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Mineurs enfermés: la contrôleuse générale des prisons s'alarme pour leur scolarité

Dominique Simonnot, contrôleure des lieux de privation de liberté, le 20 octobre 2020

Dominique Simonnot, contrôleure des lieux de privation de liberté, le 20 octobre 2020 - BFMTV

Selon une enquête, 60% des mineurs incarcérés sont déscolarisés depuis au moins un an. Elle appelle à faire de leur éducation "une priorité absolue".

Un enseignement de moindre qualité pour les enfants incarcérés? L'enseignement dispensé aux mineurs privés de liberté est "loin d'être à la hauteur", estime dans un avis publié ce mercredi 31 janvier au Journal officiel, la contrôleuse générale des lieux de privation de liberté (CGLPL), qui appelle à faire de la scolarité "une priorité absolue pour les enfants enfermés".

Selon cet avis, transmis le 17 novembre aux ministres de la Justice et de l'Éducation nationale, la majorité des mineurs "arrivent dans des lieux d'enfermement en grande difficulté scolaire, au milieu de vies chaotiques et bouleversées".

"Sous peine d'une aggravation de ces parcours, déjà bancals, l'enjeu est majeur tant pour le développement et l'insertion sociale de ces enfants que pour la société tout entière", observe la CGLPL.

Une "scolarisation par défaut"

Or, l'enseignement qui leur est dispensé "s'apparente à une scolarisation par défaut, inférieure, tant en volume qu'en qualité, à la scolarisation en milieu libre", regrette-t-elle.

Le ministre de la Justice a répondu à Dominique Simonnot, contrôleuse générale des prisons, assurant que "l'accès à un enseignement pour les mineurs privés de liberté" était "une réelle préoccupation" de ses services. Si le suivi scolaire reste inférieur en milieu fermé, reconnaît Éric Dupond-Moretti, ces trois dernières années, il a augmenté, en moyenne, "de 3 heures hebdomadaires".

"Je partage votre avis de tendre prochainement vers les 12 heures de volume horaires en quartiers pour mineurs et 20 heures en établissements pour mineurs", ajoute le ministre.

Actuellement, environ 700 mineurs sont incarcérés, 600 placés en centres éducatifs fermés et 22.000 hospitalisés dans des services de psychiatrie, est-il indiqué dans l'avis.

60% des mineurs incarcérés sont déscolarisés

Mais aucune statistique nationale n'existe à ce jour sur le nombre d'enfants privés de liberté en âge d'être scolarisés, note la CGLPL, qui appelle à les recenser afin de mieux identifier leurs profils, leurs difficultés et leurs besoins.

Dans son courrier, le ministre relaie "une enquête réalisée il y a un an environ concernant les mineurs incarcérés", affirmant que "60% sont déscolarisés depuis un an au moins".

L'avis de la CGLPL recommande ensuite de renforcer les enseignements afin qu'ils bénéficient d'un cursus comparable à celui des élèves à l'extérieur, notamment en volume horaire, et d'assurer la continuité pédagogique pendant les vacances scolaires, périodes pendant lesquelles les enfants enfermés sont désoeuvrés.

"Comme en contexte ordinaire, les enseignements sont à l'arrêt pendant les congés scolaires", note Éric Dupond-Moretti, ajoutant que cela "n'empêche pas les mineurs concernés de devoir réaliser des travaux en cellule remis ensuite aux enseignants".

Enfin, la contrôleuse des prisons appelle à mettre en place un "cadre légal et institutionnel" pour "sanctuariser l'enseignement scolaire au sein des lieux d'enfermement", en garantissant un recrutement d'enseignants à la hauteur des besoins et en créant un statut spécial pour ces derniers afin de valoriser leur mission. Les enseignants qui interviennent en détention bénéficient d'une indemnité spécifique, répond Éric Dupond-Moretti.

O.E. avec AFP