Qui sont les salafistes français ?

"Ils sont entre 5.000 et 20.000 en France" assure Mohamed Adraoui, politologue et sociologue. Interview.

250 personnes ont été interpellées samedi devant l’ambassade des Etats-Unis, près de l’Elysée, pour dénoncer le film islamophobe Innocence of muslims. La police a arrêté 150 participants, dont des salafistes. Mohamed Adraoui, politologue et sociologue, spécialiste de l’islam, revient sur ce courant musulman et sa place en France.

Qu’est-ce que le salafisme ?

"Le salafisme est une sorte de fondamentalisme musulman, dans la mesure où il s’agit de revenir à la source de la religion. Les salafistes veulent en fait ressusciter un mode de croyance, de pratique et un modèle de société, censés prévaloir les origines l'islam."

Quelle forme est la plus représentée en France ?

"Parmi ceux qui se revendiquent de cet héritage, on remarque trois courants : le salafisme révolutionnaire qui fait usage de la violence, le salafisme politique qui a généré des partis politiques comme Ennahda en Tunisie, et enfin le salafisme piétiste qui prône une pratique rigoriste de l'islam à travers la prédication et qui est majoritaire en France. Pour ces derniers, pas question de faire de la politique : ils ne votent pas et condamnent la plupart des manifestations."

Comment expliquer alors que la manifestation de samedi a été attribuée à des salafistes ?

"L’écrasante majorité des salafistes condamnent cette manifestation. J’irais même plus loin, sur un plan religieux, ce qui s’est passé relève d’une hérésie. On peut trouver des salafistes qui participent à ce genre de manifestations mais la majorité des participants de samedi ne sont pas des salafistes."

Selon le ministère de l’Intérieur, ils sont entre 12.000 et 15.000 en France, ces chiffres collent-ils à la réalité ?

"Au début des années 2000, quand les Renseignements généraux existaient encore, ils faisaient état de 5.000 salafistes en France. C’est très difficile de dire combien ils sont, dans la mesure où beaucoup quittent la France. Aujourd’hui, on sait qu’ils sont entre 10 et 20.000."

Marine Le Pen s’est dit inquiète des investissements du Qatar dans des grands groupes français – est-ce que, c’est faire un amalgame, que de lier la présence qatari à la montée de l’islam radical en France ?

"Elle fait allusion au projet du Qatar d'investir dans les banlieues, c’est un effet d’annonce. Pour elle, comme pour d'autres,le salafisme est un mot qui est en train de s’imposer comme synonyme d’un islam radical...alors que c’est infiniment plus compliqué."