendront pas avant 2023. Tant et si bien que plusieurs dizaines d'antennes 5G ont été prises pour cible ces dernières semaines, sur le seul territoire français.

Plusieurs raisons à cela: pour certains, à l'image des anti-ondes, aucune preuve de l'inocuité de la 5G pour la santé n'a à ce jour été apportée. À l'inverse, aucun risque n'a non plus confirmé, comme le soulignait récemment une étude de l'ANFR, l'Agence nationale des fréquences. Pour d'autres, plus radicaux, la 5G aurait un rôle à jouer dans la propagation du coronavirus. Enfin, le caractère indiscutable du progrès apporté par cette technologie fait également débat.

Malgré cette vive opposition, et un retard dû au confinement, le déploiement de la 5G reste sur les rails, pour une ouverture commerciale à la fin de l'année. En parallèle, une mission lancée conjointement par les ministères de l’économie, de la santé et de la transition écologique viendra se pencher sur l'évaluation de ses risques sanitaires et écologiques. Avec de premiers résultats attendus pour début septembre. De son côté, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) doit rendre son rapport sur l'impact sanitaire de la 5G courant 2021.

https://twitter.com/Elsa_Trujillo_?s=09 Elsa Trujillo Journaliste BFM Tech