BFMTV
Education

TER-car scolaire : que s’est-il passé ?

-

- - -

Le chauffeur du car a été mis en examen alors que le passage à niveau où s’est produit l’accident, qui a fait 7 morts, est aussi remis en cause.

Nicolas Sarkozy s'est rendu ce matin à Allinges (Haute-Savoie) sur les lieux de la collision qui a eu lieu hier entre un TER et un car scolaire à un passage à niveau sur la route départementale 233 au lieu-dit de Mésinges, peu avant 14h. 7 collégiens sont décédés dans l'accident qui a fait également 25 blessés. 3 sont toujours hospitalisés dans un état grave ce matin. C'est le plus grave accident de transport d'enfants depuis celui de Beaune en 1982, qui avait fait 53 morts, dont 44 enfants de 6 à 15 ans.

Le TER assurant la liaison entre Evian-lès-Bains et Genève a percuté le car scolaire transportant 56 personnes, dont 50 élèves de 5ème du collège de Margencel (Haute-Savoie) et six adultes (cinq parents et le conducteur) pour une sortie sur un site médiéval.

Une enquête administrative et une enquête judiciaire ont été ouvertes hier. Les chauffeurs du TER et du car, indemnes mais « très choqués », ont été entendus par les enquêteurs hier soir et le chauffeur a été placé en garde à vue ce matin.

Une faute du chauffeur ?

A l'heure actuelle les versions divergent sur les circonstances de l'accident. En effet, selon plusieurs témoignages, le chauffeur du car se serait engagé sur le passage à niveau alors que les feux clignotants étaient allumés. Ainsi, selon cet enfant, très choqué, qui n'était pas dans le car mais a assisté à l'accident, « il s'est engagé sur le passage à niveau quand les barrières étaient en train de se fermer. Il est resté coincé par les barrières et le train l'a coupé en deux. J'ai tout vu, j'étais juste derrière lui, et le train l'a coupé en deux. Les clignotants rouges étaient déjà allumés avant que j'arrive et il s'est engagé quand même quand les barrières étaient en train de se fermer et il est resté coincé ».

Gilles Frossard, qui dirige la société de car Philippe dont le car faisait partie, a pu parler à son chauffeur après l'accident. Or, interviewé ce matin dans Bourdin&Co, celui-ci donne une version différente : « J'ai vu mon chauffeur quelques instants après le drame hier. Il a vingt ans d'expérience dans le métier, il connaît la géographie locale et fait preuve de beaucoup de prudence et d'une grand conscience professionnelle. Il m'a dit qu'il n'a pas franchi le passage à niveau alors que les feux étaient allumés. Je ne peux pas en dire plus car il est en état de choc et il ne sait pas m'expliquer réellement ce qui s'est passé après. Vu la configuration, le car ne peut pas arriver rapidement et s'il avait vu les feux allumés il se serait arrêté ».

Un passage à niveau dangereux ?

Autre interrogation, la dangerosité du passage à niveau. De nombreux habitants, tel Yannick, voisin du lieu de l'accident, dénoncent la disposition des lieux : « On le prend tous les jours et je ne suis vraiment pas surpris. C'est un passage à niveau dans un tournant, sur un dos-d'âne. C'est un coupe-gorge. Je ne sais pas comment on conduit un bus mais ça doit être limite à l'arrêt pour passer. Le seul moyen de le passer, c'est en 1ère. On espère que ça fera bouger les choses, mais c'est malheureux d'attendre le décès d'enfants pour faire bouger les choses ».

Autre son de cloche du côté du Réseau Ferré de France (RFF), qui gère les passages à niveau, où Philippe de Mester, le directeur régional, explique que « c'est un passage à niveau tout à fait normal, certes avec une courbe prononcée de la route, avec une visibilité qui n'est pas extraordinaire, mais le système d'annonce doit en principe permettre de s'arrêter tout à fait normalement, comme sur la plupart des passages à niveau ». En effet, le passage à niveau ne fait pas partie de la liste officielle des 400 sites classés dangereux par RFF.

Le procureur de la République de Thonon Hervé Robin semble suivre la version du RFF, expliquant qu'il « n'a jamais eu vent d'incident à ce passage à niveau. Il n'y a jamais eu à ma connaissance d'accident depuis 8 ans ici, même d'une ampleur moindre. Ce passage, tous les gens de la région le connaissent car beaucoup de gens, pour aller de Thonon à Chablais, le prenaient pour éviter les bouchons. Ce n'est pas une découverte, ce n'est pas un endroit totalement isolé ».

Ecouter les enfants

Ce matin, au collège de Margencel, des psychologues, des médecins et des infirmières ont reçu les enfants touchés directement ou indirectement par ce drame. Hervé Réveillé, le directeur des urgences pour la Croix Rouge de Haute-Savoie, reçoit des parents et des enfants depuis hier après midi. Selon lui, les enfants doivent absolument évacuer leurs angoisses : « il faut qu'ils puissent parler, sinon ils vont intérioriser complètement cet évènement et là ça deviendra beaucoup plus difficile pour eux de l'assumer. Il faut qu'il y ait des gens qui soient là pour les écouter, donc il faut qu'ils aillent à l'école, qu'ils se retrouvent entre eux et puissent aussi en parler entre eux. Pour qu'ils puissent l'assumer, il faut leur dire la vérité, leur dire « il y a eu un accident, ça s'est passé comme ça, certains de vos camarades sont morts et d'autres sont blessés. Ils vont revenir la semaine prochaine peut-être avec vous à l'école. Il va falloir que vous sachiez qu'ils ont eu cet évènement qui les a frappé » ».

La rédaction avec Yann Abback et Florent Germain