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Société

Paris prudent sur une fusion entre Air France-KLM et Alitalia

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par Emmanuel Jarry PARIS (Reuters) - Une éventuelle prise de contrôle d'Alitalia par Air France-KLM aurait "du sens" à condition de ne pas...

par Emmanuel Jarry

PARIS (Reuters) - Une éventuelle prise de contrôle d'Alitalia par Air France-KLM aurait "du sens" à condition de ne pas remettre en cause le redressement du groupe franco-néerlandais, a déclaré lundi à Reuters le ministre français des Transports.

AF-KLM, propriétaire de 25% du capital d'Alitalia, a fait savoir qu'il était prêt à venir à l'aide de la compagnie aérienne italienne, qui envisage une augmentation de capital, à des "conditions très strictes."

Une position confirmée à Reuters par Frédéric Cuvillier, qui se montre très prudent et préfère à ce stade laisser les deux compagnies discuter d'un éventuel accord sans leur forcer la main dans un sens ou dans un autre, bien que l'Etat français soit actionnaire de 15,9% d'Air France-KLM.

"Il appartient aux dirigeants d'Air France-KLM et d'Alitalia de voir s'il y a une chance d'aboutir", a déclaré le ministre.

"Les efforts faits par Air France-KLM ne peuvent être remis en cause pour une stratégie qui pourrait apparaître hasardeuse si elle n'était pas assez travaillée", a-t-il souligné.

Air France-KLM doit notamment examiner le dossier dans le contexte du plan de relance "Transform 2015" qui prévoit notamment la suppression de 5.122 postes au sein d'Air France, auxquels s'ajoutera un plan de 2.800 départs volontaires.

"Il faut que la proposition sur laquelle Air France-KLM serait amenée à travailler n'aille pas à l'encontre des objectifs de 'Transform 2015'", a dit Frédéric Cuvillier.

Alitalia réunit mardi un conseil d'administration et a prévu de se pencher le 14 octobre sur l'intérêt de lancer une augmentation de capital à laquelle AF-KLM, premier actionnaire du groupe, s'est opposée le 26 septembre.

Des experts et analystes interrogés par Reuters préviennent que la compagnie franco-néerlandaise devra rapidement faire un choix sur l'avenir de sa participation et que laisser Alitalia sombrer ou l'abandonner aux mains d'une autre "major" aurait des conséquences sur ses résultats et sa stratégie.

RÉSEAU ET DETTE

"AF-KLM ne peut pas se permettre de voir Alitalia lancer des liaisons internationales en compétition avec celles opérées à partir de Roissy-Charles-de-Gaulle ou d'Amsterdam-Schiphol", souligne Yan Derocles, analyste chez Oddo Securities.

Alitalia, active au Japon et en Amérique du Sud, deux zones où Air France et KLM se sont déjà déployées, entend poursuivre sa stratégie d'expansion internationale à partir de ses "hubs" (plateformes de correspondance) de Rome et de Milan.

Les pouvoirs publics italiens ne souhaitent pas qu'une éventuelle prise de contrôle de la compagnie par AF-KLM se traduise par un recentrage régional, synonyme de suppressions de postes, et par une diminution de l'activité de ces deux aéroports, eux-mêmes grands pourvoyeurs d'emplois.

"Il y aussi la dette d'Alitalia (estimée à près d'un milliard d'euros actuellement, NDLR) dont AF-KLM pourrait souhaiter qu'une partie, au moins celle qui n'est pas adossée à des actifs, soit reprise par l'Etat (italien)", ajoute Yan Derocles.

Pierre Boucheny, analyste chez Kepler Cheuvreux, estime qu'AF-KLM ne soutiendra Alitalia que si elle est assurée d'avoir le contrôle de sa stratégie. Il souligne toutefois que refuser de s'engager pourrait avoir des conséquences négatives.

"Alitalia est un partenaire important, si la compagnie sort de l'alliance Skyteam, la perte de revenus pour AF-KLM pourrait atteindre environ 100 millions d'euros par an", dit-il.

CRÉER UNE DYNAMIQUE

Frédéric Cuvillier, qui a récemment rencontré le PDG d'AF-KLM Alexandre de Juniac, a souligné que les discussions entre les deux entreprises prendraient du temps, ajoutant : "Je ne sais pas si Alitalia en a."

Le ministre, qui s'être entretenu du dossier la semaine dernière avec son homologue italien, a invité la direction d'Alitalia à engager un "travail courageux".

L'Etat actionnaire, a-t-il dit, ne prendra position que lorsqu'il sera en mesure d'examiner un plan d'ensemble.

Les dirigeants français et italiens se retrouveront le 20 novembre pour un sommet bilatéral à Rome.

Le ministre italien des Transports a démenti lundi soir une information selon laquelle Rome proposait à la compagnie publique de transport ferroviaire Ferrovie dello Stato de prendre une participation dans Alitalia. "Nous (le gouvernement italien, NDLR) explorons toutes les options pour un plan industriel qui sauvegarde un actif stratégique", a dit Maurizio Lupi.

Avec Matthias Blamont, édité par Dominique Rodriguez