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Taxe streaming: Spotify "désinvestira la France", selon son patron

La taxe sur le chiffre d'affaires des plateformes d'écoute de musique en ligne, approuvée ce mercredi par le gouvernement, a rendu furieux le patron de l'entreprise suédoise.

"Une erreur stratégique monumentale, qui va à l'encontre des enjeux de souveraineté économique, culturelle et technologique européenne." Le directeur général de Spotify France, Antoine Monin, n'a pas mâché ses mots ce jeudi matin sur le plateau de FranceInfo.

La raison? Une taxe sur le chiffre d'affaires des plateformes d'écoute de musique en ligne dont le gouvernement a annoncé la mise en place, ce mercredi, dès 2024. Un "coup dur" pour le secteur de la musique qui concerne Spotify, Apple ou encore Deezeres géants de l'industrie musicale.

"Revirement" de situation

Ce "nouvel impôt de production" a été brandi le 21 juin dernier, lors de la fête de la musique, par le président de la République, Emmanuel Macron. Les bénéfices du prélèvement seront reversés au Centre national de la musique (CNM) pour soutenir la filière musicale française.

Le directeur général de Spotify France, fermement opposé à cette taxe, regrette que le gouvernement ait "cédé à la pression du lobby du spectacle vivant et de certains parlementaires". Une pression qui explique "un revirement" de situation, alors qu'Antoine Monin avait eu "des accords de branche" avec le Ministère de la Culture sur le sujet.

"Comment voulez-vous que nous opérions en France?"

La taxe, à hauteur d'1,75% du chiffre d'affaires, qui veut toucher les plateformes payantes (comme Apple Music, Deezer, Spotify) et les diffuseurs gratuits (Youtube, Facebook, Amazon), devrait indirectement "faire le jeu" des GAFA (les géants du Web: Google, Amazon, Facebook, Apple), puisque Spotify est une "entreprise indépendante" qui "peine à être rentable".

"À la différence des GAFA, nous ne faisons que de la musique. Eux ont les moyens d'absorber cette taxe, pas nous. Spotify n'est pas encore rentable. Pour la première fois, l'entreprise a réalisé des bénéfices au troisième trimestre mais nous restons dans un équilibre financier fragile", confie Antoine Monin sur le plateau de FranceInfo.

"Nous versons 70% de nos revenus aux ayants droit de la musique, vous ajoutez à cela une TVA à 20%, une taxe sur les services numériques à 3%, une taxe sur les services vidéo à 5% et maintenant une taxe streaming à 1,75%. Comment voulez-vous que nous puissions opérer sur un marché comme la France?"

Spotify "désinvestira la France"

Interrogé sur la capacité de Spotify à absorber cette taxe, Antoine Monin se veut confiant mais l'entreprise suédoise "désinvestira la France" pour investir sur d'autres marchés plus rentables et plus en avance, comme le Royaume-Uni ou l'Allemagne. "La France ne sera plus une priorité pour Spotify" résume-t-il.

"Cette taxe est inéquitable puisqu'elle concerne uniquement les ventes en streaming et pas les ventes physiques, ni les radios musicales" explique-t-il. La volonté de financer le CNM est compréhensible selon le directeur général de Spotify France mais "l'ensemble de la filière doit contribuer" à ce financement.

Spotify, leader mondial des plateformes audio, a récemment annoncé licencier 17% de ses salariés pour "enfin devenir rentable" (environ 1.500 postes). Il devrait faire face à cette nouvelle taxe, dont les modalités n'ont pas été encore annoncées par le Ministère de la Culture.

Willem Gay