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Pourquoi le chargeur universel imposé par l’UE n’est pas “une révolution”

L’Union européenne va imposer à tous les fabricants de smartphones d’utiliser la technologie USB-C. Une contrainte qui arrive bien tardivement et qui oublie la charge sans fil.

“Ceci est une révolution”. Dans un tweet publié ce 8 juin au soir, Emmanuel Macron a ironiquement repris la phrase régulièrement attribuée à Steve Jobs, le fondateur emblématique d’Apple. Et pour cause: une directive européenne va obliger Apple à équiper ses iPhone d’un chargeur USB-C, aux dépens de son chargeur “maison” (baptisé Lightning) qui accompagne son smartphone depuis désormais une décennie.

Un texte qui arrive bien tard

Sur le papier, le texte adopté par l’UE concerne “les téléphones mobiles, les tablettes, les liseuses électroniques, les écouteurs intra-auriculaires, les appareils photo numériques, les casques et les écouteurs, les consoles de jeux vidéo portables et les enceintes portables qui sont rechargeables via un câble filaire”, imposant qu’ils puissent être chargés grâce à un câble USB-C.

Dans les faits, le port USB-C s’impose naturellement depuis plusieurs années sur toutes les catégories de produits citées ci-dessus. Remplaçant peu à peu le micro-USB, il a pour grand avantage de pouvoir se brancher dans les deux sens et d’assurer une rapidité de charge bien plus importante.

Des chargeurs USB-C et micro-USB
Des chargeurs USB-C et micro-USB © BFMTV

Comme le rappelle le clin d'œil d’Emmanuel Macron, le seul acteur majeur à refuser de basculer à l’USB-C reste donc Apple. Du moins, pour le moment. Le fabricant, qui a déjà opté pour l’USB-C sur ses ordinateurs mais aussi ses tablettes, a prévu, d’après des analystes généralement bien informés, de faire basculer ses iPhone vers l’USB-C en 2023. Soit quelques mois avant la mise en application de la directive européenne, prévue pour 2024.

Si la décision d’Apple pourrait être liée à l’anticipation de cette directive, la marque a malgré tout de bonnes raisons d’intégrer un port USB-C à son iPhone, indépendamment de toute contrainte légale. Cette technologie, qui offre notamment une charge plus rapide que le Lightning, est régulièrement réclamée par les utilisateurs.

Un câble Lightning et un câble USB-C
Un câble Lightning et un câble USB-C © Apple

La charge sans fil oubliée

Il est donc probable que la directive européenne, sur les rails depuis plus d’une décennie, arrive trop tard en s’appliquant à un marché déjà harmonisé. Très réduit, son effet ne sera toutefois pas nul: le texte forcera justement les fabricants à harmoniser leurs systèmes de charge rapide, afin que les utilisateurs profitent de la même vitesse de charge quel que soit le chargeur utilisé.

Soucieuse de ne pas faire appliquer un texte un jour obsolète, l’UE se réserve par ailleurs le droit de faire évoluer cette norme, pour imposer un jour la technologie qui succédera à l’USB-C. Mais étonnamment, le texte ne s’attaque pas à la charge sans fil, dont la popularité est pourtant croissante.

Sur le marché du smartphone, l’immense majorité des fabricants ont opté pour la norme de charge sans fil baptisée Qi. Une harmonisation qui aurait pu être pérennisée par l’Union européenne et accompagnée de la même obligation liée à l’interopérabilité de la charge rapide.

Surtout, la directive européenne ne mentionne à aucun moment le cas des montres connectées, “pour des raisons techniques liées à leur taille”, précise l’UE. Un marché où l’on compte pourtant presque autant de chargeurs propriétaires que de références.

Écologiquement, cet oubli pourrait pourtant peser lourd: au deuxième trimestre 2021, le cabinet Strategy Analytics estimait la croissance des ventes de montres connectées à 50% sur un an, avec plus de 18 millions d’unités vendues sur trois mois.

Avec une dizaine de marques qui se partagent l’essentiel du marché, ce sont ainsi des millions de chargeurs incompatibles les uns avec les autres, et potentiellement rendus obsolètes par l’arrivée de nouveaux modèles, qui pourraient ainsi finir à la poubelle.

https://twitter.com/GrablyR Raphaël Grably Rédacteur en chef adjoint Tech & Co