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L'appel du 18 juin, le début d'un mythe qui perdure

Statue du général de Gaulle, à Varsovie. Quand il lance son appel à la résistance à l'Allemagne nazie, le 18 juin 1940, Charles de Gaulle pense s'adresser aux militaires mais ses mots, que peu entendront en direct, posent les jalons d'une relation particu

Statue du général de Gaulle, à Varsovie. Quand il lance son appel à la résistance à l'Allemagne nazie, le 18 juin 1940, Charles de Gaulle pense s'adresser aux militaires mais ses mots, que peu entendront en direct, posent les jalons d'une relation particu - -

par Laure Bretton PARIS (Reuters) - "Le dernier mot est-il dit ? L'espérance doit-elle disparaître ? La défaite est-elle définitive? Non!" Quand...

par Laure Bretton

PARIS (Reuters) - "Le dernier mot est-il dit ? L'espérance doit-elle disparaître ? La défaite est-elle définitive? Non!"

Quand il lance son appel à la résistance à l'Allemagne nazie, le 18 juin 1940, Charles de Gaulle pense s'adresser aux militaires mais ses mots, que peu entendront en direct, posent les jalons d'une relation particulière et durable avec les Français.

Chantal Morelle, historienne spécialiste du gaullisme, en veut pour preuve les innombrables cérémonies officielles, le déluge éditorial et médiatique qui accompagnent le 70e anniversaire d'une "certaine idée de la France".

L'inconscient collectif français, loin des fastes de Louis XIV ou des conquêtes de Napoléon, s'est forgé dans cette culture du refus, estime l'auteur du "Gaullisme pour les nuls".

Aux yeux du général de Gaulle, "la désobéissance pouvait être une vertu pour un chef et les Français approuvent les hommes qui disent non", ajoute l'universitaire.

"Le gaullisme c'est une attitude, un état d'esprit, c'est savoir s'opposer, dire non, un cri de révolte", a confirmé mercredi sur LCP le président de la Fondation de Gaulle, Pierre Mazeaud.

Aux yeux de l'ancien président du Conseil constitutionnel, être gaulliste aujourd'hui, dans la France de Nicolas Sarkozy, "c'est être capable de dire non à ses propres amis et de voter contre un texte de la majorité".

Le 16 juin 1940, fraîchement nommé sous-secrétaire d'Etat à la Défense, De Gaulle apprend à Bordeaux la demande d'armistice du maréchal Pétain.

Il repart aussitôt pour Londres où il demande au Premier ministre britannique, Winston Churchill, le droit de s'exprimer sur les ondes de la BBC.

Le cabinet britannique hésite. Les termes de l'armistice ne sont pas encore connus: l'Angleterre redoute de voir tomber la flotte française aux mains des nazis et ne veut pas provoquer de rupture avec le gouvernement Pétain.

Feu vert est finalement donné le 17 juin. Le 18, Charles de Gaulle se rend à Bush House, le siège historique de la BBC où seront installées par la suite les équipes des "Français parlent aux Français".

LÉGITIMITÉ HISTORIQUE

A cette époque, quelque 9.000 Français vivent et travaillent à Londres, rejoints à partir du printemps 40 par ceux qui fuient la "campagne de France" et les soldats évacués de Norvège lors de l'opération Alphabet.

Ce sont eux, et les auditeurs britanniques, qui entendent le speaker de la BBC annoncer que Charles de Gaulle va faire une déclaration - vers 20h00 ou 22h00, selon les sources - mais aucun enregistrement sonore ne subsiste de cette diffusion.

"La flamme de la résistance ne doit pas s'éteindre et ne s'éteindra pas", lance le général, les yeux rivés sur le micro de la BBC et sur ses feuilles griffonnées.

"A 49 ans, j'entrais dans l'aventure comme un homme que le destin a jeté hors de toutes les séries", écrira-t-il dans ses Mémoires.

Mais en France, les gens sont sur les routes, en pleine débâcle, sans radio.

Certains découvrent les mots du général dans la presse écrite le lendemain, d'autres entendront sa seconde déclaration, aux mêmes accents, diffusée le 22 juin, jour de la signature de l'armistice avec le régime hitlérien dans la clairière de Rethondes.

Selon l'historien Jean-Louis Crémieux-Brilhac, un des premiers à avoir rejoint Londres, beaucoup, après quatre ans passés dans la résistance, ne connaissaient toujours pas les mots de de Gaulle, qui scellent pourtant, dans l'esprit du général, son destin politique.

Le 18-Juin, "pour le général et les gaullistes, c'est l'acte qui légitime toute la politique d'après-guerre", estime Chantal Morelle.

En 1962, le président de Gaulle s'appuie sur ce symbole pour modifier la Constitution afin de faire élire les chefs d'Etat de la Ve République au suffrage universel.

Il décide de renforcer la légitimité des urnes, explique l'historienne parce qu'il "estimait que le 18-Juin lui conférait une légitimité historique que son successeur, quel qu'il soit, ne pourrait jamais avoir".

Edité par Sophie Louet