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Société

Un lycéen jugé pour tentative d'assassinat sur un enseignant juif

Suite à l'agression, le président du consistoire de Marseille avait conseillé de s'abstenir de porter la kippa dans la rue

Suite à l'agression, le président du consistoire de Marseille avait conseillé de s'abstenir de porter la kippa dans la rue - THOMAS COEX, AFP/Archives

Un mineur radicalisé est jugé à partir de mercredi pour avoir tenté d'assassiner un enseignant juif en janvier 2016 à Marseille.

L'attaque à la machette avait suscité l'inquiétude, mais aussi une polémique après un appel à ne pas porter la kippa dans la rue: un lycéen radicalisé est jugé mercredi et jeudi à Paris pour avoir tenté d'assassiner un enseignant juif en janvier 2016 à Marseille.

Le procès, à huis clos, qui va s'ouvrir est inédit à plus d'un titre. C'est la première attaque à caractère djihadiste commise ces dernières années sur le sol français à être jugée et la première fois qu'un tribunal pour enfants juge en matière criminelle terroriste, selon l'avocat de la victime.

Agé de 15 ans au moment des faits, l'adolescent, un Turc d'origine kurde, avait dit avoir agi "au nom d'Allah" et vouloir " 'planter' les juifs et les policiers", qualifiés de "mécréants".

L'enseignant juif victime de l'agression à la machette Benjamin Amsellem (C) et son avocat Fabrice Labi (D) le 14 janvier 2016 à Marseille
L'enseignant juif victime de l'agression à la machette Benjamin Amsellem (C) et son avocat Fabrice Labi (D) le 14 janvier 2016 à Marseille © BORIS HORVAT, AFP/Archives

Une peine de 20 ans maximum

Il s'était aussi réclamé de Daesh, tout en assurant en garde à vue avoir agi seul. Le groupe djihadiste lance des appels à ses partisans pour des passages à l'acte isolés dans des pays qu'il considère ennemis, comme la France.

Il doit comparaître devant le tribunal pour enfants, statuant en matière criminelle, pour tentative d'assassinat, aggravée en raison de l'appartenance de la victime à une religion déterminée et en relation avec une entreprise terroriste. Agé de moins de 16 ans, à une semaine près, lors des faits, il bénéficie automatiquement de l'excuse de minorité, et la peine maximale encourue - la perpétuité dans le cas d'un adulte -, est réduite à 20 ans de prison.

Appels à ne pas porter la kippa

Survenue quelques mois après deux autres attaques antisémites dans la ville, l'agression avait ravivé les inquiétudes des juifs de France et de Marseille.

Le président du consistoire local avait conseillé de s'abstenir de porter la kippa dans la rue, par sécurité. Son appel avait été immédiatement critiqué par le grand rabbin de France et le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif).

Benjamin Amsellem, professeur dans une école confessionnelle, avait été agressé en pleine rue le 11 janvier 2016. Il avait réussi à se défendre en parant les coups avec la Torah qu'il tenait à la main, et n'a souffert que de blessures légères.

Interpellé quelques minutes après l'agression

Il avait eu le sentiment que son agresseur voulait le "décapiter", avait dit son avocat, Me Fabrice Labi. L'enseignant est toujours en arrêt de travail et souffre d'une "dépression sévère", selon l'avocat. Il "ne présente pas d'animosité" à l'égard de son agresseur mais veut "comprendre pourquoi il a fait ça".

L'adolescent, en classe de seconde, avait été interpellé quelques minutes après l'agression. Dans sa fuite, il avait abandonné sa machette et son sac de classe. A la ceinture, il cachait une deuxième lame: un couteau qu'il comptait utiliser pour tuer les policiers qui allaient finalement l'interpeller.

Le profil de cet adolescent aux bons résultats scolaires, délégué de classe, avait interpellé les enquêteurs.

Bernard Cazeneuve, alors ministre de l'Intérieur, rencontre le président du consistoire israélite de Marseille Zvi Ammar, le 14 janvier 2016 à Marseille
Bernard Cazeneuve, alors ministre de l'Intérieur, rencontre le président du consistoire israélite de Marseille Zvi Ammar, le 14 janvier 2016 à Marseille © ANNE-CHRISTINE POUJOULAT, AFP/Archives

Une radicalisation dissimulée

Arrivé en France à 11 ans pour rejoindre son père réfugié, Yusuf n'a laissé deviner quasiment aucun signe de sa radicalisation à ses amis, parents ou professeurs.

Il administrait un compte Twitter relayant des appels au jihad, avait dans son téléphone des photos de jihadistes et d'armes, mais n'était pas dans le radar des services de renseignements. Il a acheté la machette quelques jours avant de passer à l'acte, dans un magasin de bricolage.

Après plusieurs mois de détention, l'adolescent, dont l'avocat n'a pu être joint, a semblé commencer à se distancier "du système de pensée totalitaire" dans lequel il se trouvait, selon un expert psychiatre.

G.D. avec AFP