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Comment le jeu français Dead Cells continue de séduire les joueurs cinq ans après sa sortie

Ce lundi, Dead Cells sort une quatrième extension: Return to Castlevania. Développé à Bordeaux, le jeu affiche une longévité rare grâce à la volonté de ses créateurs de fournir régulièrement du nouveau contenu.

Cinq ans dans le jeu vidéo, c’est long. Après une telle durée de vie, les joueurs ont souvent abandonné un titre depuis longtemps. D’autant plus sur la scène indépendante. Mais quelques exceptions arrivent à conserver l'attrait de leurs fans intact. Dead Cells en fait partie.

Ce jeu vidéo français a surpris lors de sa sortie en août 2018 par son rythme nerveux et sa difficulté proposant un réel défi manette en main. Son succès est immédiat. Le studio bordelais Motion Twin est même ovationné lors des Game Awards, la cérémonie de récompense phare des jeux vidéo. Les développeurs du titre y décrochent deux trophées dans les catégories jeu indépendant et jeu d’action de l’année. Avec ce palmarès, Dead Cells s’assure de belles ventes.

Un concept qui fait mouche

Aujourd’hui encore, la création française est une référence dans le domaine des roguelite, avec plus de huit millions d’exemplaires vendus. Ce type de jeu repose sur une mécanique où il faut enchaîner les parties pour débloquer de nouvelles armes, de nouveaux sorts et ainsi découvrir de nouveaux environnements. Coincé sur une île, le joueur s’échappe d’une prison avec l’intention de tuer le roi des lieux pour retrouver sa liberté.

Malgré son scénario assez simple, Dead Cells séduit avant tout par les sensations de jeu qu’il offre. Corsé, le titre demande aux joueurs de comprendre le mécanisme de chaque ennemi. Le tout en infligeant de nombreuses morts aux novices. Le concept fait mouche et un lien fort se crée avec la communauté de joueurs.

"Ce qu’on aime à dire, c’est que nous n’avons jamais quitté l’early access", explique Benjamin Laulan, le directeur des opérations et cofondateur d’Evil Empire, le studio désormais en charge de faire perdurer le titre à travers le temps.

L’early access (accès anticipé, en français) est une période cruciale pour un jeu indépendant comme Dead Cells. C’est durant ce laps de temps que le concept d’un titre se confronte aux premiers retours du public. Dès le mois de mai 2017, les développeurs recueillent alors les avis, suggestions et critiques afin de revoir leur copie en amont du lancement officiel en août 2018.

Benjamin Laulan fait alors partie de l’entreprise chargée du marketing de Dead Cells. Il est donc au plus proche de la communauté qui se crée autour du jeu. Face à l’engouement généré, émerge alors la possibilité de faire durer le succès du titre en l’alimentant régulièrement de nouveaux contenus. Une démarche quasi-inédite, surtout dans le domaine des jeux vidéo indépendants.

"Un cercle vertueux"

"On a proposé à Motion Twin de devenir un studio de jeu vidéo afin qu’il nous confie la gestion de la licence. Ils ont été plutôt charmés par l’idée", se souvient Benjamin Laulan, qui crée ainsi Evil Empire avec ses deux collègues de l’époque.

Motion Twin reste à la manœuvre jusqu’à la sortie d’un premier DLC (contenu téléchargeable) gratuit en mars 2019. Mais dans l’ombre, le studio fraîchement créé se fait la main: d’abord en créant de nouveaux ennemis, puis de nouvelles armes et enfin de nouveaux modes de jeu.

Les propositions d’Evil Empire sont régulièrement ajoutées au jeu de manière gratuite jusqu’au mois de février 2020. A cette date, les développeurs mettent à disposition leur première extension payante, The Bad Seed, intégrant deux niveaux inédits. La communauté Dead Cells répond alors présent.

"Proposer ces environnements à cinq euros après un an de DLC gratuits a créé une sorte de cercle vertueux. Les joueurs n’ont pas eu l’impression de payer, mais de financer le contenu à venir", résume le directeur des opérations d’Evil Empire.

Un nouveau cycle repart alors jusqu’en janvier 2021 et la sortie de Fatal Falls. Là encore, les fans répondent présent, déboursant à nouveau cinq euros. Il en sera de même un an plus tard avec The Queen and the Sea. Sortie après sortie, de plus en plus de joueurs. Certaines années, Dead Cells a même réussi l'exploit de se vendre davantage que l'année précédente. Un fait rarissime dans l'univers du jeu vidéo.

Une extension hommage à Castlevania

Ce lundi, une quatrième extension payante voit le jour. Mais cette fois, il s’agit de "boucler la boucle", s’amuse Benjamin Laulan. Avec Return to Castlevania, les développeurs ont souhaité rendre hommage à l’emblématique franchise vampirique. Les jeux Castlevania, qui proposent de venir à bout de Dracula en se baladant dans son manoir, ont été l’une des principales sources d’inspiration des créateurs de Dead Cells.

Pourtant, lorsque Benjamin Laulan rencontre Konami, le détenteur des droits de Castlevania, il a une toute autre idée en tête. Au Japon, l’entreprise n’est pas seulement éditrice de jeux vidéo, elle est également un imposant distributeur. L’objectif était alors de proposer une édition soignée de Dead Cells dans les magasins de l’Archipel.

Lors de ses échanges, le culot du cofondateur d’Evil Empire paye. Benjamin Laulan ose demander d’intégrer un clin d'œil à Castlevania au sein de son titre. "Konami nous a laissé carte blanche", s’étonne-t-il encore. Les discussions se terminent avec le droit de concevoir deux vastes environnements de jeu, d’ajouter des ennemis et armes iconiques de la franchise et même de reprendre une soixantaine de musiques issues de la saga Castlevania.

Quant à savoir si ce DLC hommage marquera la fin des ajouts au sein de Dead Cells, Benjamin Laulan rassure: "On ne veut pas créer de ras-le-bol chez les joueurs, mais on a déjà des idées de contenus au moins jusqu’à la fin de l’année."

Pierre Monnier