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Société

Faut-il interdire la fessée ?

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Une députée UMP veut rendre la fessée hors-la-loi. Pour ou contre, parents, politiques et spécialistes se font entendre. Donnez, vous aussi votre avis.

La fessée bientôt interdite par la loi ? C'est en tous cas ce que souhaite la députée UMP de Paris et pédiatre Edwige Antier. Elle a déposé « une proposition de loi qui inscrit au code civil, l'abolition des châtiments corporels infligés aux enfants ».
Une proposition qui relance le débat entre les pro et les anti-fessée. Donnez-nous votre avis dans le forum ci-dessous.

« On ne va pas mettre les gens en prison »

Rappelant qu'en 2008, le Conseil de l'Europe a appelé ses Etats membres à interdire la fessée et que 18 d'entre eux l'ont déjà fait, Edwige Antier lance : « Plus on lève la main sur un enfant, plus il devient agressif ». La députée pédiatre estime que cette mesure doit faire partie en France du plan de prévention de la délinquance. Car selon elle, toutes les études montrent que l'usage de châtiments corporels fait croire aux enfants que la violence est acceptable. Certains la reproduisant donc, une fois adultes. Tout châtiment corporel commis sur un adulte étant illégal, il doit, selon elle, en être de même pour les enfants. Se défendant par ailleurs de vouloir inscrire cette loi au code pénal - comme c'est le cas en Allemagne, Edwige Antier ajoute : « on ne va pas mettre les gens en prison. Mais j'espère que cela sera lu lors des mariages. C'est un signe fort au plan éducatif, qui est envoyé aux familles. »

« Que l'Etat laisse les parents choisir »

Une proposition qui fait notamment bondir l'Union des Familles en Europe, comme l'explique sa porte-parole, Dominique Marcilhacy : « Les parents pensent que l'Etat doit franchement se mêler de ce qui le regarde. Il n'y a pas une unique façon d'élever des enfants, comme il n'y a pas un unique enfant. Il y a des enfants pour lesquels les fessées sont utiles, d'autres pour lesquels ce n'est pas utile. Il y a des parents dans l'éducation desquels la fessée a sa place ; pour d'autres, non. Ce qu'il faut surtout, c'est laisser les gens se débrouiller et choisir. »
Très remontée, Dominique Marcilhacy poursuit : « à notre époque, où on ne cesse de dire que les parents ne font pas leur travail, interdire la fessée, c'est une façon supplémentaire de les disqualifier. [...] Quand on donne une fessée, c'est une façon de redresser l'enfant, c'est-à-dire de lui expliquer ce qui est bien ou mal, et puis de l'empêcher de continuer à faire quelque chose de mal. La loi interdit les mauvais traitements - donc les fessées excessives bien sûr -, mais on peut de toute façon être parfaitement maltraitant, sans jamais toucher un enfant - les violences psychologiques, ça existe. Mais de manière générale, les parents, qui sont les meilleurs spécialistes de leurs enfants, sont extrêmement responsables. »

« La violence ordinaire, terreau de la maltraitance »

Des arguments que conteste fermement Olivier Maurel, président fondateur de l'Observatoire de la violence éducative ordinaire et auteur du livre La fessée (éditions La Plage), qui se félicite de la proposition d'Edwige Antier. Doutant du rôle « éducatif » de la fessée, il met qui plus est en garde contre des dérives éventuelles : « elle présente des dangers extrêmement graves, notamment le risque d'escalade : à partir du moment où une société admet qu'on peut frapper les enfants, même faiblement - fessée ou gifle -, on ne sait jamais jusqu'où ça peut aller chez certains parents qui, parce qu'ils ont été eux-mêmes maltraités, parce qu'ils sont exaspérés, stressés ou parce que l'enfant leur répond "même pas mal". [...] La violence éducative ordinaire, c'est le terreau de la maltraitance. »

X. Bertrand : « des lois sur tout, partout, ça va bien ! »

Une fois cette proposition de loi officiellement déposée sur le bureau de l'Assemblée Nationale, rien ne garantit qu'elle soit débattue en séance publique, et a fortiori votée. Pour que l'interdiction de la fessée devienne effective, il faut d'abord que le texte d'Edwige Antier soit inscrit à l'ordre du jour par le groupe UMP ou le gouvernement, puis voté dans les mêmes termes par l'Assemblée et le Sénat. Ce qui, à en croire la réaction agacée de Xavier Bertrand, secrétaire général de l'UMP, est loin d'être chose faite : « des lois sur tout, partout, ça va bien. En plus, une loi qui rentre dans la sphère privée et intervient à la place des parents, pour dire : on interdit la fessée... Non, je crois qu'il ne faut pas aller trop loin. Et la responsabilité parentale est un des fondements de notre société. »