"Du mépris et du dégoût": le père d'Estelle Mouzin dénonce les vidéos imitant sa fille grâce à l'IA

Des comptes Tiktok publient de courtes vidéos fictives où des enfants comme Estelle Mouzin ou le petit Grégory racontent leur propre disparition. Les familles dénoncent des vidéos "odieuses et inquiétantes".

Gregory Villemin, Estelle Mouzin ou encore Maddie McCann… Sur TikTok, certains comptes cumulent des dizaines de milliers d’abonnés en publiant des vidéos fictives de personnes mortes, dont des enfants disparus, comme l'a relaté Le Parisien. Grâce au développement des outils d'intelligence artificielle, les auteurs créent des courtes histoires où les victimes racontent, face caméra, "leur histoire", avec une voix elle aussi générée automatiquement.

Les vidéos sont réalisées à l'aide d'une intelligence artificielle © BFMTV

Tout ceci n'est évidemment qu'une mise en scène morbide mais qui connaît un large succès sur les réseaux sociaux. La vidéo sur Estelle Mouzin cumule ainsi près d'un million de vues sur le compte TikTok de son auteur.

"Un manque absolu d'humanité"

Mais ces vidéos ne sont évidemment pas du goût des familles des victimes, révoltées par ces contenus. "Je n'ai pas envie de commenter ce genre de vidéos, si on peut appeler ça une vidéo, car ce serait apporter du crédit à quelque chose qui n'inspire que du mépris et du dégoût" répond à BFMTV le père d'Estelle Mouzin, disparue le 9 janvier 2003 à Guermantes, en Seine-et-Marne, et dont Michel Fourniret a reconnu le meurtre

"Ne pas respecter des enfants morts dans des circonstances affreuses et infliger ces vidéos aux parents, aux familles, aux proches, c'est un manque absolu d'humanité", poursuit-il.

Son avocat, Me Didier Seban, qui est aussi l'avocat des parents de Ludovic Janvier, un petit garçon de 6 ans porté disparu depuis 1983, va s'adresser aux plateformes pour leur demander le retrait de ces vidéos "odieuses et inquiétantes", au nom du respect de la dignité due aux morts.

Contactés par Tech&Co, un seul compte parmi ceux qui ont commencé cette macabre collection de vidéos a répondu aux sollicitations, sans évoquer directement le cas des faits divers.

Quelles règles pour Tiktok?

"J’ai créé ce compte tout simplement parce que je voulais tester la puissance des IA" écrit-il. "Je ne me concentre pas spécialement sur des personnes décédées, j’essaye de trouver des histoires atypiques, des histoires qui ont marqué la France des personnages emblématiques". Relancé une nouvelle fois sur la question des enfants disparus, le tiktokeur concerné n'est plus répondu aux questions.

Contacté par Tech&Co, Tiktok n'avait pas encore répondu. Le réseau social a dévoilé ce mardi une nouvelle version de ses règles communautaires pour interdire la publication de contenus créés par intelligence artificielle.

Tiktok fait cependant une exception pour les "personnalités publiques ayant un rôle public important", comme "un politicien, un chef d'entreprise (ou) une célébrité". Dans ce cas, elles pourront toujours être publiées sauf si "le contenu est utilisé à des fins de promotion ou enfreint toute autre politique", notamment en matière de discours haineux, de contenus à caractère sexuel ou de harcèlement.

Thomas Leroy avec Justine Chevalier