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EN DIRECT - Pédocriminalité dans l'Église: l'épiscopat exprime "sa honte et son effroi" et demande "pardon"

La Commission indépendante sur les abus sexuels dans l'Eglise (Ciase) catholique a reçu au total 6.500 appels de victimes présumées ou témoins

La Commission indépendante sur les abus sexuels dans l'Eglise (Ciase) catholique a reçu au total 6.500 appels de victimes présumées ou témoins - SAFIN HAMED © 2019 AFP

La Commission Sauvé publie ses conclusions accablantes ce mardi matin. Une donnée a déjà été révélée: le nombre de prédateurs a été évalué à "2900 à 3200", prêtres ou religieux, une "estimation minimale".

"Nous passons le témoin aujourd'hui à l'Église", conclut Jean-Marc Sauvé

"La mission de la commission prend fin, et il n'y aura pas de comité de suivi", a déclaré Jean-Marc Sauvé à la fin de la conférence de presse. "Nous passons le témoin aujourd'hui à l'Église et j'ai exprimé notre attente et notre espoir" à son égard, déclare-t-il.

Il exprime "sa gratitude aux personnes victimes sans lesquelles rien n'aurait pu se faire".

La suite se passera sous l'égide de la Commission sur les violences sexuelles et l’inceste (CIVIS), "je suis tout à fait certain qu'elle mènera un travail qui pourra compléter le nôtre".

La commission recommande une "réparation" financière pour les victimes

Jean-Marc Sauvé a appelé mardi l'institution à apporter une "réparation" financière à toutes les victimes de violences sexuelles en son sein depuis 1950 en France.

"Il faut indemniser les préjudices subis par les victimes en dehors même de toute faute identifiée, caractérisée de l'Église", a-t-il déclaré, en souhaitant que cette indemnisation ne soit pas considérée comme "un don" mais "un dû" de l'Église.

L'Église doit "réparer tout ce qui doit l'être"

"Nous n'avons pas fini de devoir impérativement tout revisiter", a déclaré soeur Véronique Margron, de "faire justice et de réparer tout ce qui doit l'être".

"Cette confiance et cette espérance nous oblige, nous vous en sommes redevables", déclare-t-elle à l'intention de la commission.

La présidente du CORREF dit "un infini chagrin, une honte charnelle, une indignation absolue"

"Peut-on bien recevoir un désastre ?" a déclaré soeur Véronique Margron, présidente de la Conférence des religieux et religieuses de France (CORREF). "Que dire sinon avant tout éprouver un infini chagrin, une honte charnelle, une indignation absolue".

"Personne n'est préparé pour recevoir ce que nous recevons aujourd'hui, pour faire face à une telle tragédie, à un tel chagrin", a-t-elle déclaré.

"Le temps de la naïveté et de l’ambigüité est dépassé", déclare le président de la Conférence des évêques de France

"Le temps de la naïveté et de l’ambigüité est dépassé", a déclaré le président de la Conférence des évêques de France. Un "travail de purification nécessaire doit être poursuivi sans relâche".

Le rapport de la CIASE est reçu comme "une exigence de Dieu", déclare-t-il.

L'épiscopat exprime "sa honte et son effroi" et demande "pardon"

Monseigneur Éric de Moulins-Beaufort, président de la Conférence des évêques de France a parlé d'un "rapport rude et sévère", mais a aussi exprimé "sa honte et son effroi" après avoir reçu le rapport de la commission Sauvé. Il a demandé "pardon à chacun et à chacune" des victimes.

"Nous avons entendu leur nombre, leur voix nous bouleverse leur nombre nous accable, il dépasse ce que nous pouvions supposer" a-t-il dit. "Que tant de vies d'enfants et de jeunes aient pu être abimées (...) est proprement insupportable"

L’Église doit "rétablir ce qui a été abimé et reconstruire ce qui a été brisé"

"Il ne peut y avoir d’avenir commun sans un travail de vérité, de pardon et de réconciliation", a expliqué Jean-Marc Sauvé. "Nous avons contribué autant que possible au travail de vérité, c’est à l'Église de le poursuivre".

"Nous savons au sein de la commission que l'Église catholique est partie prenante de notre société, elle en est une composante essentielle, il est donc impératif de rétablir une alliance qui a été mise à mal", déclare-t-il.

Il lance "un message d’attente, d’espoir, aussi pour moi personnellement un message d’espérance. L’Église peut et doit faire tout ce qui est nécessaire pour rétablir ce qui a été abimé et reconstruire ce qui a été brisé".

Le secret de la confession ne doit pas "être opposé à l'obligation de dénoncer les atteintes graves"

Le secret de la confession "ne peut pas être opposé à l'obligation de dénoncer les atteintes graves sur des mineurs ou des personnes vulnérables, conformément au droit de la République", a lancé Jean-Marc Sauvé, soulignant que "le secret de la confession était un secret professionnel au regard du droit français".

Il en appelle à la "protection de la vie et de la dignité des personnes".

La commission appelle l'Église à "reconnaître sa responsabilité"

Jean-Marc Sauvé appelle l'Église catholique à "reconnaitre la responsabilité de l'Église dans ce qu'il s'est passé"

"Il y a eu des fautes civiles et pénales (...) il y a eu surtout un ensemble de négligences, de défaillances, le silence", souligne-t-il.

