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Une agence offre 2000 euros à des influenceurs pour dénigrer le vaccin Pfizer sur les réseaux sociaux

Des flacons du vaccin Pfizer-BioNTech dans un centre de vaccination à Paris, samedi 8 mai 2021

Des flacons du vaccin Pfizer-BioNTech dans un centre de vaccination à Paris, samedi 8 mai 2021 - Martin Bureau - AFP

Des influenceurs ont reçu une proposition pécuniaire d'une agence présumée londonienne pour qu'ils critiquent le vaccin germano-américain au profit de celui d'AstraZeneca.

"Je viens de recevoir sur Instagram une demande de partenariat rémunéré genre 2000€ la story pour décrédibiliser le vaccin Pfizer-BioNTech (genre dire des effets indésirables graves, etc.)."

Depuis quelques jours, des messages similaires sont postés sur Twitter et font état d'une campagne de communication qui viserait les influenceurs sur Youtube et TikTok.

Comme l'interne en médecine qui tient le compte "Et ça se dit Médecin" sur Twitter et Instagram.

Une campagne de communication qui ne viserait pas forcément les influenceurs et vilgarisateurs scientifiques. Comme en témoigne la série de messages postés sur Twitter par le Youtubeur Sami Ouladitto qui fait des vidéos humoristiques.

"Une agence m’a contacté pour partager, en échange de rémunération, des articles qui décrédibilisent le vaccin pfizer, et de parler de son taux de mortalité, explique ainsi le jeune comédien. En gros ces gens là (je sais pas qui est derrière) payent des influenceurs/artistes pour faire de la propagande et de la désinformation... "

Ce lundi, c'est le message du Youtubeur Léo Grasset qui attiré l'attention sur cette campagne. Le créateur de la chaîne scientifique DirtyBiology qui a consacré quatre vidéos au Covid a posté des captures d'écran du mail reçu pour dénigrer le vaccin de Pfizer.

Le mail encourage le Youtubeur à réaliser une vidéo pour expliquer -chiffres à l'appui- que le vaccin Pfizer est trois plus mortel que celui d'AstraZeneca. Avec des liens vers un article du Monde et un tableau qui proviendrait d'un échange de mails internes à l'entreprise AstraZeneca qui montre que la létalité est plus grande pour les vaccinés avec le sérum Pfizer que pour ceux qui ont reçu celui d'AstraZeneca.

"Il fallait aussi parler des effets indésirables, dire que c'était grave bref tout faire pour pousser la société à ne pas se faire vacciner par le vaccin Pfizer-BioNtech", explique Jérémie, étudiant en pharmacie à Strasbourg et qui fait de la vulgarisation médicale sur TikTok.

Ce dernier qui a cru dans un premier temps à un "fake" assure qu'on lui a proposé la somme de 1800 euros pour faire la vidéo. Qui est derrière cette étrange campagne?

Il s'agit officiellement d'une mystérieuse agence londonienne qui se fait appeler Fazze mais qui ne semble pas avoir d'existence légale selon le site Numerama. Elle ne semble pas avoir pignon sur rue à l'adresse indiquée sur sur son site dans le centre de Londres. Outre ses activités d'agence de presse, Fazze se présente comme un service de monétisation pour influenceurs sur différentes plateformes.

Sollicitée, l'agence n'a pas donné suite.

Si le fait que l'agence soit basée à Londres et que la volonté du message soit de dénigrer le vaccin de Pfizer au profit de celui d'AstraZeneca peut laisser croire que les commanditaires soient proches du laboratoire anglo-suédois.

Ce que dément formellement à BFMTV le laboratoire. AstraZeneca nie catégoriquement à BFMTV toute implication du groupe dans cette tentative de manipulation "anti-Pfizer". Le laboratoire ne souhaite d'ailleurs pas que soit suggéré un quelconque lien avec l'agence de communication en question.

"Nous condamnons fermement toute initiative qui cherche à saper la confiance dans les vaccins et nions catégoriquement les commentaires apparemment illégitimes sur les réseaux sociaux spéculant sur notre implication dans de telles activités", indique un porte-parole d'AstraZeneca.

Des soupçons se portent alors du côté de la Russie. La campagne de communication russe du vaccin Sputnik V sur les réseaux sociaux utilise le même argumentaire. Elle dénigre le vaccin Pfizer au profit de celui d'AstraZeneca. Etrangement, dans ces messages le vaccin russe n'est pas vanté. Il s'agit plutôt de faire un propagande "antivax" en dénigrant un vaccin qui a bonne presse en assurant -statistiques fausses à l'appui démontées par des chercheurs- que ce vaccin est en réalité moins sûr que celui qui n'a pas une bonne image.

Par ailleurs, l'agence Fazze appartient à la holding AdNow Media basée près de Londres qui dispose d'une antenne à Moscou et qui a été fondée par Vladimir Bashkin, une Russe qui a travaillé dans plusieurs projets de communication selon son compte LinkedIn. Un grand nombre des employés de AdNow trouvés sur Linkedin sont par ailleurs russes.

Du côté du ministère de la Santé, on n'évoque aucune piste mais un porte-parole assure à BFMTV prendre l'affaire très au sérieux. Le ministère assure suivre ce sujet de très près. Il salue par ailleurs "l’intégrité des influenceurs qui ont dénoncé ces tentatives manifestes de manipulation."
Frédéric Bianchi
https://twitter.com/FredericBianchi Frédéric Bianchi Journaliste BFM Éco