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Dead Space revient: mais faire un remake est-il toujours une bonne idée?

Dead Space dans sa version remake de 2023

Dead Space dans sa version remake de 2023 - Electronic Arts

Space opera horrifique, la trilogie Dead Space a marqué des générations de joueurs. Le premier opus signe son retour le 27 janvier dans une version revue du sol au plafond de l'USS Ishimura toujours pris d’assaut par des monstres encore plus effrayants.

Par facilité ou pour (l’excuse de) faire découvrir de grands classiques aux jeunes générations, le jeu vidéo s’est amouraché depuis plusieurs années du remake. Cet art de faire du neuf avec de l’ancien, mais en plus beau et plus moderne, tend à se reproduire à grande vitesse.

Certains se cachent derrière d’autres appellations (HD par exemple) pour ne pas se faire taxer de "remake" (version refaite) ou "remastered" (version plus belle), mais le résultat est souvent le même: même scénario (avec l’ajout des extensions sorties au fil du temps parfois), même gameplay avec quelques touches de modernité, et même décor. Les développeurs invoquent alors la nostalgie pour les plus anciens joueurs, des parents qui "rêvent" de faire revivre leurs jeux d’enfant auprès de leur progéniture. Bien souvent, c’est aussi une solution de facilité pour capitaliser sur un succès acquis d’avance.

De la nostalgie qui rapporte gros

Ainsi, on a vu apparaître en 2022 les remakes de Call of Duty Modern Warfare II (dont la version remastérisée datait de 2020), The Last of Us Part I (sorti en 2013 et déjà remastérisé en 2014), Resident Evil 2 et 3 en attendant l'arrivée du 4 en 2023, Pac-Man World : Re-Pac (sorti en 1999) et bientôt Crisis Core: Final Fantasy VII Reunion (sorti en 2007), après le Final Fantasy VII Remake, dernier d’une longue lignée d’épisodes de la saga de Square Enix qui ont quasiment tous été refaits depuis 2000.

Le personnage d'Ellie dans The Last of Us Part I (2022) a changé, le canapé aussi.
Le personnage d'Ellie dans The Last of Us Part I (2022) a changé, le canapé aussi. © Naughty Dog - Sony
Le personnage d'Ellie dans The Last of Us Remastered (2014)
Le personnage d'Ellie dans The Last of Us Remastered (2014) © Naughty Dog - Sony

Et parfois, tout revient aussi en compilation comme Sonic Origins qui fait du 3-en-1 en remettant au goût du jour les trois premiers épisodes de Sonic The Hedgehog (1991, 1992, 1994). Ou avant lui Crash Bandicoot dont les trois premiers jeux avaient été compilés dans Crash Bandicoot N.Sane Trilogy (2017), mais avec le mérite de refaire l’animation, les graphismes et une nette amélioration audio.

Loin de simples portages sur d’autres plateformes à la GTA V, ils sont bien souvent une raison d’aller s’implanter sur la génération suivante de consoles. Si cela fait venir de nouveaux joueurs, faire des remakes a aussi le mérite de garder le souvenir "intact" d’un jeu dans les esprits. Très beau sur PS2, Xbox 360 ou autre GameCube, il aurait pris un méchant coup de vieux en arrivant en version simplement remastérisée sur une console de dernière génération. Le remettre au goût du jour permet de garder vive l’idée que l’on a gardée de ces petites perles à leur sortie, pour peu que le gameplay comme l’histoire n’aient pas pris une ride à l'image du remake des jeux Mafia et Mafia II.

Le commandant Phillip Graves dans Call of Duty Modern Warfare 2
Le commandant Phillip Graves dans Call of Duty Modern Warfare 2 © Activision

Mais il y a aussi ceux qui se sont ratés comme Silent Hill HD (épisodes 2 et 3, pas le 1 dont le code avait été perdu...), Super Mario 64 (passé de la N64 à la Nintendo DS sans changer les contrôles) ou encore Secret of Mana, remake 3D raté pour PS4 d'un titre Game Boy. Des jeux qui avaient mis des étoiles dans les yeux des joueurs mais considérés des années plus tard comme des remakes calamiteux avec une jouabilité austère et dépassée, les graphismes modernisés sauvant à peine le tout. Seul le tiroir-caisse avait peut-être donné des satisfactions aux éditeurs...

Dead Space, effrayant comme dans les souvenirs...

Prochain à s’annoncer, Dead Space. Le space opera terrifique de survie, sorti en 2008, arrive le 27 janvier sur PC et sur les consoles de dernière génération. Nous avons pu en avoir un aperçu et nous y remettre 15 ans après. Premier constat: les sensations de terreur possibles sont les mêmes, cette même peur de se faire assaillir à chaque coin de l'USS Ishimura.

