BFMTV
Société

J'ai été le tribun du peuple, dit Jean-Marie Le Pen

Jean-Marie Le Pen, qui s'apprête à passer le flambeau à sa fille Marine, se console de ne pas avoir été "roi" en pensant avoir été utile à la France dans son rôle de "tribun du peuple". /Photo prise le 12 janvier 2011/ REUTERS/Jacky Naegelen

Jean-Marie Le Pen, qui s'apprête à passer le flambeau à sa fille Marine, se console de ne pas avoir été "roi" en pensant avoir été utile à la France dans son rôle de "tribun du peuple". /Photo prise le 12 janvier 2011/ REUTERS/Jacky Naegelen - -

par Gérard Bon NANTERRE, Hauts-de-Seine (Reuters) - Jean-Marie Le Pen, qui s'apprête à passer le flambeau à sa fille Marine, se console de ne pas...

par Gérard Bon

NANTERRE, Hauts-de-Seine (Reuters) - Jean-Marie Le Pen, qui s'apprête à passer le flambeau à sa fille Marine, se console de ne pas avoir été "roi" en pensant avoir été utile à la France dans son rôle de "tribun du peuple".

Le président sortant du Front national mise aussi sur sa benjamine, dont il ne doute pas qu'elle vaincra son rival Bruno Gollnisch au congrès de Tours, ce week-end, où la succession du vieux chef se jouera, pour perpétuer sa "lignée" à l'élection présidentielle de 2012.

Le dirigeant d'extrême droite, qui s'était qualifié en 2002 pour le second tour de la présidentielle, estime que Marine Le Pen pourra bousculer encore plus le jeu dans 16 mois à la faveur de la crise, des difficultés de l'euro et du chômage.

"Le monde a changé, la situation a changé. La réalité a rejoint et parfois dépassé nos prédictions", explique-t-il dans une interview à Reuters, au siège du parti dans un quartier populaire de Nanterre, près de Paris.

Selon lui, les Français ne croient plus aux "remèdes" des "vieux médecins" de l'UMP ou du Parti socialiste et Marine, 42 ans, a l'énorme avantage d'incarner une nouvelle génération.

"C'est une femme qui a une autre expérience et qui est de son temps. Moi, je suis du temps de 'honneur et patrie, valeurs et discipline'", dit-il au moment de céder la place à 82 ans.

"Je n'ai pas été capable de mettre en oeuvre le programme que je crois salvateur pour la France. Eh bien ! Il y a le deuxième étage de la fusée Le Pen, c'est Marine".

Découvrant pendant l'interview un sondage TNS Sofres montrant que le FN séduit de plus en plus les sympathisants de la droite classique, Jean-Marie Le Pen prédit un "rééquilibrage" de la vie politique en faveur du FN.

"LE FN N'A JAMAIS ÉTÉ FASCISTE"

"Ce sondage va se traduire sans doute par une perte de substance de l'UMP et un renforcement de l'influence du Front national", se réjouit-il.

Alors que, depuis 20 ans, l'UMP a rejeté toute alliance avec le Front national, 43% de ses sympathisants disent désormais souhaiter une entente avec le FN.

Mais Jean-Marie Le Pen fait la fine bouche: "On ne peut pas imaginer une alliance avant d'établir le rapport de forces".

Il rappelle que son parti réclame le retour au scrutin proportionnel aux législatives et insiste sur l'ampleur des divergences entre sa formation et l'UMP ou le PS.

"Nous sommes en désaccord fondamental sur plusieurs sujets essentiels, sur la mondialisation, sur l'Europe, sur l'euro", insiste-t-il.

Prié de dire s'il ne regrette pas, en 55 ans de vie parlementaire, de n'avoir pu accéder au pouvoir, Jean-Marie Le Pen rétorque: "Il y a des gens très illustres dans l'Histoire de France qui se sont consolés de ne pas être le roi et qui ont été très utiles à leur pays."

"Le rôle que j'ai joué, c'est celui de tribun du peuple à Rome, celui qui, en face des pouvoirs en place, avait une immunité - que je n'ai pas, moi - pour pouvoir dire ce qu'il pensait, critiquer."

Il juge tout aussi essentiel d'avoir installé "dans la durée" un parti national, populaire et social. "Le FN, c'est le projet de ma vie", assure-t-il.

Combattu pour ses provocations et ses outrances, en particulier sur l'immigration, Jean-Marie Le Pen se défend d'être raciste: "Je n'ai aucune hostilité contre les immigrés".

A l'en croire, le FN a été "caricaturé" pendant des années en "parti fasciste", un ostracisme auquel aurait mis fin, selon lui, l'ex-Premier ministre socialiste Lionel Jospin.

"Il a fallu attendre longtemps que M. Jospin dise 'mais le Front national n'a jamais été fasciste', ce qui était une évidence", avance-t-il.

Jean-Marie Le Pen, qui n'entend pas prendre sa retraite, confirme qu'il deviendra président d'honneur à l'issue du congrès de Tours et qu'il siègera dans toutes les instances dirigeantes où il aura droit de vote.

Il assure néanmoins qu'il n'interfèrera pas "dans le gouvernement" du Front national et qu'il laissera au bureau politique "ses prérogatives".

Accusé par ses adversaires de népotisme, il répond: "Ce n'est pas un cadeau que j'ai fait à ma fille. La présidence du Front national, c'est une charge lourde, dangereuse."

Edité par Yves Clarisse