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Société

Un footballeur privé de club pour avoir fait son coming out

Yoann Lemaire, joueur du club de football ardennais de Chooz (DHR) depuis 14 ans, s'est vu refuser sa licence 2010-2011 en raison de son homosexualité.

Yoann Lemaire, joueur du club de football ardennais de Chooz (DHR) depuis 14 ans, s'est vu refuser sa licence 2010-2011 en raison de son homosexualité. - -

Yoann Lemaire, joueur du club de football ardennais de Chooz depuis 14 ans, s'est vu refuser sa licence 2010-2011 en raison de son homosexualité et malgré une conciliation qui avait abouti à la décision de son maintien dans l'effectif.

Yoann Lemaire pensait qu'il n'y avait pas de problème à jouer au football en étant homosexuel. Depuis 14 ans, il faisait partie de son club amateur dans les Ardennes : le FC Chooz. En 2005, il décidait de faire son « coming out ».

Mais il y a quatre ans, un joueur l'insulte devant les caméras de France 3 lors d’un reportage. Les images tournent en boucle. C’est une mauvaise pub pour le FC Chooz. Plusieurs associations s'en mêlent. L'affaire se règle devant une commission interne. Le footballeur à l'origine des insultes s'excuse. On passe l'éponge. Il n’y a pas de sanction.

Yoann ne joue pas pendant plusieurs mois, jusqu'à cette rentrée 2010 où il décide de revenir. Sa décision entraîne une avalanche d'insultes et de menaces de mort sur son mur Facebook. Le club prend peur et préfère ne pas renouveler sa licence. Ecœuré, Yoann Lemaire quitte son club. Il est soutenu par le Paris Foot Gay. Il n’a pas encore décidé de porter l’affaire devant la justice, mais plusieurs associations de défenses des homosexuels y pensent.

« Personne ne veut se rendre compte qu’il y a des homos dans le sport »

Yoann Lemaire réagit à cette décision sur RMC. Sa réintégration lui semble désormais impossible : « C’est cuit. La FFF m’a expliqué qu’ils ne pouvaient rien faire. Je leur ai posé la question : si c’était du racisme, auraient-ils fait la même chose pour un Noir par exemple ? Là on m’explique que non parce qu’il y a des textes dans les statuts de la FFF. Pour l’homophobie, c’est différent. Personne ne veut se rendre compte qu’il y a des homos dans le sport. D’ailleurs on n’en connaît pas de sportifs homos. Il faut dire qu’on est des mecs comme tout le monde, qu’on peut jouer au foot. Il y a des gays dans le football, c’est évident ! Pourquoi sont-ils obligés de se cacher ? Il y a un problème quelque part. »

« Pour nous protéger et le protéger »

Frédéric Coquet, président du FC Chooz, explique les raisons qui ont poussé le club amateur à écarter le libero de 28 ans : « Il refait la demande par lettre recommandée et ressurgit un autre problème sur Facebook avec des insultes et des menaces de mort. Comment voulez-vous que le comité le reprenne ? C’est impossible ! Si à chaque fois il y a quelqu’un de l’extérieur, ou quelqu’un de l’environnement du club, ou un spectateur l’insulte ou lui dit quelque chose d’homophobe, on ne va s’en sortir. Tout le monde a décidé pour nous protéger, et le protéger aussi des autres personnes. »

« Ce club va avoir des problèmes »

Pascal Brethe, président du Paris Foot Gay, explique les possibilités qui s’offrent pour aider Yoann Lemaire : « Nous sommes en contact avec le ministère qui est en train d’étudier le dossier très sérieusement. Nous allons saisir le conseil national de l’éthique afin qu’ils prennent des mesures disciplinaires à l’encontre du FC Chooz. Nous allons également demander au Conseil fédéral qui représente la Ligue de football amateur de saisir également le conseil de l’éthique. Si nous le pouvons, nous saisirons La Halde. Les choses ne vont pas rester en l’état. Nous ne lâcherons pas l’affaire. Il est évident que ce club va avoir des problèmes, et c’est très dommage. Mais ils l’ont voulu. »

Rama Yade, secrétaire d’Etat au Sport, a déclaré au Parisien « attendre les résultats de l’enquête », ajoutant « mais s’il s’agit bien d’homophobie, comme cela semble être le cas, je condamne cette décision ». Celle-ci a par ailleurs lancé un programme de lutte contre l’homophobie dans le sport. Six clubs de Ligue 1 sur vingt, dont le PSG, l’ont signé pour l’instant ; tandis que le FC Chooz est l'un des premiers clubs amateurs à avoir signé la charte contre l'homophobie.

La Rédaction d'RMC et Sophie Delpont