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Société

Touraine veut relancer le dossier médical "partagé"

Marisol Touraine, à l'Assemblée lors des questions au gouvernement, le 15 octobre 2014.

Marisol Touraine, à l'Assemblée lors des questions au gouvernement, le 15 octobre 2014. - Martin Bureau - AFP

Enterré le dossier médical personnel, place au dossier médical partagé. Marisol Touraine espère relancer cette idée d'une centralisation informatique des données d'un patient.

Marisol Touraine est décidée à relancer le dossier médical personnalisé, ce carnet de santé numérique coûteux au succès mitigé. Confié lors de son lancement à l'Agence des systèmes d'information partagées de santé (Asip), le DMP doit passer dans le giron de l'Assurance maladie, "mieux à même d'en assurer le déploiement", selon le projet de loi sur la Santé.

Le DMP2 "matériellement plus simple"

"Recentré", "mieux identifié" et rebaptisé, le "dossier médical partagé" va être relancé, concentré sur les malades qui ont des maladies chroniques", a annoncé la ministre de la Santé. "Il sera matériellement plus simple, conçu à partir des demandes des professionnels de santé" pour favoriser leur "coordination et leur coopération", a-t-elle dit.

Un demi-milliard d'euros dépensés en vain?

L'enjeu est de taille. Le DMP d'origine reste boudé par les praticiens et méconnu des patients: à la mi-octobre, environ 495.000 dossiers seulement avaient été ouverts depuis 2011, soit la moitié de l'objectif que s'était fixé l'Asip pour... 2013.

Ces résultats ont été d'autant plus critiqués que la mise en œuvre du DMP aurait déjà coûté près d'un demi-milliard d'euros depuis 2004, selon des rapports de la Cour des Comptes et du Conseil national de la qualité et de la coordination des soins.

Un outil indispensable pour coordonner les parcours de santé

Sur le papier, le DMP avait tout pour plaire. Regroupant les données médicales de chaque patient (synthèse du médecin traitant, résultats d'analyses, radios, etc.) dans un dossier électronique, il devait permettre d'éviter les examens redondants ou les interactions médicamenteuses, en favorisant les échanges entre professionnels.

Avec à la clé, un meilleur parcours de soins pour le patient et de substantielles économies pour l'Assurance maladie. Des "milliards d'euros", prévoyait même en 2004 Philippe Douste-Blazy, alors ministre de la Santé et instigateur du projet.

Pas compatible avec les logiciels des médecins et hospitaliers

Dix ans plus tard, aucun médecin ne remet en question la pertinence du dispositif, correspondant "à un réel besoin", selon Luc Duquesnel, président de l'Union nationale des omnipraticiens français, branche généraliste de la Confédération des syndicats médicaux français.

Mais "il y a eu une erreur de conception au départ", dit Claude Leicher, président de MG France. Outre le "manque d'ergonomie" du dossier, pas toujours compatible avec les logiciels des médecins ou des établissements hospitaliers, les deux syndicats dénoncent son côté "fourre-tout", non hiérarchisé.

Le patient et les professionnels de santé peuvent y accumuler tous les documents qu'ils souhaitent, constituant une masse d'archives illisibles lors d'un passage aux urgences, par exemple. "Imaginez une armoire avec 500 chemises dedans", dit Luc Duquesnel.

Preuve que ces revendications ont été entendues, le projet de loi assure que "l'enjeu du DMP 2 est de définir le socle d'informations" qui doit y figurer. Aujourd'hui les DMP sont plutôt vides, avec environ cinq documents en moyenne, selon l'Asip. Seuls 6.000 professionnels de santé l'utiliseraient. "Pourquoi les médecins alimenteraient un DMP si on sait qu'il n'y a rien dedans?", demande Luc Duquesnel. 

David Namias avec AFP