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Ces lieux sensibles que l’Etat préfèrerait voir floutés sur Google Maps

Google Maps floute une centaine de lieux sensibles en France.

Google Maps floute une centaine de lieux sensibles en France. - Google Maps

Les prisons ne sont pas les seules à faire l’objet d’un floutage sur Google Maps. Pour préserver ses intérêts, l’Etat tient aussi à garder autant secrets que possible les sites militaires, centrales nucléaires et autres infrastructures stratégiques.

Des terrains de football, des tourelles et des grilles. Sur Google Maps, bon nombre de prisons françaises peuvent encore être vues du ciel. L’évasion de Rédoine Faïd, le 1er juillet, a donné un éclairage nouveau à ce constat pourtant connu depuis des années. La prison de Réau, de laquelle il s'est échappé en hélicoptère, ainsi que le centre pénitentiaire de Vendin-le-Vieil, où il est actuellement écroué, ne sont toujours pas floutés sur l'outil de cartographie de Google.

Depuis cette spectaculaire évasion, le ministère de la Justice a failli voir flou. Un dialogue a été engagé dès le 31 juillet avec Google pour brouiller les pistes et mieux dissimuler ces établissements sensibles. Le 9 octobre, interviewée sur RTL, Nicole Belloubet a fait part de son mécontentement. "Il n’est pas normal que les établissements sécurisés comme des prisons se retrouvent sur Internet", a tranché la Garde des Sceaux. Sur 67 prisons, 49 pouvaient encore être survolées, d'après L'Express. Par courrier, Google a entre-temps assuré remédier au problème d'ici décembre

La prison des Baumettes, dans les environs de Marseille, fait l'objet d'un floutage sur Google Maps.
La prison des Baumettes, dans les environs de Marseille, fait l'objet d'un floutage sur Google Maps. © Google Maps

Prisons, sites militaires et centrales nucléaires

Pour élaborer ses cartes du monde entier, Google fait en réalité appel à trois prestataires principaux : DigitalGlobe, IGN et Airbus. D'où la lenteur de sa réponse. "Google Earth et Google Maps agrègent des images qui proviennent de divers fournisseurs extérieurs, publics ou privés", indique un porte-parole de Google France auprès de BFM Tech. "Dans la continuité de nos échanges avec le gouvernement, nous avons transmis à nos fournisseurs une liste de sites sensibles, en leur demandant de prendre les mesures nécessaires afin de nous transmettre des images conformes à la législation en vigueur dans les plus brefs délais",

La liste de sites sensibles tient, elle, à un simple arrêté interministériel du 27 octobre 2017. 247 lieux, associés à des coordonnées GPS, y sont répertoriés. Les établissements recensés sont respectivement du ressort des Ministère de la Justice, des Armées, de la transition écologique et solidaire et de l’intérieur. En effet, on y trouve pêle-mêle des prisons mais aussi des sites militaires, des centrales nucléaires et électriques. D’après une source ministérielle, cette liste est vouée à s'allonger sous peu. Un nouvel arrêté est donc attendu dans les prochains mois.

Chacun son périmètre

Chacun de ces quatre Ministères se charge de veiller à ce que ces lieux bénéficient bien du floutage requis. "Le ministère des Armées entretient un dialogue constant avec les diffuseurs - Google Earth et d'autres plateformes de géo-visualisation interactives -, pour exiger de flouter les images des sites sensibles", note auprès de BFM Tech la DICoD, un service de communication du Ministère des Armées. "La plupart des sites considérés comme sensibles ont été floutés sur les plate-formes de géo-localisation interactive, notamment Apple et Google (Earth et Map). Le reliquat fait l'objet d'un suivi régulier et constitue le sujet de discussions avec les diffuseurs."

"Lorsque des prises de vue sont autorisées, l'autorisation est délivrée par le Préfet dans le respect des textes précités. Concernant la floutage de certains bâtiments publics, par des prises de vue au sol, c'est un choix de sécurité défense qui relèvent de l'intérieur et de la défense", vient compléter le Ministère de la transition écologique et solidaire.

Pour protéger au mieux ces zones sensibles, un travail interministériel est actuellement en cours. Il portera sur les prises de vue aériennes, qui viennent notamment alimenter les services de cartographie en ligne, dont ceux de Google. "Des propositions d’évolution du cadre juridique encadrant les prises de vues aériennes sont en cours d'élaboration", précise Youssef Badr, le Porte-parole de la Chancellerie, auprès de BFM Tech. 

Le groupe de travail dédié à ce sujet voit les choses en grand. "Son périmètre couvre les prises de vues à toute altitude, que ce soit dans l’espace aérobie ou dans l’espace extra atmosphérique", précise Youssef Badr. Un tel arsenal juridique devrait venir en aide au Ministère dans la préservation de ses infrastructures stratégiques. Et le besoin existe. "A l'heure actuelle, nous ne sommes pas encore "armés" pour opérer des contrôles systématiques sur ce que mettent en ligne les diffuseurs de contenus sur Internet."

https://twitter.com/Elsa_Trujillo_?s=09 Elsa Trujillo Journaliste BFM Tech