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Société

«Pourquoi ils ne veulent pas nous nourrir à la cantine ?»

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A Saint-Gratien (Val-d'Oise), une trentaine d'enfants de 5 à 11 ans scolarisés en primaire sont interdits de cantine depuis un an. Motif: ils sont filles et fils de réfugiés. «C'est à l'État de s'en occuper», estime la mairie.

C'est sans doute une situation sans précédent en France. La maire UMP de Saint-Gratien, Jacqueline Eustache-Brinio, a décidé l'année dernière de ne plus accepter à la cantine une trentaine d'enfants pourtant scolarisés dans sa commune. Tous habitent dans un foyer abritant des réfugiés tchétchènes et kosovars, installés depuis plusieurs années en France. Selon la mairie (qui n'a pas souhaité s'exprimer plus longuement), leur présence sur le territoire étant de la responsabilité de l'Etat, il ne lui incombe par de pourvoir à tout autre devoir que celui de la stricte éducation. Pas de repas donc. Pas non plus d'accès au centre de loisirs de la commune, ni à l'assistante sociale de l'école ou aux heures d'étude du soir.

Une question de principe, pas d'argent

Aïcha, 10 ans, est l'une de ces élèves. « C'est pas normal », dit-elle. « Ce n'est pas parce qu'on vient d'un autre pays, nous aussi on est des humains on est vivants. Et pourquoi nous, ils ne veulent pas nous nourrir normalement à la cantine ? Il y a des enfants qui y ont droit, et pourquoi nous non ? Juste parce qu'on est nouveaux. C'est pas normal », témoigne-t-elle sur RMC. La décision de la mairie apparait d'autant plus marquée qu'il n'est nullement question d'un problème de finances. Les parents n'ont jamais refusé de payer. Récemment, l'une des enseignantes de l'école a envoyé un chèque de 137 euros à la mairie, en demandant l'inscription de l'un des enfants de sa classe de CE1. Réponse directe et sans appel de madame le maire: « Vous n'avez aucune qualité pour inscrire cet enfant à la cantine ». Quelques jours plus tard, le chèque de l'institutrice lui était renvoyé par courrier. Appuyées par le « collectif 35 » (le nombre exact d'enfants concernés), les familles ont décidé de se tourner vers la justice.

« Tous ces enfants ont droit à la cantine »

Selon Bruno Brisbarre, président de la FCPE du département, ce traitement est en effet illégal. « Un enfant n'a pas besoin d'avoir de papiers pour avoir des droits, c'est la convention de Genève de 1959. Tous ces enfants ont droit à la cantine. Il faut savoir que le Conseil d'Etat a déjà tranché ce genre de litiges. On ne comprend pas qu'une commune et un maire, dont c'est le premier magistrat, s'obstinent à ne pas respecter la loi », explique-t-il. Hier jeudi, le ministre de l'Education, Luc Chatel, a jugé « choquant qu'on laisse ces enfants qui sont scolarisés à la porte ». Mais a rajouté que ce n'était pas son « rôle de tancer le maire d'une commune, puisque c'est sa compétence ».