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Deux réunions pour "accompagner" les homosexuels font polémique dans le Sud-Ouest

Des participants à la Gay Pride de Belgrade transportent un drapeau arc-en-ciel, le 17 septembre 2017.

Des participants à la Gay Pride de Belgrade transportent un drapeau arc-en-ciel, le 17 septembre 2017. - Andrej Isakovic - AFP

Plusieurs associations et syndicats dénoncent deux réunions publiques à Bayonne et Pau, organisées par le diocèse, qui proposent un "accompagnement des personnes à tendance homosexuelle". L'association censée intervenir prône la chasteté pour les LGBT.

"Aider ceux qui sont attirés par les personnes du même sexe ainsi que leurs proches". Telle est la "mission" que s'attribue l'association catholique Courage, qui animera deux rencontres à Bayonne et Pau en mars sur "l'accompagnement des personnes à tendance homosexuelle".

Les deux réunions publiques, organisées par le diocèse local, ont fait bondir plusieurs associations, notamment de défense des droits LGBT. Arcolan Bascos dénonce ainsi le "rôle potentiellement dangereux pour le bien-être des personnes" de l'association Courage, qui "entretient la culpabilité qu'il prétend combattre".

Le communiqué, également signé par plusieurs structures de Planning familial, syndicats, sections locales de partis et plusieurs associations LGBT, rappelle notamment que Courage prône la chasteté pour les homosexuels.

Une association qui présente l'homosexualité comme un "problème"

Dans les cinq "objectifs" présentés par l'association, celle-ci encourage de fait à "vivre chastement en accord avec les enseignements de l'Eglise catholique sur l'homosexualité". Elle incite aussi à "encourager un esprit de camaraderie (...) de façon à ce que personne n'affronte seul le problème de l'homosexualité".

"Ce n'est plus de la foi, ce n'est plus de la spiritualité. Ce sont des pratiques potentiellement sectaires", a réagi sur Europe 1 Joël Deumier, président de SOS Homophobie.

L'association souligne par ailleurs dans un communiqué "l’irresponsabilité de la Conférence des évêques de France qui, en laissant libre l’organisation de ce type d’événement, contribue à entretenir dans le pays un niveau d’homophobie élevé."

"On s'aperçoit que c'est une association qui a pour but de 'soigner' les personnes homosexuelles par l’abstinence", a constaté David Torres, co-président de l'association Arcolan Bascos, au micro de France Bleu Béarn.

"On voit bien que beaucoup de prêtres, ce n'est pas un secret d'État, sont homosexuels et ont choisi de rentrer dans les ordres pour avoir de l'abstinence. (...) Sauf que nous, on n'a pas envie d'être prêtre, on n'a pas envie d'être abstinent. Il n'y a aucune raison qu'on le soit. Ce n'est pas ça l'Église", a-t-il affirmé.

Car il n'y a pas que la formulation de ces deux rencontres qui fait bondir les détracteurs. Sont aussi mis en cause la position et le discours qu'ont pu tenir l'association Courage par le passé, particulièrement de la part de l'organisation internationale dont elle émane.

"L'attirance vers le même sexe est un désordre développemental"

Sur le blog de la structure, on peut ainsi lire que "l'attirance vers le même sexe est un désordre développemental (trouble du développement, NDLR) qui est à la fois soignable et évitable". Ces propos sont ceux de Paul N. Check, tenus en 2008 alors que celui-ci était directeur de Courage International et traduits par la section française.

"Bien souvent, les personnes avec une SSA (attirance pour les personnes de même sexe, NDLR) éprouvent également des dépendances au sexe, à la drogue ou sont confrontées à l’abus d’alcool, à la dépression, l’anxiété ou d’autres maladies psychiques", poursuivait-il.

Dans les "profils" des personnes concernées, il affirmait également avoir constaté des "circonstances récurrentes": "famille éclatée ou troublée", une "aliénation du parent du même sexe" ou encore un "choc sexuel". Ces propos sont toujours assumés par l'association française, qui affiche le texte sur sa page d'accueil, et la structure internationale, qui l'a re-téléchargé en février 2018.

La mission interministérielle contre les luttes sectaires saisies

Courage craint toutefois que l'expression "désordre objectif", également employée, "soit d'une façon ou d'une autre méprisante ou (...) exprime une condamnation", une prise de position qu'elle nie. 

SOS Homophobie a demandé au diocèse local et à la Conférence des évêques de France d'annuler les deux réunions publiques et indique avoir saisi la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes).

Contacté par France Bleu Béarn, le diocèse concerné a déclaré n'avoir "aucun commentaire à faire" sur l'affaire. Louis-Marie Guitton, l'abbé censé intervenir lors de ces deux rencontres, a assuré à Europe 1 s'adresser "à ceux qui veulent suivre le Christ". "On ne force personne", a-t-il affirmé.

Liv Audigane