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#SoyezAuRDV contre les violences sexuelles: Macron interpellé par 700.000 personnes

De gauche à droite: Fatima Ezzahra-Benomar, Clémentine Vagne, Caroline De Haas, Madeline da Silva et Laure Salmona

De gauche à droite: Fatima Ezzahra-Benomar, Clémentine Vagne, Caroline De Haas, Madeline da Silva et Laure Salmona - Change

Cinq militantes féministes, qui ont recueilli 700.000 soutiens en ligne, demandent à Emmanuel Macron un plan d'urgence contre les violences sexuelles. Le président de la République doit s'exprimer ce samedi à l'occasion de la Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes.

"700.000 personnes demandent à Emmanuel Macron des mesures contre les violences sexuelles". Alors que se tient ce samedi la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes et qu'Emmanuel Macron doit prononcer un discours à cette occasion, les attentes sont fortes. Cinq féministes à l'initiative de cinq pétitions contre les violences sexuelles, dont Caroline De Haas, interpellent le chef de l'État afin qu'il "décrète un plan d'urgence".

"Stop aux blablas"

Elles demandent au président de la République d'être au rendez-vous de la lutte contre les violences sexuelles et plus largement de l'égalité entre les femmes et les hommes, décrétée grande cause nationale du quinquennat. "Il ne peut pas manquez le 25 novembre, stop aux blablas, on attend des annonces concrètes", réclame Madeline da Silva interrogée par BFMTV.com, et à l'origine d'une des pétitions. Également maire-adjointe des Lilas, en Seine-Saint-Denis, elle dénonce un "bricolage" de la part du gouvernement qui ne serait pas à la hauteur des enjeux.

À elles cinq, Fatima Ezzahra-Benomar, Clémentine Vagne, Caroline De Haas, Madeline da Silva et Laure Salmona ont recueilli quelque 700.000 signatures sur la plate-forme de pétitions en ligne Change.org. Parmi leurs revendications: former les policiers et gendarmes contre le harcèlement de rue, fixer l'âge légal minimum de 15 ans en dessous duquel un enfant ne peut être considéré comme consentant lors d'une relation sexuelle avec un majeur, mais aussi annuler la rétrospective consacrée à Roman Polanski -accusé d'agression sexuelle et de viol- à la Cinémathèque française.

Afin de faire entendre leurs voix, un happening se déroulera ce vendredi à 11 heures et 18h30 place de la République, à Paris. Une campagne sur les réseaux sociaux, avec le hashtag #SoyezAuRDV, doit également être lancée afin d'interpeller le locataire de l'Élysée. "On nous parle de grande cause nationale, mais sans ministère dédié, sans grande campagne de communication et avec le plus petit budget de l'État, ça n'a aucun sens", s'indigne pour BFMTV.com Fatima Ezzahra-Benomar, également porte-parole de l'association Les Effronté-e-s.

"Après la libération de la parole des femmes, on attend la libération des oreilles des autres, proteste-t-elle. Alors que nous étions reçues une fois par mois lors du précédent quinquennat, là, nous sommes totalement ignorées. Il n'y a pas de moyens et aucune annonce concrète, c'est extrêmement révélateur de la place subalterne que l'on accorde aux femmes dans la société."

Budget de 30 millions: "C'est un euro par femme"

Caroline De Haas va même plus loin et dénonce pour BFMTV.com les "fake news" du gouvernement sur les droits des femmes. "Cet été, quoi qu'en dise Marlène Schiappa, le budget 2017 a été amputé de 27%. Quant aux 30 millions d'euros, cela ne représente qu'un euro par femme." Trop peu, estime cette militante et co-fondatrice du site Les expertes.

Marlène Schiappa, la secrétaire d'État chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes, a fermement démenti au mois de juillet dernier toute coupe budgétaire. Et assuré que son budget allait augmenter en 2018 pour être "sanctuarisé" durant le quinquennat à hauteur de 30 millions d'euros. Mais selon Caroline De Haas, le budget consacré à l'Égalité entre les femmes et les hommes a bien été revu à la baisse.

"L'Espagne a débloqué cet été un milliard d'euros pour la lutte contre les violences sexistes alors que c'est un pays moins peuplé que la France et en crise. Si l'Espagne peut le faire, alors nous aussi on peut", insiste la militante, qui rappelle qu'une femme sur deux a déjà été victime de violences sexuelles.

"Une réponse politique à la hauteur des besoins"

Parmi les mesures concrètes que ces militantes attendent de la part d'Emmanuel Macron: un ministère de plein exercice avec un budget sensiblement revu à la hausse; un programme contre le sexisme à l'école avec un brevet de la non violence obligatoire; une campagne nationale de prévention sur le modèle de la sécurité routière ainsi que la formation de toutes les personnes en contact avec les femmes victimes, comme les enseignants, magistrats, policiers, gendarmes ou encore professionnels de santé.

"On a chaque jour des témoignages de femmes qui ont été mal reçues en commissariat ou en gendarmerie ou qui ont été mal traitées par la justice, pointe Caroline De Haas. Une jeune fille de 16 ans qui vient porter plainte pour un viol, les gendarmes lui font mimer la scène. Aujourd'hui, le problème principal n'est pas tant que les femmes n'aillent pas porter plainte. Le problème principal c'est que quand elles portent plainte, ce n'est pas pris en compte sérieusement. Arrêtez Monsieur le président de nous dire d'aller porter plainte, dites à la police et à la justice de faire leur travail et donnez leur les moyens de le faire correctement."

Là aussi, les militantes dénoncent un effet de communication du gouvernement non suivi dans les faits. La Mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains (Miprof) a assuré avoir formé 400.000 professionnels en trois ans. Ce que Caroline De Haas juge impossible.

"À raison de 15 personnes par groupe, cela signifie que depuis trois ans, tous les jours ouvrables, il y a en même temps 62 formations qui se tiennent. 62 séances chaque jour. En même temps. Animées par une équipe de... 4 personnes au total. Ce n'est pas vrai."

Le Haut Conseil à l'égalité (HCE) partage les mêmes inquiétudes. "Nous assistons à un tournant dans la prise de conscience de l'ampleur des violences sexistes et sexuelles qui doit maintenant se traduire par une réponse politique à la hauteur des besoins", a mis en garde dans un communiqué Danielle Bousquet, sa présidente. 

"La hausse de 30% des plaintes déposées en gendarmerie en octobre est un signal positif: ce mouvement doit être accompagné et amplifié", estime le HCE, qui appelle à "une mobilisation politique inédite". Réponse samedi lorsque Emmanuel Macron lancera la grande cause du quinquennat.

Céline Hussonnois-Alaya