"L'Église n'a pas su voir, entendre, n'a pas su capter les signaux faibles, prendre les mesures rigoureuses qui s'imposaient, même dans le contexte des différentes époques, prendre les mesures nécessaires", a lancé le président de la commission.

Jusqu'au début des années 2000 "une indifférence, profonde, et même cruelle vis à vis des victimes"

Jean-Marc Sauvé souligne que "jusqu'au début des années 200 il y a une indifférence, profonde, et même cruelle vis à vis des victimes" de la part de l'Église catholique.

Les victimes "ne sont pas crues, ni entendues, et on considère quand elles sont entendues qu'elles ont peu ou prou contribué à ce qui leur est arrivé".

Il note que des indemnisations sont envisagées parfois mais "en échange du serment de ne jamais révéler ce qu'il s'est passé".

60% des victimes connaissent de "fortes perturbations dans leur vie affective ou sexuelle"

"60% des hommes et femmes ayant subi des violences sexuelles pendant leur enfance connaissent des perturbations qualifiées de fortes ou de très fortes dans leur vie affective ou sexuelle" dans leur vie ensuite, rappelle Jean-Marc Sauvé ce mardi.

Mais aussi sur leur vie familiale, professionnelle et sociale.

Pédocriminalité dans l'Église catholique: 216.000 victimes de clercs ou religieux depuis 1950

L'enquête menée en population générale "conduit à estimer dans la population française agée de plus de 18 ans à 216000 - plus ou moins 50.000 - le nombre de personnes sexuellement agressées pendant leur minorité par des clercs ou des religieux", a annoncé Jean-Marc Sauvé lors de la conférence de presse.

Les victimes ont vécu "la souffrance, l'isolement, et souvent la honte et la culpabilité"

Jean-Marc Sauvé a expliqué que le rapport avait "placé les victimes au centre et au coeur de notre démarche". "Sans leur parole notre société serait encore dans l'ignorance ou le déni de ce qu'il s'est passé".

"On ne peut connaître et comprendre le réel tel qu'il est si on n'est pas capable de se laisser toucher par ce que les victimes ont vécu: la souffrance, l'isolement, et souvent la honte et la culpabilité", a-t-il expliqué.

"Ces personnes étaient victimes, elles sont devenues témoins et en ce sens acteurs de la vérité", souligne Jean-Marc Sauvé.

"Vous devez payer pour tous ces crimes", lance François Devaux aux représentants de l'Église

"Vous devez payer pour tous ces crimes", a lancé François Devaux, président fondateur de l'association La Parole Libérée, à plusieurs reprises aux représentants de l'Église. Et "ce chiffre il se compte en plusieurs milliards"

Ce rapport est "une reconnaissance institutionnelle de toute la responsabilité de l’Église, ce dont les évêques et le Pape n’ont pas été capables d’assumer jusqu’à ce jour".

Selon lui "il faut refonder le système dans une proportion considérable" et "cela prend a minima la forme d’un Vatican III".

"C'est de l'enfer dont vous revenez", déclare une victime à la commission

Ce rapport est "un tournant dans notre histoire", a déclaré François Devaux, président fondateur de l'association La Parole Libérée, qui s'est qualifié de "premier témoin" dans ce rapport.

"Je le sais c'est de l'enfer dont vous revenez" a-t-il déclaré, s'adressant aux membres de la commission Sauvé qui ont interrogé de nombreuses victimes. "Vous avez exploré les détails les plus sombres et les plus abjects que l'homme sait parfois engendrer sur sa névrose".

"Vous êtes descendus si bas, si nauséabond, ce qui ressemble à s'y tromper à une fosse commune des âmes déchiquetées de l'Église".

BFMTV a recueilli les paroles de victimes, attendant avec impatience la sortie du rapport

"Je peux vous dire que j’y pense pratiquement chaque nuit. Je me refais le film, le film des conséquences, et les moments où je n’ai pas saisi les possibilités d’intervenir", confie Francis à BFMTV.

Lui n'avait que dix ans quand un religieux a brisé sa vie.

Notre article complet ICI.

La conférence de presse a commencé

La conférence de presse de la commission Sauvé a démarré ce mardi, aux alentours de 9 heures.

La lecture du rapport a lieu sur la chaîne KTO, et devrait durer environ deux heures.

"2900 à 3200" prédateurs dans l'Eglise

Une donnée a déjà été révélée par Jean-Marc Sauvé ce week-end, le nombre de prédateurs. Il a été évalué à "2900 à 3200", hommes - prêtres ou religieux - sur la période de 70 ans, une "estimation minimale".

Le rapport donnera aussi une estimation du nombre de victimes - mineures au moment des faits. Vertigineux... Il s'agit d'un "nombre à 6 chiffres", indique à l'AFP une source proche du dossier.

Un rapport de 2500 pages sur 70 ans

La Commission Sauvé, qui enquête sur l'ampleur de la pédocriminalité entre les années 1950 et aujourd'hui, publie ses conclusions, accablantes ce mardi matin, dans un rapport de 2500 pages.

Le résultat de deux ans et demi de travaux de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (Ciase) depuis 1950, présidée par Jean-Marc Sauvé, va être remis publiquement, à Paris, à l'épiscopat français et aux ordres et congrégations religieuses, en présence de représentants d'associations de victimes.