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Société

Les personnes âgées de plus en plus victimes de sectes

« On a passé presqu’un an et demi d’enfer. Mon père était totalement sous emprise », raconte sur RMC la fille d’une personne victime d’une secte.

« On a passé presqu’un an et demi d’enfer. Mon père était totalement sous emprise », raconte sur RMC la fille d’une personne victime d’une secte. - -

Dans un récent rapport, l’organisme français de lutte contre les sectes s’inquiète : les personnes âgées en sont de plus en plus victimes. Sur RMC, une famille témoigne : « Elle mettait mon père en danger ».

Qui de plus facile à berner qu’une personne seule et désemparée ? Selon la Miviludes (Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires) dans un rapport remis jeudi au Premier ministre Jean-Marc Ayrault, les sectes profitent de plus en plus des personnes âgées. Les seniors sont vulnérables car « fragilisés par l'âge, l'isolement, le deuil, la maladie, la perte des repères, l'altération des capacités physiques et intellectuelles. Ce ne sont pas tant des cibles à recruter que des sources potentielles de revenus et de capitaux », analyse la mission. Par le biais de démarchages à domicile, de discussion, d'aide à rompre la solitude, ces mouvements s'installent chez les personnes âgées ou dans les maisons de retraite, s'insinuent dans leur intimité pour obtenir des dons ou capter l'héritage, parvenant à isoler l'aîné(e) de sa propre famille.

« Faire en sorte que les familles n’existent plus »

Ces mésaventures sont arrivées à « Monsieur S. », 75 ans, manipulé pendant un an et demi par une femme de 50 ans membre d'un groupe sectaire et se présentant comme « envoyée de Dieu ». Si sa famille a réussi à s’en débarrasser en septembre dernier après avoir interpellé un procureur, les cicatrices sont encore vives comme en témoigne sur RMC sa fille, Nathalie. « On a passé presqu’un an et demi d’enfer. Mon père était totalement sous emprise. Cette personne se prévalait d’appartenir à un mouvement et se mettait à parler au nom de mon père. Elle vivait complètement à ses crochets. Sous un discours soit disant tout amour, elle le mettait véritablement en danger. La première chose qu’elle a voulu faire, c’est le convaincre de cesser de prendre ses médicaments. Les dégâts qui ont été fait dans la famille ne sont toujours pas réparés. Ces gens-là, justement, font en sorte que les familles n’existent plus ».

« En recherche d’affection »

Le gérontologue Alain Koskas, auteur en 2011 d'un rapport parlementaire sur la maltraitance financière, tire la sonnette d'alarme et appelle à protéger nos aînés. « Beaucoup de ces personnes âgées vivent seules à domicile. Elles ont souvent un deuil du conjoint à faire, elles sont en recherche d’affection. Les mouvements sectaires connaissent très bien cette pratique de prise en main de personnes en état de faiblesse. Parce que même celles qui ont une famille se mettent tout à coup à leur fermer la porte, ne l’ouvrant plus qu’à ces représentants qui viennent prêcher la bonne parole et leur dire que leurs dons sont essentiels pour l’avenir de l’humanité ».

« Une liberté de croyance à respecter »

Serge Blisko, le président de la Miviludes, s’inquiète lui aussi l’évolution des mouvances sectaires, maintenant organisés en petits groupes autour d’un gourou. « On est souvent alertés par des directeurs d’établissement d’hébergement sur le fait que des personnes âgées sont très souvent sollicitées par des groupes pseudo religieux ou spirituels. C’est très délicat : il y a une liberté de croyance et de religion à respecter entièrement, mais il faut faire attention à ne pas être en présence d’un phénomène de dérive qui peut amener les personnes âgées dans des affaires de captation d’héritage, etc. »

Mathias Chaillot avec Victor Joanin