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Société

Pourquoi les crèches clandestines se multiplient

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Nouvelle affaire de crèche clandestine à Marseille. Les places d’accueil manquant pour les enfants de moins de 3 ans, de plus en plus de parents « sont poussés vers le système D », potentiellement dangereux, mettent en garde les associations de familles. Témoignages.

Pour la deuxième fois en moins d'un mois, une nouvelle affaire de crèche clandestine à Marseille : une femme d'une soixantaine d'années a été placée en garde à vue ce lundi. Elle accueillait sans agrément jusqu'à 14 enfants dans son appartement de 140 m² dans le centre-ville de Marseille. Remise en liberté, elle sera jugée prochainement. L'enquête vise des faits de « travail illégal par dissimulation d'activité, escroquerie à la caisse d'allocations familiales et fraude fiscale ».
Fin juin, la justice avait fermé une autre structure illégale à Marseille, où étaient gardés 15 à 25 enfants dans un appartement de 50 m². La responsable de cette crèche illégale sera jugée le mois prochain par le tribunal correctionnel de Marseille pour « travail dissimulé ».
Au cœur de ces affaires, il y a un problème pour de nombreuses familles, à Marseille et ailleurs: la pénurie des places d'accueil pour les enfants de moins de trois ans.

400 000 places d’accueil manquent

D'après l'Union Nationale des Associations Familiales (Unaf), il manque 400 000 places d'accueil pour les plus petits. Toute la France est concernée, mais les régions où il y a le plus de tensions sont la région parisienne, le pourtour méditerranéen et certaines zones rurales comme le Limousin.
Dans les deux affaires, il n'y avait pas de problèmes de maltraitance ou de mise en danger des enfants. Le problème était l'absence totale d'agrément des responsables des "crèches".

« On avait conscience que ça frôlait l’illégalité, mais… »

La fille de Sébastien a 2 ans et demi, impossible de lui trouver une place en crèche à Marseille : « Ça fait 2 ans qu’on est sur liste d’attente et on ne nous a toujours pas rappelés ». Il y a un an, Sébastien a mis sa fille dans une crèche clandestine. Une vingtaine d'enfants gardés dans un appartement : « On avait conscience que ça frôlait l’illégalité, que ça ne respectait certainement pas toutes les normes de sécurité, mais on ne s’est jamais dit qu’elle courait le moindre danger. C’était une structure qui existait depuis des années, comme d’autres dans cette ville ».
La justice a fermé cette crèche illégale le mois dernier et à la mairie de Marseille, l'élu UMP Yves Moraine affirme que la municipalité fait de son mieux pour les crèches : « Il faut toujours faire plus : plus de stades, plus de places en crèche, plus d’écoles… mais après il faut trouver les sous ! ».

« Le risque : que des gens exploitent la galère des parents »

Morgane Turc est adjointe au maire PS du 1er secteur de Marseille. Ces affaires de crèches clandestines ne l'étonnent pas du tout : « Ce phénomène est appelé à prendre de l’ampleur, parce que par exemple, dans le 1er arrondissement de la 2e ville de France, il y a une population de 42 000 personnes et seulement deux crèches municipales. Forcément, les parents sont poussés vers le système D, où ils ne peuvent plus être sûrs pour la sécurité de leur enfant. Ils nous disent : "mais comment je fais ? Je n’ai pas de place en crèche, il faut que je remplisse mon frigo le soir et j’ai mon enfant". Le risque demain, c’est de se retrouver avec des gens qui exploitent la galère des parents ».

« Des solutions dangereuses pour les enfants »

Rappelant qu’il « n’y a qu’une chance sur dix pour qu’un enfant accède à une place de crèche en France », Alain Feretti, chargé de la petite enfance à l’Unaf, ajoute : « De plus en plus, les familles sont obligées de faire appel à des solutions clandestines, à des solutions de bricolage, qui sont dangereuses pour les enfants. Et c’est dramatique parce qu’on ne peut pas sacrifier des générations d’enfants ! ».

La Rédaction, avec Yann Abback