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Précarité: le "115 du particulier", pour aider les SDF à sortir de la rue

Un sans-abri et son animal le 29 décembre 2014, à Lyon.

Un sans-abri et son animal le 29 décembre 2014, à Lyon. - Philippe Desmazes - AFP

Lancée il y a trois ans par deux anciens sans-abri, cette "initiative citoyenne" met en relation particuliers désireux d'aider et personnes à la rue. Entretien avec l'un des fondateurs, Brann du Senan.

Rémy a 18 ans. Il y a trois semaines, ses parents l'ont mis à la porte. "Je suis actuellement en formation à Orly, je ne veux pas la lâcher car je n'ai pas de diplôme. J'ai longtemps hésité avant de demander de l'aide, mais aujourd'hui ça commence à être dur physiquement et mentalement", écrit en substance le jeune homme. Un message parmi tant d'autres, reçu ce mardi sur le site du "115 du particulier".

Derrière ce nom se cache une association créée il y a trois ans, qui vient en aide de façon concrète aux sans-abri. "Il faisait très froid à cette époque, et on a constaté que les institutions étaient inefficaces et trop lentes, tandis que des gens mouraient chaque jour dans la rue. Sans vouloir supplanter ce qui existe, nous avons voulu créer une plateforme qui gomme les lourdeurs administratives", explique à BFMTV.com Brann du Senon, l'un des fondateurs.

"Ce sont des citoyens lambda"

Le principe est simple: chacun peut proposer ou demander de l'aide autour de lui sur Internet. Initialement sur Facebook, la plateforme existe désormais sous la forme d'un site, avec une véritable structure juridique. Ici, une femme propose des vêtements chauds et des couvertures dans le 77, là un couple propose le gîte et le couvert dans le 93. "Nous recevons chaque jour des propositions d'hébergement sérieuses, que nous sécurisons pour éviter tout abus."

Ainsi, l'hébergeur exprime un "souhait" (femme ou homme, avec ou sans animal, fumeur ou non, etc.), et lorsqu'une personne "en danger" correspond aux critères de l'annonce, ils sont mis en relation, et fixent ensemble les modalités et la durée du séjour. "Un tiers des sans-abri en Ile-de-France souffrent d'addictions. Mais les deux autres tiers sont des citoyens lambda comme vous et moi! Des travailleurs pauvres, des familles, des femmes seules, des jeunes. C'est à eux que nous nous adressons, car les particuliers ne sont ni habilités ni aguerris pour accueillir des personnes atteintes de troubles", précise Brann du Senon.

Un village les accueille dans les bois

Lui se scandalise de voir "l'Etat donner tant d'argent pour le placement hôtelier" (160 millions d'euros en 2014 à Paris par exemple, ndlr). "Un tel budget permettrait de financer les deux premiers mois de location de petits appartements, le temps que les personnes se remettent en selle et puissent se réinsérer de façon pérenne!" Brann du Senon s'indigne tout autant des discours de certains politiques et responsables d'associations. "Ce matin, Benoist Apparu, sur BFMTV, disait qu'il est très difficile de convaincre les sans-abri de quitter la rue pour aller en centre d'hébergement. C'est complètement aberrant d'exclure ainsi toute une frange de la population sans-abri qui ne demande qu'à s'en sortir, et qui est totalement oubliée des institutions..."

Désireuse d'offrir des solutions durables, l'association a par ailleurs créé en parallèle un village de sans-abri niché dans un bois près de Villebéon, en Seine-et-Marne. Une communauté autonome aux allures de camping où les habitants viennent puiser des forces le temps de se reconstruire, avant de céder leur place à d'autres. Depuis sa création en 2012, plus de 200 "locataires" sont venus occuper les roulottes installées dans ce village de bric et de broc, au pied de grands chênes.