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Laïcité: un professeur sur deux s'est déjà autocensuré par peur d'incidents

Ce vendredi, la journée de la laïcité est célébrée dans tous les établissements scolaires. (Photo d'illustration)

Ce vendredi, la journée de la laïcité est célébrée dans tous les établissements scolaires. (Photo d'illustration) - AFP

Un sondage de l'Ifop met en lumière la montée de l'appréhension des enseignants pour aborder les questions religieuses depuis l'assassinat de Samuel Paty le 16 octobre 2020.

Ce vendredi marque la Journée nationale de la laïcité. À la veille de cet événement, l'Ifop, en partenariat avec la revue Écran de veille, a publié un sondage sur "l'expression du fait religieux à l'école" et les "atteintes à la laïcité".

Cette enquête présente deux enseignements principaux: une recrudescence des contestations d'enseignement pour motifs religieux et la montée de l'appréhension des enseignants pour aborder les questions religieuses depuis l'assassinat de Samuel Paty le 16 octobre 2020.

La mort de Samuel Paty, un tournant

Cet événement marque un tournant dans le comportement des professeurs. Ainsi, 56% des enseignants du public se sont déjà auto-censurés pour éviter des incidents sur les questions de religion. Ces chiffres s'élevaient à 36% dans une précédente étude de l'Ifop pour le Comité national d'action laïque, datant de 2018.

Par ailleurs, 52% des professeurs interrogés ont eu peur au point d'éviter certains sujets contre 43% fin 2020, rapporte l'institut de sondage. Cette appréhension est surtout visible en zone d'éducation prioritaire (65%) et touche plus particulièrement les jeunes professeurs (60% parmi les moins de 30 ans), ainsi que les enseignants d'histoire-géographie (64%).

Plus précisément, présenter des caricatures de personnages religieux aux élèves, motif invoqué pour justifier le meurtre de Samuel Paty, est une situation crainte par près de deux enseignants sur trois (62%). Deux ans après l'assassinat de ce professeur, 77% des enseignants estiment que le ministère de l'Éducation nationale n'a pas tiré les enseignements de ce drame.

Recrudescence des contestations d'enseignants

L'enquête de l'Ifop permet également de mesurer une recrudescence des contestations d'enseignements pour des motifs religieux. 60% des professeurs du secteur public y ont été confrontés au moins une fois au cours de leur carrière.

Et pour la plupart, cela est arrivé au cours des 15 derniers mois. Dans le détail, 31% des enseignants du public ont été confrontés à des contestations d'enseignements au nom de la religion depuis septembre 2021.

Ces contestations interviennent plus particulièrement dans les domaines relatifs aux relations de genre, à la transmission de la culture civique ou à l'histoire humaine ou naturelle comme les cours de géographie ou de sciences de la vie et de la terre.

Les jeunes professeurs favorables à un assouplissement des règles de laïcité

De nombreuses atteintes à la laïcité sont également notables en dehors des cours. Ainsi, 71% des enseignants du public indiquent en avoir observé au moins une dans l'enceinte de leur établissement depuis l'application de la loi de 2004, qui garantit le respect du principe de laïcité dans les écoles, collèges et lycées publics.

Enfin, les jeunes enseignants se montrent favorables à un assouplissement des règles de laïcité. 62% des professeurs de moins de 30 ans soutiennent l'introduction de menus à caractère confessionnel comme la viande halal ou la viande casher contre 34% pour les plus de 50 ans. Les jeunes professeurs sont également 41% à adhérer à la possibilité d'avoir des vêtements traditionnels larges, contre 13% pour les plus de 50 ans.

Baptiste Farge