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Société

L'UE s'inquiète de l'essor des cours particuliers

Le soutien scolaire privé est en pleine expansion en Europe et représente plus de 3 milliards d'euros par an pour les seuls marchés français et allemand, selon un rapport réalisé à la demande de la Commission européenne. La tendance est la même à travers

Le soutien scolaire privé est en pleine expansion en Europe et représente plus de 3 milliards d'euros par an pour les seuls marchés français et allemand, selon un rapport réalisé à la demande de la Commission européenne. La tendance est la même à travers - -

par Alysha Love BRUXELLES (Reuters) - Le soutien scolaire privé est en pleine expansion en Europe et représente plus de 3 milliards d'euros par an...

par Alysha Love

BRUXELLES (Reuters) - Le soutien scolaire privé est en pleine expansion en Europe et représente plus de 3 milliards d'euros par an pour les seuls marchés français et allemand, selon un nouveau rapport consacré à cette "éducation de l'ombre".

Si les montants en jeu ne sont pas aussi importants dans tous les pays, la tendance est la même à travers toute l'Europe avec des parents qui consacrent des sommes toujours plus conséquentes pour offrir à leur progéniture un coup de pouce au-delà de la scolarité obligatoire, selon ce rapport réalisé à la demande de la Commission européenne.

Le succès grandissant des cours de soutien privés contribue aussi à accroître les inégalités en Europe, les enfants des familles les plus aisées tendant à bénéficier de plus d'heures de soutien au risque de conséquences sociales à long terme.

"L'éducation de l'ombre a atteint une telle ampleur et a des implications si importantes en termes de justice sociale, d'économie de la connaissance, de fonctionnement du système scolaire et de vie quotidienne pour les élèves comme pour leurs familles, qu'elle doit être traitée", écrit Mark Bray, l'auteur de cette étude intitulée "Le défi de l'éducation de l'ombre" et publiée la semaine dernière.

Réunissant des recherches conduites dans les différents pays membres de l'Union européenne au cours des quatre dernières années, elle montre que le secteur du soutien scolaire privé représentait 2,2 milliards d'euros en France en 2007 avec une croissance d'environ 10% l'an.

En Allemagne, le soutien scolaire représente entre 900 millions et 1,5 milliard d'euros par an et concerne principalement les élèves du secondaire. En France et en Belgique, une heure de soutien scolaire peut être facturée plus de 30 euros de l'heure.

En Europe du Sud, où les systèmes éducatifs publics sont

considérés comme moins performants que ceux du Nord, la demande de soutien scolaire est très forte et les familles espagnoles, portugaises, grecques ou chypriotes consacrent des sommes importantes pour assurer l'avenir de leurs enfants.

A Chypre et en Grèce, les montants investis par les familles en cours particuliers représenteraient jusqu'à 20% du budget de l'éducation nationale, selon cette étude.

Ce sont toutefois les enfants des familles les plus aisées qui là encore tirent le meilleur parti de ces cours de soutien.

Même dans les pays scandinaves dont les systèmes éducatifs publics sont généralement classés dans le haut des palmarès internationaux, le soutien scolaire privé a le vent en poupe.

"Les cours particuliers ont moins à voir avec les élèves qui ont besoin d'un soutien qu'ils peuvent trouver à l'école qu'avec le maintien des avantages compétitifs de ceux qui connaissent déjà le succès scolaire et sont privilégiés", a relevé Jan Truszczynski, directeur général de la DG Education et Culture de la Commission européenne, qui a commandité cette étude.

UN MARCHÉ DE PLUSIEURS MILLIARDS D'EUROS

Les familles aisées et urbaines font plus largement appel aux cours particuliers que les familles modestes, selon le rapport.

Dans certains pays, les cours particuliers sont généralement utilisés par des familles qui scolarisent déjà leurs enfants dans le privé, ce qui ne fait qu'accentuer la fracture socio-économique.

"S'il est laissé au libre jeu du marché, le soutien scolaire privé maintient et exacerbe les inégalités", relève Mark Bray. "Les familles qui ont des revenus plus élevés peuvent payer pour des cours particuliers en plus grand nombre et de meilleure qualité", ajoute-t-il.

Tout en soulignant les conséquences sociales de cette éducation de l'ombre, le rapport montre que le soutien scolaire privé est aussi devenu une force économique.

En France, en Belgique, au Royaume-Uni, en Irlande et ailleurs, de véritables entreprises se sont créées pour offrir des services de cours particuliers.

"Le soutien scolaire est une industrie créatrice d'emplois et pour de nombreux enseignants du public une source additionnelle de revenu", a souligné Jan Truszczynski. "C'est sans doute une des raisons pour lesquelles gouvernements comme organisations syndicales préfèrent éviter le sujet", a-t-il relevé.

En dépit des milliards qui lui sont consacrés, de nombreux pays n'ont d'ailleurs pas réglementé cette activité qui reste en conséquence défiscalisée.

Inès de Bonneval, édité par Marc Joanny