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Études supérieures: la moitié des jeunes de milieux populaires ne se sentent pas capables d'obtenir une licence

Lorsque leurs parents sont dépourvus de diplôme du supérieur, peu de jeunes songent à se lancer dans un parcours de licence (44%).

Lorsque leurs parents sont dépourvus de diplôme du supérieur, peu de jeunes songent à se lancer dans un parcours de licence (44%). - -

La moitié des jeunes issus de familles modestes ne s'imaginent pas effectuer des études supérieures. Un chiffre encore plus important chez les jeunes qui habitent à la campagne.

Un plafond de verre plus que palpable. Les jeunes issus de milieux populaires doutent de leur capacité à réussir des études supérieures, à tel point qu'ils écartent d'office cette option. C'est ce que révèle une étude publiée ce lundi 8 janvier par l'Institut d'études et de conseil en stratégie d'opinion Viavoice à la demande de six associations spécialisées dans l'égalité des chances (Afev, Article 1, Chemins d’avenirs, JobIRL, Tenzing et 100.000 Entrepreneurs).

En effet, si 72% des jeunes urbains issus de familles de catégories socio-professionnelles supérieures (CSP +) se sentent en capacité d'obtenir une licence, ils sont seulement 51% chez les jeunes urbains issus de familles plus modestes (CSP-).

Un écart qui se creuse encore lorsque ces jeunes habitent à la campagne: seuls 40% se sentent capables d'obtenir ce diplôme. Cet isolement géographique joue sur leur envie de déménager pour étudier. 57% des élèves issus de CSP- dans les territoires ruraux pointent le manque de moyens financiers comme un obstacle.

"Alors que ces jeunes sont assis sur les mêmes bancs de l'école de la République, dont l'une des promesses est l'égalité de traitement et d'apprentissage, on voit bien que les dés sont pipés, dès le départ", a réagi Salomé Berlioux, fondatrice et directrice générale de Chemins d'avenirs dans un communiqué.

Des dès en effet "pipés" en fonction de l'environnement scolaire et familial. Lorsque leurs parents sont dépourvus de diplôme du supérieur, peu de jeunes songent à se lancer dans un parcours de licence (44%). Ce chiffre grimpe à 64% dès lors qu'au moins un des deux parents est diplômé.

De même, les jeunes scolarisés dans des établissements scolaires réunissant des catégories sociales modestes sont 68% à se lancer dans des études après le baccalauréat quand ils sont 90% dans des établissements socialement favorisés.

Des métiers "trop souvent interdits"

"Il serait hypocrite d'ignorer qu'il est de plus en plus difficile de trouver un métier lorsqu'on est peu diplômé, et que les niveaux de salaire sont corrélés aux niveaux de diplômes", abonde Benjamin Blaviern cofondateur et président exécutif d'Article 1, une association qui soutient des élèves issus de milieux populaires.

Parmi les 1.000 jeunes Français âgés de 15 à 16 ans qui ont été interrogés, ceux issus de catégories socio-professionnelles modestes (CSP-) envisagent davantage les métiers de l'artisanat, de l'industrie, du BTP ou encore des métiers du commerce et de la vente. Quand, à l'inverse, les enfants des CSP+ veulent être médecins, professeur ou ingénieur.

"Encore aujourd'hui, en 2023, si vous êtes jeune d'origine modeste dans un territoire rural ou un quartier dit sensible, accéder aux métiers de la tech, devenir journaliste, médecin ou écrivaine vous est trop souvent interdit", a souligné Salomé Berlioux.

Face à tous ces chiffres, réelle preuve d'un risque de décrochage scolaire chez de nombreux jeunes, les six associations qui ont commandé l'étude appellent le gouvernement à mettre en place une stratégie nationale pour aider ses jeunes à choisir une orientation qui leur "ressemble". Et qui ne se limite pas à une reproduction sociale et géographique.

Ils jugent indispensable de "garantir un accès renforcé à une information claire" et "d'assurer une médiation avec le monde de la formation et de l'emploi".

"L'orientation des jeunes des territoires défavorisés est un enjeu majeur pour l'avenir de notre pays", a conclu Christelle Meslé-Génin, présidente-fondatrice de JobIRL.

Juliette Brossault