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Société

TVA à 5,5% : « Une mesure très coûteuse et inefficace »

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Le débat sur la baisse de la TVA dans la restauration monte d'un cran. Le FMI dénonce « une nouvelle distorsion » dans un système fiscal déjà confus. Analyse d'Eric Izraelewicz, directeur de la rédaction de La Tribune.

Ce mercredi 1er juillet, la TVA dans la restauration passe de 19,6 % à 5,5 % (à l'exception de l'alcool). En contrepartie, les syndicats de restaurateurs se sont engagés à baisser leurs prix de 11,8 % sur les 7 produits les plus vendus (entrée, plat, dessert, plat du jour, menu, eau minérale, café), ainsi qu'à augmenter les salaires de leurs employés, à embaucher et à moderniser leurs établissements. Des promesses qui, dans les faits, risquent de ne pas être tenues par beaucoup. Eric Izraelewicz, directeur de la rédaction de La Tribune, revient sur cette mesure de la TVA réduite, qui fait de plus en plus débat :

Une mesure très coûteuse et inefficace, selon le FMI

« Le débat continue à monter : hier, le Font monétaire international (FMI) a publié son rapport annuel traditionnel sur la France et l'une de ses préconisations est une remise en cause de cette mesure [ndlr, la baisse de la TVA dans la restauration]. Le FMI demande à ce qu'elle ne soit pas pérenne mais temporaire. Autrement dit, que dès que possible, l'Etat français y renonce et revienne à une TVA à 19,6%. Parce que le FMI considère que cette baisse de la TVA est une nouvelle distorsion dans notre système fiscal déjà très confus. Ce n'est pas vraiment une dépense d'avenir. Et surtout, c'est une mesure très coûteuse - 2,3 milliards d'euros - et très inefficace aussi, d'après le FMI.

Les indépendants seront prudents

Certes, les professionnels ont pris des engagements sur les prix. On peut donc être assez sûr que dans les jours qui viennent, les grandes enseignes vont baisser un peu quelques prix. Mais les indépendants, qui sont quand même les plus nombreux, seront certainement plus prudents. Avec la crise, le recul assez marqué de la fréquentation et la multiplication des défaillances dans ce secteur, il est sûr que les prix ne vont pas beaucoup baisser et que les restaurateurs reviendront rapidement sur les prix qu'ils auront baissés. Idem pour les recrutements : les professionnels ont promis d'embaucher 40 000 personnes. Ce dont on n'est pas sûr non plus.

Aucun mécanisme de contrôle ?

Le plus scandaleux de toute cette affaire, c'est qu'on a accordé une aide assez massive à une profession, qui prend des engagements ; mais il n'y a absolument aucun mécanisme de contrôle du respect de ces engagements. Ni sur les prix, ni sur les embauches, ni sur la modernisation des restaurants. Ce qui était d'ailleurs déjà le cas avec les exonérations de charges, dont les restaurateurs avaient bénéficié.
Ndlr : les services de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) sont toutefois chargés de faire respecter leurs engagements aux restaurateurs. Mais le « contrat d'avenir » que ces derniers ont signé le 28 mars lors des états généraux de la restauration ne prend pas en compte la qualité des plats servis. Certains restaurateurs peu scrupuleux pourront donc choisir les produits les moins chers pour "amortir" la baisse des prix...

La boîte de Pandore ouverte par Sarkozy...

« Une décision comme cette TVA réduite dans la restauration, c'est ce genre de décision qui permet de s'inquiéter de la boîte de Pandore ouverte par Nicolas Sarkozy, conclut Eric Izraelevitch. Avec son grand emprunt, on va trouver dans les semaines qui viennent, plein d'idées comme celle-là. Des propositions coûteuses et inefficaces, qui n'ont rien à voir avec la préparation de l'après-crise, mais plutôt peut-être avec les prochaines élections... »

La rédaction avec Eric Izraelevitch-Bourdin & Co