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Un cortège parisien clairsemé mais pas résigné

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par Laure Bretton PARIS (Reuters) - Les manifestants parisiens contre la réforme des retraites ont fait jeudi contre mauvaise fortune bon coeur,...

par Laure Bretton

PARIS (Reuters) - Les manifestants parisiens contre la réforme des retraites ont fait jeudi contre mauvaise fortune bon coeur, reconnaissant la perte de vitesse du mouvement tout en se félicitant d'avoir remporté la "bataille de l'opinion".

Dans la capitale comme dans le reste de la France, même s'ils étaient importants, les bataillons de retraités et de syndicalistes n'ont pas permis de compenser la moindre mobilisation des enseignants et des jeunes, vacances de Toussaint obligent.

Au lendemain du vote définitif de la loi par le Parlement, le défilé parisien a rassemblé 31.000 personnes selon la préfecture de police et 170.000 selon la CGT, qui en avait dénombré 330.000 le 19 octobre.

"Les chiffres, ça ne veut rien dire", tranche Josette, retraitée de l'administration, qui en est à sa septième manifestation en deux mois.

"On est là pour garder le feu sous la casserole", explique son amie Françoise, ancienne fonctionnaire elle aussi venue manifester "pour ceux qui ne peuvent pas se le permettre" pour des raisons financières.

Place de la République, derrière les camionnettes Force ouvrière où le badge "Retrait" de la réforme se monnaie 1,5 euro, Christian compare la manifestation du jour à un iceberg.

"Peut-être que peu de gens battent le pavé mais la majorité immergée est contre cette réforme", assure ce délégué syndical dans la métallurgie.

Pour lui, "il y a une chance, même si elle est infime, que la loi soit retirée", comme le contrat première embauche (CPE) en 2006.

RENDEZ-VOUS EN 2012?

A l'instar des dirigeants syndicaux nationaux, nombre de manifestants réfutent toute défaite, citant le sondage CSA paru jeudi dans Le Parisien selon lequel 65% des Français soutiennent toujours le mouvement, contre 71% le 19 octobre.

"Les 6% qui manquent, c'est les gens en vacances", relativise Alain, chauffeur de car sur le point de partir à la retraite à "60 ans pile".

"La colère, elle est toujours bien là même si ce soir, le gouvernement va encore faire le cake" dans l'interprétation de la mobilisation, ajoute ce père de famille qui refuse d'entendre parler d'essoufflement ou de résignation. "On se bat pour nos enfants!"

"On est dans une logique de manifestation par procuration", analyse Jacques Voisin, leader de la CFTC, qui entend "corriger la loi" progressivement lorsque les premières mesures commenceront à s'appliquer dans les entreprises.

Avoir 65% de Français derrière le mouvement, "c'est ce chiffre qu'il faut retenir", plaide aussi Marie-José, professeur d'économie à Paris.

"La bataille de l'opinion, elle est gagnée", se félicite la jeune femme, dont le sourire ne parvient pas à cacher un certain fatalisme. Une fois la loi votée, "ça devient plus compliqué", concède l'enseignante en haussant les épaules.

Sur les trottoirs, même si on se promet de répondre présent à la prochaine - et dernière ? - journée de mobilisation, samedi 6 novembre, le débat s'engage sur les suites à donner au front de refus qui s'est construit au fil de l'automne.

"On a été porteurs d'une quête de justice qui dépasse largement la question des retraites", explique Alain Olive, secrétaire général de l'Unsa, enterrant symboliquement la bataille en parlant au passé composé.

"Les syndicats doivent trouver un débouché à cette colère: dans les mois qui viennent, il faut être beaucoup plus exigeant avec le gouvernement et mettre le Medef sous pression", prône le leader syndical.

Mais c'est sur la prochaine élection présidentielle que la plupart des regards sont braqués.

"Si les gens n'ont pas perdu la mémoire, le vrai rendez-vous c'est 2012", estime Alain, qui rêve d'une défaite de Nicolas Sarkozy.

Au moment de mettre son bulletin dans l'urne dans 18 mois, "tout le monde se souviendra de ces mesures", prédit Marie-José.

Edité par Patrick Vignal