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Etats-Unis: les conseillers d'une ligne dédiée aux troubles alimentaires remplacés par une IA

A partir du 1er juin, les conseillers de la National Eating Disorders Association seront remplacés par une intelligence artificielle. La ligne téléphonique créée par l'association offrait ses conseils depuis 20 ans.

Avec l'essor de l'intelligence artificielle, les inquiétudes se répandent chez certains salariés concernant le maintien de leur emploi. Et la décision opérée par la National Eating Disorders Association (NEDA) ne risque pas d'apaiser les craintes. Les dirigeants de l'association américaine dédiée aux troubles alimentaires ont en effet décidé de remplacer leurs conseillers par Tessa, un chatbot.

D'après Abbie Harper, l'une des salariées remerciées par la NEDA, cette décision fait suite à celle de quatre employés de l'association de créer un syndicat. Épaulés par environ 200 volontaires, six salariés composaient jusqu'ici l'équipe chargée de répondre par message ou téléphone aux individus. Selon l'employée, l'annonce du remplacement aurait été faite seulement quatre jours après la création du syndicat.

"La NEDA affirme qu'il s'agissait d'un changement attendu depuis longtemps et que l'IA peut mieux aider les personnes souffrant de troubles de l'alimentation. Mais ne vous y trompez pas, on ne parle pas ici de chatbot mais bien de briser les syndicats, purement et simplement", explique Abbie Harper sur un blog.

Un chatbot de "bien-être"

L'employée évoque une bataille depuis plusieurs mois avec les dirigeants pour obtenir des conditions de travail plus profitables à tous. Plusieurs centaines de milliers de personnes ont fait appel aux services de la NEDA depuis sa création il y a 20 ans. Une charge de travail conséquente qui méritait, selon Abbie Harper, davantage de moyens humains.

Mais les dirigeants ont donc décidé d'opter pour la solution technologique avec Tessa, chatbot utilisant l'intelligence artificielle. L'outil n'est toutefois pas un double de ChatGPT. Le chatbot, créé par la Washington University's medical school, s'apparente plutôt à un "chatbot de bien-être", uniquement destiné à répondre aux questions de problèmes d'image. Tessa n'a de ce fait pas des réponses illimitées et ne peut répondre que via des méthodes thérapeutiques spécifiques.

"Le programme est né du besoin de nous adapter aux évolutions des besoins et attentes de notre communauté. Tessa ne prend pas de décisions et ne se nourrit pas des questions qui lui sont posées", a précisé un porte-parole de la NEDA au média Vice.

Combat en cours

D'après ce même porte-parole, Tessa aurait été au préalable testé sur sur 700 femmes entre 2021 et 2023 et plus de la moitié lui ont accordé une note d'appréciation de 100%. Les bénévoles de l'association seront eux aussi invités à exercer le rôle de testeurs de Tessa à l'avenir, en lieu et place de leur activité de soutien.

Les employés licenciés ont eux décidé de continuer leur combat pour récupérer leur emploi en constituant un dossier auprès la National Labor Relations Board, agence publique chargée d'enquêter sur les pratiques illégales dans le monde du travail.

"Bien que nous pensions que la technologie puisse être profitable dans certains domaines, ici, dans l'association, nous ne laisserons pas nos dirigeants utiliser un chatbot pour se débarrasser de notre syndicat et de nos emplois", a plaidé Abbie Harper.

Ce n'est d'ailleurs pas la première fois qu'une polémique naît de l'utilisation d'un chatbot à des fins médicales. Fin 2022, la plateforme d'aide aux personnes souffrant de problèmes de santé mentale Koko a décidé de remplacer ses bénévoles par ChatGPT, le tout sans avertir les patients. Une expérience qui a tourné court après les nombreuses réactions négatives des internautes.

Julie Ragot