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Société

Les temps changent, les naissances restent saisonnières

Un pic fin septembre, un creux en mars : malgré l'évolution de la société et les progrès de la science, la courbe des naissances en France reste marquée par des hauts et des bas saisonniers, comme c'est le cas depuis des siècles, mais pour des raisons qui

Un pic fin septembre, un creux en mars : malgré l'évolution de la société et les progrès de la science, la courbe des naissances en France reste marquée par des hauts et des bas saisonniers, comme c'est le cas depuis des siècles, mais pour des raisons qui - -

PARIS (Reuters) - Un pic fin septembre, un creux en mars : malgré l'évolution de la société et les progrès de la science, la courbe des naissances...

PARIS (Reuters) - Un pic fin septembre, un creux en mars : malgré l'évolution de la société et les progrès de la science, la courbe des naissances en France reste marquée par des hauts et des bas saisonniers, comme c'est le cas depuis des siècles, mais pour des raisons qui ont beaucoup changé.

Une étude de l'Institut national d'études démographiques (Ined) publiée mardi par "Population & sociétés", son bulletin mensuel, révèle notamment une explosion des conceptions dans la nuit du Nouvel an.

"Les conceptions donnant lieu à une naissance vivante sont presque deux fois plus nombreuses ce jour-là que tout autre jour de l'année", précise-t-elle.

Conséquence logique: un excédent de naissances un peu moins de neuf mois plus tard mais aussi un triplement du nombre d'interruptions volontaires de grossesses par rapport à un jour de conception "normal" dans un pays qui a enregistré 828.000 naissances en 2010 selon les chiffres publiés la semaine dernière par l'Insee, soit 2.269 par jour en moyenne.

Pour expliquer cet "effet Saint-Sylvestre", les chercheurs notent que les couples sont plus nombreux à être réunis pour le réveillon, qu'ils sont plus nombreux à avoir des rapports sexuels et que la vigilance contraceptive tend à baisser à cette occasion, un facteur amplifié, chez les femmes utilisant la pilule, par... la fréquence des vomissements.

FLUCTUATIONS

Si le 23 septembre marque donc désormais le pic de la courbe des naissances, il n'en a pas toujours été ainsi.

Au XVIIe siècle, rappelle l'étude, il naissait près de deux fois plus d'enfants en mars qu'en juin tandis que les accouchements diminuaient fortement en décembre.

A l'époque, l'Eglise proscrivait les relations sexuelles pendant le carême chrétien, en mars, et pendant l'avent, en décembre.

A ce facteur religieux s'ajoutaient les effets des migrations saisonnières au moment des grands travaux des champs, qui accaparaient voire séparaient les couples dans une France alors essentiellement agricole.

Ces fluctuations se sont atténuées progressivement au fil des siècles avec "la moindre observance des préceptes religieux et la diminution de la part des paysans dans la population active", explique l'étude.

Mais elles n'ont pas disparu pour autant puisqu'elles restaient encore marquées dans les années 1970-1980, les naissances augmentant entre avril et juillet, avec un pic fin avril et début mai, pour diminuer en automne et en hiver.

Une variation que les démographes expliquent par l'impact des vacances d'été, durant lesquelles les couples sont "plus disposés à concrétiser leurs désirs d'enfants, et également plus disponibles pour les ébats amoureux".

"La saisonnalité des naissances serait ainsi 'déterminée' par le rythme saisonnier de la vie économique du pays", conclut l'étude.

PROGRAMMATION

Gilles Pison, rédacteur en chef de Population et sociétés, signale toutefois un effet inattendu de la période estivale: la canicule de 2003 a provoqué un déficit de conceptions sensible pendant les jours de grosse chaleur.

L'étude met aussi en évidence un effet amplificateur de la "programmation" du mois de naissance, de nombreuses femmes choisissant d'accoucher au printemps, saison jugée plus agréable... et qui permet d'enchaîner congé de maternité et vacances d'été.

Dernière phase d'évolution récente: le déplacement progressif du pic des naissances de mai à septembre. En dehors de l'"effet réveillon", ce mouvement reste pour l'instant largement inexpliqué.

D'autant que, lorsqu'on interroge les femmes sur la période qu'elles jugent idéale pour accoucher, le printemps reste leur saison préférée et que septembre n'est cité que par 2% d'entre elles.

Un paradoxe qui, pour les auteurs, pourrait relever de l'ignorance par les couples du fait qu'"une grossesse ne s'obtient pas forcément dès le premier mois après l'arrêt de la contraception et qu'il leur faut souvent plusieurs mois pour concevoir".

Un examen à la loupe de la courbe des naissances confirme aussi que les naissances le samedi et le dimanche sont nettement moins nombreuses qu'en semaine, explique Gilles Pison. "De plus en plus d'accouchements sont programmés et les gynécologues-obstétriciens préfèrent les programmer en dehors du week-end".

Marc Angrand, édité par Yves Clarisse