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Le retour du tabac au lycée ne fait pas l'unanimité

Des espaces fumeurs ont été aménagés dans de nombreux lycées dans la foulée de la mise en place de l'état d'urgence.

Des espaces fumeurs ont été aménagés dans de nombreux lycées dans la foulée de la mise en place de l'état d'urgence. - Eric Feferberg - AFP

Depuis l’instauration de l’état d’urgence, au lycée Voltaire, dans le XIe arrondissement de Paris, comme dans plusieurs autres, on tolère que les élèves fument dans l’enceinte de l’établissement.

Avant, ils sortaient sur le trottoir pour s’en griller une. Mais depuis la mise en place de l’état d’urgence, la direction du lycée Voltaire, dans le XIe arrondissement de Paris, tolère que les élèves fument dans un coin de la cour, un lieu où ils sont moins exposés, rapporte Le Parisien.

Rencontrés par le quotidien, les élèves de ce lycée semblent plutôt favorables à la mesure. "C'est moins hypocrite", estime Alex, un lycéen non-fumeur de 17 ans. Pour lui, pas la peine de compter interdire de fumer entre les murs du lycée tout en empêchant les élèves de sortir pendant la récréation: "Ce serait la révolution! Il y aurait forcément des élèves pour sécher une heure le temps de cloper tranquille..."

Du côté des fumeurs, Norma l'assure: "cela ne change finalement pas grand-chose. Moi, je ne fume pas plus qu'avant". Colombe et Eléonor, 17 ans, se réjouissent elles de "pouvoir profiter vraiment des récréations. (...) Quand on sortait sur le trottoir, c'était la course".

La moitié des lycées parisiens toléreraient le tabac

Si le ministère de l'Education nationale ne communique aucun chiffre, comme le souligne le journal, le lycée est loin d’être le seul à les laisser temporairement faire entorse à la loi Evin.

Selon le SNPDEN-Unsa, premier syndicat des proviseurs, la question se poserait dans de nombreux établissements: d'après ses estimations, environ la moitié des lycées parisiens pratiqueraient cette "tolérance" et la disposition aurait aussi été prise en province.

Fin janvier, l’organisation avait écrit au Premier ministre Manuel Valls pour déplorer les "divergences d'appréciation" des ministères de l'Education et de l'Intérieur d'une part, qui ont accordé une tolérance provisoire afin d'éviter, au nom de la sécurité des élèves, les attroupements à l’extérieur, et du ministère de la Santé d'autre part, qui refuse toute exception au nom de la lutte contre le tabagisme.

Dans une lettre reçue mi-janvier par les chefs d'établissement, le ministère de la Santé rappelait ainsi aux proviseurs enfreignant la loi les amendes encourues à chaque contrôle et les personnels habilités à verbaliser.

La mesure ne fait pas l'unanimité

En attendant, la mesure divise. Pour Philippe Tournier, secrétaire général du SNPDEN et proviseur du lycée parisien Victor-Duruy (VIIe), il s’agit là d’un moindre mal.

"C'est clairement le temps de l'état d'urgence", plaide-t-il auprès du Parisien. "Je ne vois pas en quoi l'on augmente le risque de tabagisme avec cette mesure. Forcer les élèves à sortir pour fumer, comme cela se fait depuis 2006, n'a pas permis de réduire la consommation des jeunes. Cela a seulement induit des attroupements incontrôlés devant les lycées, propices aux trafics de cannabis de surcroît." 

Le docteur Alain Rigaud, président de l'Association nationale de prévention en alcoologie et en addictologie (Anpaa), est en revanche franchement opposé à la circulaire du 25 novembre offrant la possibilité aux proviseurs d'aménager des zones dédiées pour les élèves fumeurs.

"Lorsqu'une tolérance est accordée, elle reste", explique-t-il, lui aussi cité par le journal. "Rien ne doit faciliter l'entrée des jeunes dans le tabagisme, qui tue un fumeur sur deux, et ça, c'est un risque assuré, alors que la menace d'une attaque terroriste contre un lycée est aléatoire."

V.R.