Sur le papier et au vu des premières images, comme souvent, l’idée est bonne. Visuellement, le jeu conçu par Visceral Games et désormais entre les mains de Motive Studio, a fait un bond de géant. On est toujours dans la même ambiance oppressante façon Alien, arpentant un vaisseau spatial en perdition et pris d’assaut par d’étranges créatures qui vous traquent.

C’est plus beau tout en étant plus angoissant. Désormais débarrassé des temps de téléchargement, atout des PS5 et Xbox Series faisant, il n’y a plus de moments de répit et le trouillomètre est donc potentiellement en continu au maximum. De plus, le son a été également retravaillé pour être encore plus présent, plus strident. Des bruits ont même été refaits et d’autres ajoutés pour créer cette atmosphère limite poisseuse par moment. Vous faisiez des bonds il y a 15 ans, vous referez les mêmes. Alors que ce n'est pourtant pas tout à fait le même jeu.

Pour s’inscrire davantage dans l’air du temps, le héros, Isaac Clarke, se montre plus bavard. Ceux qui ont connu le personnage originel crieront peut-être à l’hérésie, mais en 2023, cela passe tranquillement. C’est aussi peut-être notre mémoire qui nous joue des tours en ayant gardé dans un coin de notre esprit le souvenir d’un jeu où les cris des monstres et les grincements de la tuyauterie du vaisseau donnaient sa couleur sonore au titre d’EA. Des sons qui étaient des acteurs à part entière de l’expérience et sont encore plus présents, comme pour mieux renforcer l’atrocité d’un décor plus effrayant et angoissant.

Leurs effets ont même été améliorés, de la distance ajoutée, pour rendre le jeu plus immersif et jouer davantage avec nos nerfs. On a toujours peur, mais nos yeux ne sont pas heurtés par des graphismes désuets et le jeu reste aussi frais à notre esprit désormais exposés aux codes visuels de 2023.

Dead Space (2023)
Dead Space (2023) © Electronic Arts

"Ne pas dénaturer le jeu original"

Le jeu lui est fidèle au Dead Space originel dont il reprend le nom. On y trucide toujours allègrement des morts-vivants qui veulent notre peau. Le remake nous offre des bouts de chair et des giclées de sang bien plus réalistes. On renoue avec Dead Space comme on retrouve un vieil ami qu’on aurait l’impression d’avoir quitté la veille et qui n'a pas changé.

“On ne voulait pas dénaturer le jeu original. On avait une vision créative dès le début. Mais on voulait avoir une expérience ininterrompue”, explique à Tech&Co Eric Baptizat. De l’aveu même du directeur du nouveau Dead Space, les équipes se sont néanmoins autorisées quelques entorses. “On a désormais un long plan séquence du début à la fin, car on est débarrassé des zones de chargement, des coupes dues aux cinématiques.” Pour réussir cela, la nouvelle équipe a réagencé le vaisseau pour que le parcourir soit logique. “On a déplacé certaines parties, certaines pièces, on a rajouté des connexions. Mais maintenant, on peut se promener vraiment dans toutes les zones”, s’enthousiasme Eric Baptizat. “C’est pour encourager le joueur à explorer, visiter ou revisiter. Il se passe toujours quelque chose dans une pièce, même quand on y revient.”

Dead Space (2023)
Dead Space (2023) © Electronic Arts

Et le gameplay s’est aussi modernisé, sans se trahir. “Il y a quelques éléments que l’on a pris de Dead Space 2 ou 3 et qu’on a mis dedans, car on voulait donner plus de possibilités, notamment avec le pouvoir du héros”, reconnaît-il. “Et cela ne va pas forcément surprendre les connaisseurs de la franchise, car ce sont des éléments emblématiques qui ont fait progresser la saga, mais ils sont déjà présents”. Les zones Zéro gravité du premier Dead Space, qui consistaient à faire rebondir le joueur de mur en mur avec des bottes magnétiques, ont été remplacées par la flottaison apparue dans Dead Space 2. Cela donne un effet plus contemporain à la mécanique de jeu, comme les changements apportés aux puzzles dans certaines pièces qui ont été modernisés aussi, avec certaines missions ajoutées.

“Il y a des éléments nouveaux tout en laissant l’impression que c’est le même jeu. La même histoire, mais dans un décor identique et revisité à la fois,” conclut Eric Baptizat. Une nostalgie modernisée qui va (re)donner envie d’aller crier dans l’espace.

Dead Space sera disponible sur PS5, Xbox Series X⎜S et PC le 27 janvier 2023.

Melinda Davan-Soulas