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Un million à la clé et des Français en lice: ce qu'il faut savoir du plus gros tournoi esport de Rainbow Six Siege

Ce vendredi débute à Montréal (Canada) le tournoi final du 6 Invitational, le grand rendez-vous des meilleures équipes eSport du jeu Rainbow Six Siege. Un jeu sorti en 2015 dans une relative discrétion et pris d'assaut par les joueurs qui en ont fait un jeu hautement compétitif.

Dernières minutes avant le grand saut. Après des mois de compétition à travers le monde, dix jours d’ultimes affrontements entre les 20 meilleures équipes du monde, la phase finale du 6 Invitational débute ce vendredi près de Montréal (Canada). Dans l’antre de la Place Bell à Laval, les dernières équipes en lice vont entrer dans l’arène devant des milliers de spectateurs venus du monde entier. En jeu: le titre de meilleure équipe sur le jeu Tom Clancy’s Rainbow Six Siege et un million de dollars pour les vainqueurs. Bienvenue dans la fureur d’un tournoi esport !

Parmi les derniers rescapés de plusieurs mois de batailles, on trouve une équipe composée de joueurs français, Wolves, qui a passé non sans encombre les poules, puis les matches à élimination directe pour garder une chance de disputer la finale dimanche 19 février. Pour aller plus loin, il leur faudra déjà écarter l'équipe européenne de G2 Sports dès ce vendredi à 16h30 (heure de Paris).

Incarner un agent du SWAT ou du GIGN

Rainbow Six Siege, cela ne vous dit pas forcément grand-chose. Il s’agit d’un jeu de tir extrêmement tactique dans lequel deux équipes de cinq joueurs s’affrontent, définis comme attaquants ou défenseurs, en incarnant des opérateurs de groupes d’intervention et forces spéciales (SWAT, GIGN, GSG 9, Navy Seal, Spetsnaz, SAS...). Le but est alors d’éliminer intégralement l’équipe adverse ou d’atteindre un objectif (diffuser une bombe ou empêcher cela par exemple) sur une carte de jeu où tous les éléments peuvent être détruits à coup d’armes, de drones.

Si le jeu était pensé dès le départ comme très compétitif par sa dimension en équipe et tactique, il n’a pas été conçu pour devenir une compétition esport pour autant.

"Rainbow Six Siege est un jeu avec un esprit de compétition super fort, mais l’idée d’en faire une véritable compétition est venue bien après lorsque la communauté des joueurs a décidé de s’en emparer", confie à Tech&Co Mohammed Benhenneda, directeur business et stratégie du jeu.

"En tant que développeur, on peut donner des outils, faire en sorte que le jeu ait une certaine profondeur, que les joueurs puissent s’améliorer en permanence. Mais à la fin, ce sont eux qui font que ce jeu devient esport."

Et comme toujours, quand l’engouement d’un jeu dépasse ses créateurs, c’est la communauté qui organise elle-même des tournois. "C’est en voyant ça qu’on s’est dit qu’il fallait qu’on investisse l’esport avec le jeu, parce que les joueurs étaient intéressés par son aspect compétitif et l’idée de s’organiser en tournoi", ajoute-t-il. Et de l’aveu même de ses équipes de développement, le jeu d’Ubisoft a rapidement dépassé toutes les espérances.

Sorti fin 2015 - décalé en raison des événements du Bataclan en novembre de la même année et sorti sans grande publicité de fait -, Rainbow Six Siege comptait plus de 20 millions de joueurs après deux ans d’existence, loué pour le côté innovant de son système multijoueur coopératif. De quoi lui tracer une route certaine vers le succès dans l’esport.

De la difficulté de satisfaire les joueurs classiques et les joueurs esport

"Pour devenir un jeu esport efficace, il faut proposer de la profondeur, mais aussi une véritable progression au joueur, qu’il puisse faire partie d’une élite. On a les deux ici", se félicite Mohammed Benhenneda. Salué par la critique pour avoir un suivi efficace et de nombreuses mises à jour (ajout d’opérateurs, de cartes, d’armes et autres accessoires), le titre d’Ubisoft a depuis multiplié les compétitions qui se déroulent en Amérique, en Europe comme en Asie chaque année.

Six invitational
Six invitational © Ubisoft

Un jeu résolument esport qui se félicite d’écouter ses joueurs professionnels toujours à l’affût des nouveautés pour améliorer leurs skills et rester encore plus compétitifs. Au point d’en oublier les joueurs plus classiques qui ne cherchent qu’à s’amuser entre amis?

"Quand on parle d’amélioration du jeu, évidemment que c’est plus complexe lorsque l’on est un jeu esport. Parce qu’au final, on a deux types de populations de joueurs: la population compétitive et celle qui joue pour le plaisir", reconnaît le responsable. "Notre rôle, c’est vraiment d’être entre les deux et de voir comment on peut parler aux deux, comment on peut apporter des améliorations qui satisfassent tout le monde sans casser l’aspect compétitif. On est sans cesse en train de chercher à équilibrer ces deux aspects."

Des places vendues jusqu'à 245 euros

Chez Ubisoft, on reconnaît que les joueurs professionnels sont sollicités pour faire avancer le jeu, avoir leurs retours et écouter leurs idées. Mais ce n’est pas pour autant que les développeurs rendent tout possible. "Ils ont le scope de la compétition en tête et parfois, leurs demandes ne peuvent pas s’appliquer à une population plus large", souligne-t-il.

L'équipe Wolves lors du Six Jönköping Major sur "Rainbow Six Siege"
L'équipe Wolves lors du Six Jönköping Major sur "Rainbow Six Siege" © Ubisoft

Mais il sait aussi que c’est la communauté qui a permis au jeu d’être ce qu’il est aujourd’hui, un shooter qui engrange des millions de dollars et il le doit à ses joueurs, "à la façon dont ils ont pensé à le jouer que même nous, nous n’avions pas imaginé en le concevant." Et pour cette raison, il promet que les équipes de création ne s’interdiront jamais rien.

"Tout est possible et l’évolution du jeu, on la fait avec la communauté. On est toujours prêt à explorer, mais on essaie de faire ce qui peut être réalisable et mieux pour le plus grand nombre," conclut Mohammed Benhenneda.

Plus de sept ans après son lancement, Rainbow Six Siege compte plus de 80 millions d’adeptes à travers le monde. Certains seront devant leur ordinateur pour suivre le 6 Invitational tout le week-end en direct sur Twitch et YouTube. D’autres ont payé de 170 à 350 dollars canadiens (de 118 euros à près de 245 euros) pour vivre l’événement sur place, donner de la voix pour encourager leurs joueurs préférés, dans une ambiance qui n’a rien à envier aux stades de football. De quoi rappeler que dans esport, il y a aussi sport et la même folie.

Par Melinda Davan-Soulas