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Entre Facebook et Le Bon Coin, Nextdoor, l'appli américaine de bon voisinage, s'impose en France

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Lancée en 2018 dans l'Hexagone, l'application de réseau social entre voisins revendique une présence dans 2400 villes et 6300 quartiers. Et la France connaît une des plus forte croissance pour le service, assure sa patronne de passage à Paris.

La France va-t-elle succomber au Facebook des voisins? Lancée il y a un an dans l'Hexagone, l'application américaine Nextdoor semble petit à petit s'imposer auprès des Français. Si la start-up ne communique pas sur son nombre d'utilisateurs, elle est déjà présente dans 2400 villes et 6300 quartiers et aurait séduit plusieurs centaines de milliers de Français. "La croissance en France est plus rapide qu'aux Etats-Unis et au même niveau qu'en Grande-Bretagne, assure Sarah Friar, la patronne depuis 2018 du réseau social de quartier. C'est la partie "communauté" qui plait le plus ici: les fêtes entre voisins, les événements solidaires, les échanges..."

Créé en 2011 en Californie, le réseau social se veut une sorte d'anti-Facebook. "Les applications et les réseaux sociaux veulent que vous passiez le plus de temps possible sur l'écran, assure Sarah Friar. Nous c'est le contraire, nous voulons que les gens se servent de Nextdoor pour se rencontrer réellement."

Le concept: il s'agit d'un réseau social avec un fil général et des fils spécialisés (commerce, sécurité, événements...) mais qui n'est accessible qu'aux personnes habitant le même quartier, à savoir 100 mètres autour de chez vous. D'ailleurs pour vous inscrire, il va vous falloir justifier votre adresse. Soit en vous géolocalisant, soit en entrant un code qui vous sera envoyé par courrier à votre domicile. Une procédure un peu plus complexe que pour un réseau social classique mais qui permet selon les responsables de l'application d'avoir une vraie communauté active. 

Des dérives raciales aux Etats-Unis

C'est d'ailleurs pour ça que le réseau social est délimité. Si vous habitez dans le quartier de Bastille à Paris, vous ne pourrez pas voir ce que racontent les utilisateurs qui vivent vers la Place de Clichy. "C'est normal, assure Karim Bassiri, le patron de Nextdoor en France. Les relations doivent être au même niveau qu'avec le boulanger en bas de chez vous et pour ça il faut assurer un voisinage limité pour éviter le trolling par exemple." 

Sur Nextdoor, les utilisateurs partagent leurs bons plans, se donnent des conseils, organisent des événements, se prêtent des outils de bricolage, trouvent des baby-sitters ou créent des clubs d'échanges de livres. L'application permet aussi de proposer des objets à la vente comme sur Le Bon Coin ou des services comme sur Stootie ou AlloVoisins mais ce n'est pas la partie la plus développée encore. 

Tout comme la partie sécurité d'ailleurs et ce à la différence des Etats-Unis où cet usage est très développé et a occasionné des dérives. Dans certains quartiers, les utilisateurs signalent la présence d'inconnus rodant dans le quartier. Des alertes qui ont vite viré au profilage raciste. Pour y remédier, Nextdoor a fait évoluer son algorithme pour bannir certains termes comme "noirs". Mais les utilisateurs ont vite contourné le système en trouvant des périphrases comme "personne à dreadlocks". Pour contrôler les publications, la plateforme dispose d'ambassadeurs qui sont les personnes les plus actives du quartier sur la plateforme. "S'il y a une publication bizarre ou inappropriée, les ambassadeurs peuvent la flaguer et la signaler pour qu'on la supprime, explique Karim Bassiri. Notre charte bannit de toute façon sur le fil général les discussions sur les thèmes politiques, religieux ou raciaux."

Les petits commerces y feront leur pub

Encore en phase d'acquisition de nouveaux utilisateurs, Nextdoor n'a pas encore lancé en France la monétisation de son service. Mais elle le fera prochainement. Totalement gratuite, l'application se rémunère avec la publicité locale comme les commerces de proximité ou les groupes immobiliers qui proposent des offres spécifiques sur le quartier. "L'idée est de permettre aux petits commerces ou aux artisans qui n'ont pas les moyens de faire de la pub sur Google ou Facebook de communiquer sur notre plateforme, assure Karim Bassiri. Mais à la différence de Facebook, nous ne ciblons pas l'utilisateur en exploitant ses données privées. La pub est la même pour l'ensemble du quartier."

Et après les particuliers, Nextdoor veut s'attaquer aux collectivités locales et aux associations. L'idée est de leur proposer le service afin qu'elles puissent cibler précisément leurs communications. une utilisation qui pourrait notamment intéresser les communes et les conseils de quartier. Ils pourraient ainsi avertir les habitants de tel quartier de l'imminence de travaux, de l'ouverture prochaine d'une crèche ou encore d'un événement à la bibliothèque du coin. Dans le monde, plus de 5000 services publics ou associations utilisent déjà la plateforme comme la police londonienne, des pompiers ou des services de météo. A Londres, certains agents de police interrogent ainsi la communauté de leur quartier pour savoir où faire des rondes ou pour simplement se présenter auprès des riverains. "Nous voulons recréer du lien entre les personnes, résume Sarah Friar. Permettre de faire parler entre eux des gens qui ne se parlent plus." 

Frédéric Bianchi
https://twitter.com/FredericBianchi Frédéric Bianchi Journaliste BFM Éco