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Société

La diplomatie française dans la tourmente

Michèle Alliot-Marie (à droite), la ministre des Affaires étrangères, en péril, la crise avec le Mexique et la politique méditerranéenne en panne font que la diplomatie française est en pleine tourmente au plus mauvais moment pour Nicolas Sarkozy. Dominiq

Michèle Alliot-Marie (à droite), la ministre des Affaires étrangères, en péril, la crise avec le Mexique et la politique méditerranéenne en panne font que la diplomatie française est en pleine tourmente au plus mauvais moment pour Nicolas Sarkozy. Dominiq - -

par Emmanuel Jarry PARIS (Reuters) - Ministre des Affaires étrangères en péril, crise avec le Mexique, politique méditerranéenne en panne : la...

par Emmanuel Jarry

PARIS (Reuters) - Ministre des Affaires étrangères en péril, crise avec le Mexique, politique méditerranéenne en panne : la diplomatie française est en pleine tourmente au plus mauvais moment pour Nicolas Sarkozy.

Pour Dominique Moïsi, conseiller auprès de l'Institut français des relations internationales (Ifri), la cause en est notamment un excès de centralisation et un mélange des genres entre politique intérieure et enjeux diplomatiques.

"Il y a une extrême centralisation du pouvoir et le président de la République est lui-même victime de ce choix", estime-t-il en souhaitant qu'on nomme au ministère des Affaires étrangères quelqu'un qui allie "maturité internationale et compréhension des dossiers" et ne soit plus seulement choisi en fonction de considérations de politique intérieure.

Le chef de l'Etat français donnera vendredi à Paris le coup d'envoi d'une réunion des ministres des Finances des principales puissances économiques du monde, première étape d'une présidence française du G20 sur laquelle il mise pour se refaire une santé politique à 14 mois de l'élection présidentielle de 2012.

Le Mexique, qui prendra la suite de la France fin 2011, figure parmi les principaux pays émergents membres du G20 et copréside avec l'Allemagne un groupe de travail sur la réforme du système monétaire international, une des priorités de Paris.

Or, Paris et Mexico sont en froid depuis que Nicolas Sarkozy a annoncé lundi sa décision de dédier les festivités de l'année du Mexique en France à Florence Cassez, une jeune française condamnée à 60 ans de prison par la justice mexicaine pour complicité d'enlèvement et de séquestration.

Mexico a annoncé son retrait de l'année du Mexique et le président français n'avait toujours pas réussi jeudi après-midi à joindre au téléphone son homologue mexicain, Felipe Calderon.

CRÉDIBILITÉ ATTEINTE

La ministre française des Affaires étrangères a provoqué mercredi un autre incident en évoquant le sort de Florence Cassez lors d'un discours au Sénat en présence de l'ambassadeur du Mexique, qui a quitté la tribune d'honneur.

Mais ce n'est qu'un rebondissement secondaire, pour Michèle Alliot-Marie, par rapport à la polémique sur ses vacances en Tunisie, deux semaines avant la chute du président Zine Ben Ali.

La ministre, qui a remplacé Bernard Kouchner le 14 novembre, doit aujourd'hui faire face presque seule aux attaques de l'opposition à chaque nouvelle révélation sur cet épisode.

Les sénateurs socialistes et communistes, qui réclament comme leurs collègues députés sa démission, ont ainsi boycotté jeudi une audition de Michèle Alliot-Marie.

Nicolas Sarkozy lui a maintenu jusqu'ici son soutien, en partie parce qu'il n'aime guère agir sous la pression, en partie parce qu'au moment où elle était en Tunisie, le Premier ministre François Fillon profitait de l'hospitalité du président égyptien Hosni Moubarak, également obligé depuis de renoncer au pouvoir.

Une issue que n'a pas su prévoir Paris, pas plus que la fin du régime de Ben Ali en Tunisie, et qui prive le chef de l'Etat français d'un de ses principaux appuis au Proche-Orient.

ALLIOT-MARIE SUR LE DÉPART ?

Nombre d'élus de la majorité se posent désormais ouvertement la question du départ de Michèle Alliot-Marie.

"Elle est très affaiblie", souligne un député UMP. "Sa crédibilité est atteinte auprès de ses collègues européens et sur la scène internationale. Il y a un problème à régler."

Le plus grave à ses yeux n'est pas tant l'usage que Michèle Alliot-Marie a fait du jet privé d'un homme d'affaire tunisien réputé proche de Ben Ali ou l'achat immobilier effectué par son père auprès du même Aziz Miled lors de ce voyage que le fait qu'elle ait tardé à reconnaître les faits.

Dominique Moïsi lui reproche surtout, pour sa part, "de n'avoir pas senti qu'il se passait quelque chose de grave au moment où elle était en Tunisie".

"Est-ce qu'on peut se permettre d'avoir un porte-drapeau et un porte-voix de notre pays à ce point affaibli, alors que la France est à la tête du G20 ?" se demande-t-il.

Il pointe également du doigt une "absence de compréhension" dans la façon dont le chef de l'Etat a géré ces dernières semaines le dossier Florence Cassez.

"En diplomatie, il y a ce qui peut être dit à voix haute et ce qui peut être murmuré dans le secret des cabinets", explique cet analyste. "Avoir une diplomatie qui s'appuie sur l'opinion publique face à un pays qui a une histoire compliquée avec le vôtre c'est prendre un risque pas nécessairement responsable."

Emmanuel Jarry, édité par Yves Clarisse