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"Votre argent ira à une transphobe": pourquoi le jeu Hogwarts Legacy, dérivé d'Harry Potter, est critiqué par des fans?

Hogwarts Legacy sera sans conteste l’un des évènements gaming de l’année 2023. Mais les prises de position de la créatrice d’Harry Potter, J.K. Rowling, poussent aujourd’hui certains fans de la saga à boycotter le jeu vidéo, avant même sa sortie.

Le 10 février prochain, il y aura ceux qui fonceront acheter Hogwarts Legacy: L’Héritage de Poudlard pour manier baguettes et balais magiques, ceux qui n’ont que faire des aventures de l’apprenti sorcier mais aussi ceux qui boycotteront le jeu vidéo dérivé d’Harry Potter.

L’évènement gaming de 2023 suscite en effet une vive polémique depuis plusieurs mois. De nombreux fans de la saga tentent d’enrayer la sortie du jeu, notamment sur les réseaux sociaux, où les appels au boycott se multiplient. En cause: les récentes sorties médiatiques de la créatrice d’Harry Potter, J.K. Rowling, sur la communauté LGBT, en particulier à propos des personnages transgenres.

Nombreux propos polémiques

L’autrice a en effet tenu à plusieurs reprises des propos qui nient les droits des personnes transgenres. J.K. Rowling avait par exemple affiché son soutien sur Twitter à Maya Forstater, une chercheuse licenciée qui affirmait entre autres que les femmes trans étaient des hommes.

"Habillez-vous comme vous le souhaitez. Appelez-vous comme bon vous semble. Couchez avec n'importe quel adulte consentant. Vivez votre meilleure vie dans la paix et la sécurité. Mais forcer les femmes à quitter leur travail pour avoir maintenu que le sexe est réel?" avait alors soutenu J.K. Rowling.

La créatrice d’Harry Potter avait aussi pointé du doigt un article qui évoquait "les personnes qui ont leurs règle" et non pas "les femmes", pour ne pas exclure les personnes trans. "Je suis sûre qu’il y avait un mot pour ces gens. Quelqu’un m’aide?", avait questionné l’autrice.

Des sorties qui n’ont eu de cesse que d’éloigner les fans d’Harry Potter, faisant partie ou étant alliés de la communauté LGBT. A noter que J.K. Rowling avait également été épinglée pour sa représentation des gobelins de la banque Gringotts dans Harry Potter. Ces derniers seraient en effet proches des caricatures faites dans le livre Les Protocoles des Sages de Sion, un ouvrage conspirationniste de 1903 qui indiquait le soit-disant plan de conquête prévu par les juifs et les francs-maçons pour dominer le monde et les banques. Un livre qui avait été notamment cité quelques années plus tard par Adolf Hitler dans Mein Kampf.

Une communauté tiraillée

Les fans des différentes sagas sont donc aujourd’hui divisés sur la question: faut-il ou non acheter des produits dérivés, en particulier le très attendu Hogwarts Legacy? Pour certains, la réponse est évidente: sur Twitter, de nombreux tweets appellent à ne pas dépenser son argent dans le jeu vidéo: "Si vous achetez Hogwarts Legacy, votre argent ira dans la poche d'une femme qui affirme que les personnes transgenres sont des violeurs/violeuses. Maintenant, à vous de voir avec votre conscience et votre thune", "Acheter Hogwarts Legacy, c'est financer une transphobe eugéniste qui milite activement contre les personnes trans, c'est donc un achat transphobe".

Mais d’autres fans pointent du doigt l’absurdité de définir cet achat comme transphobe. "C'est comme dire que si vous avez déjà joué à un jeu Blizzard, vous êtes automatiquement un fan de harcèlement sexuel" explique un internaute, faisant référence aux récents scandales au sein de ce studios de jeux vidéo.

Certains rappellent aussi que J.K. Rowling n’est pas directement reliée à Hogwarts Legacy. "Elle ne gouverne pas le monde sorcier, c’était juste sa création", estime Mitchell, interrogé par le Washington Post. "Ce que nous, en tant que fans, lecteurs, observateurs, joueurs, décidons de faire avec ce monde est entièrement séparé d’elle ou de toute croyance qu’elle pourrait avoir."

Le jeu vidéo est en effet adapté de la saga Harry Potter mais n’a pas du tout été élaboré avec J.K. Rowling en personne. "J.K. Rowling n'est pas impliquée dans la création du jeu, mais puisqu'elle a créé le monde des sorciers et que c'est une des plus grandes conteuses du monde, son extraordinaire corpus est à la base de tous les projets du Wizarding World", indique toutefois le site dédié au jeu vidéo.

"Il ne s'agit pas d'une nouvelle histoire de J.K Rowling, mais nous avons collaboré étroitement avec son équipe sur tous les aspects du jeu pour nous assurer qu'il reste conforme aux expériences magiques que les fans attendent", précise le site.

Certaines personnes ayant travaillé sur le jeu vidéo ont cependant tenu à se désolidariser de J.K. Rowling. Sebastian Croft, acteur vu dans la série Netflix Heartstopper et voix-off d’un des personnages du jeu vidéo, a indiqué que lors de son casting, les positions de J.K. Rowling n’étaient pas connues. "J’ai été casté pour ce projet il y a plus de trois ans, à l’époque où Harry Potter était pour moi un monde magique avec lequel j’ai grandi. […] Il n’y a pas de communauté LGBT sans le T" avait indiqué l’acteur sur Twitter.

J.K. Rowling pas inquiète

Le malaise persiste donc à quelques jours de la sortie du jeu vidéo tant attendu. Mais de son côté, J.K. Rowling ne semble pas forcément perturbée par les polémiques visant son univers. En réponse à un tweet lui demandant comment elle arrivait à dormir la nuit en sachant qu’elle avait perdu une partie de son public, l’autrice avait répondu que "lire ses chèques pour droits d’auteur faisait partir la douleur assez rapidement".

Boycott ou non, le jeu d’action-aventure devrait dans tous les cas rester l’évènement gaming de ce début d’année. Mais un simple coup de baguette magique ne devrait pas suffire à effacer toutes les critiques.

Julie Ragot