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La réforme des retraites se dessine, les syndicats sont amers

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PARIS (Reuters) - Le profil de la réforme du régime des retraites en France se dessine jour après jour à travers des fuites dans la presse, sous les yeux de syndicats déterminés à peser sur le débat parlementaire.

L'exécutif conteste que les modalités de la réforme, qui sera présentée aux syndicats le 15 juin, soient déjà arbitrées alors que le déficit des retraites est attendu à 9,3 milliards en 2010 selon la Commission des comptes de la Sécurité sociale.

Mais la hausse des cotisations des fonctionnaires, le report progressif de l'âge légal à la retraite et une contribution imposée aux très hauts revenus correspondent aussi bien aux propos du gouvernement qu'aux souhaits de l'électorat de droite rapportés par les élus.

Le gouvernement semble aussi s'orienter vers la réduction des allégements de charges patronales sur les bas salaires, une individualisation de la pénibilité et reste en quête de solutions pour améliorer l'emploi des seniors.

Selon des députés UMP reçus mercredi par le ministère du Travail, Eric Woerth, en charge de la réforme, n'a confirmé ni le relèvement du taux de cotisation des fonctionnaires, ni que la contribution spécifique s'imposerait aux Français gagnant plus de 11.000 euros par mois, selon un chiffre mentionné dans la presse.

"INFOS ANCIENNES"

"Les fuites se font vers la presse, pas vers le Parlement", déplore le député UMP Yves Bur, rapporteur du budget de la Sécurité sociale à l'Assemblée nationale.

"Ce que demandent notamment nos militants, c'est qu'il y ait un vrai signal en termes de convergence public-privé", a-t-il déclaré mercredi à Reuters.

"Ce signal sera donné sur la cotisation des fonctionnaires. Il faut aller vers l'égalité (avec les taux du secteur privé) mais il faut le faire progressivement" et sans compensation salariales, a-t-il ajouté.

Le taux de cotisation retraites des fonctionnaires est de 7,85% contre 10,55% pour un salarié de droit privé.

Pour le député UMP Pierre Méhaignerie, un alignement progressif à hauteur de 0,5 point par an serait une mesure de justice, bien perçue par les Français.

La contribution des très hauts revenus devrait rapporter moins que la hausse des cotisations des fonctionnaires - la presse parle d'un minimum de 600 millions d'euros.

Mais ce sont "des infos anciennes qui commencent à ressortir", a dit Eric Woerth.

Une partie de la majorité juge qu'elle devrait plutôt rapporter entre un et trois milliards.

Le député UMP Gilles Carrez, rapporteur du budget à l'Assemblée nationale, propose de taxer le revenu fiscal de référence, idée que semble reprendre à son compte Eric Woerth.

"PAR PETITS BOUTS"

Un dernier point sensible n'a pas fait l'objet de fuites : l'ampleur et le rythme du report de l'âge légal de la retraite.

Celui-ci sera progressif, a déjà dit le Premier ministre François Fillon. D'un trimestre par an, comme la durée de cotisation en 2003, ou d'un semestre par an, comme le réclame le Medef ? Et jusqu'à quel âge ?

"Personne ne nous oblige à fixer un âge", glisse Yves Bur. "Ouvrons la voie : l'espérance de vie augmente d'un trimestre par an, reculons d'un trimestre par an l'âge légal. En 2022, on sera à 63 ans. 2022 est une année d'élection présidentielle. On verra alors si on continue ou pas", dit le député du Bas-Rhin.

Les syndicats disent n'avoir plus que la rue pour peser, en septembre, sur le débat parlementaire.

En venant déposer sous la pluie ses 214.188 pétitions au ministère du Travail, Bernard Thibault faisait grise mine.

"Il y a une écoute, ça ne veut pas dire qu'il y ait prise en compte. Au contraire", a dit le secrétaire général de la CGT.

"Tout arrive par petits bouts", constate pour sa part Eric Aubin, chargé des retraites à la CGT. "La méthode constatée depuis quelques semaines c'est d'alimenter chaque jour un peu plus ce que sera le projet de loi."

Pour lui, la consultation des partenaires sociaux n'est pour le gouvernement qu'une astuce de communication.

Après le 15 juin, les syndicats auront "deux ou trois jours pour réagir" et faire amender le texte qui sera présenté en conseil des ministres en juillet, selon Bernard Thibault.

Les syndicats sont dorénavant dans une logique d'affrontement.

"Nous ne sommes pas dans (une) posture de négociation de contreparties à une réforme que nous combattons", a dit le secrétaire général de la CFDT François Chérèque lors du congrès de son organisation à Tours.

Clément Guillou, avec les contributions d'Emmanuel Jarry, Emile Picy et Jean-Baptiste Vey, édité par Yves Clarisse