BFMTV
Education

En France, plus de la moitié des jeunes en bidonvilles ne vont pas à l'école

Un jeune garçon vivant dans un bidonville à La Courneuve, au nord de Paris.

Un jeune garçon vivant dans un bidonville à La Courneuve, au nord de Paris. - KENZO TRIBOUILLARD / AFP

Une étude du Collectif pour le droit des enfants roms à l'éducation (CDERE) met en lumière un chiffre alarmant: plus de la moitié des mineurs vivant dans des squats ou des bidonvilles sont exclus du système scolaire français.

Ils sont bien là, sur le territoire français et pourtant, au regard de l'Etat, ils sont invisibles. Près de 9.000 enfants et adolescents de la communauté Rom vivent dans des bidonvilles et des squats, sans accès décent à l'hygiène ou à l'éducation. Une étude menée par les militants associatifs du Collectif pour le droit des enfants roms à l'éducation livre un constat accablant: 67% des jeunes âgés de 12 à 18 ans sont déscolarisés ou très peu assidus.

Il n'existe pas de données officielles sur la scolarisation des mineurs vivant dans des squats. Le collectif, composé de bénévoles, a donc dû opérer avec les moyens du bord pour mettre sur pied cette étude. L'enquête s'est basée sur un échantillon de 161 jeunes, majoritairement originaires de Bulgarie et de Roumanie, vivant dans 34 bidonvilles entre novembre 2015 et juillet 2016.

Seulement 4% des 16-18 ans sont scolarisés

Les chiffres, à prendre avec précaution, sont édifiants: alors que le taux de déscolarisation moyen en France n'est que de 7%, 53% des jeunes interrogés ne vont pas du tout à l'école. Ce taux grimpe à 96% pour les 16-18 ans, sans distinction de sexe. Certains n'ont même jamais mis les pieds dans un établissement scolaire de leur vie. 

Parmi les raisons majeures invoquées par le collectif: les expulsions régulières, voire systématiques, des familles hors des squats. Sur les 34 lieux de l'enquête, 10 au moins ont connu une expulsion depuis décembre 2015. Toujours l'année dernière, ce sont plus de 11.000 personnes qui ont été expulsées de 111 lieux de vie, dont un tiers d'enfants. Résultats: ces jeunes se retrouvent à la rue ou se voient obligés de se reloger dans des environnements trop éloignés de leur établissement scolaire.

Les conditions de vie précaires accentuent les inégalités

Les conditions déplorables au sein des bidonvilles entraînent un manque d'hygiène, de sommeil et d'infrastructures pour étudier, ce qui compromet toute forme d'éducation au collège ou au lycée. Le coût de la scolarité, que ce soit en termes de frais d'inscription, de transports, de dépenses vestimentaires, de fournitures scolaires ou même de cantine, décourage les parents dont les enfants sont nombreux à être entrés dans la vie active pour les aider financièrement.

Enfin, l'enquête pointe du doigt le manque de moyens alloués par l'Etat à l'encadrement des enfants précaires et allophones. Le nombre de classes pouvant accueillir les jeunes qui ne maîtrisent pas la lecture sont trop peu nombreuses. Les procédures pour intégrer les enfants immigrés en France et ne parlant pas ou peu le français sont trop lentes et la répartition des classes UPE2A - qui accueillent ces jeunes allophones - sur le territoire français est extrêmement inégale.

Le collectif en appelle au ministère de l'Intérieur pour cesser les expulsions sans solution, rappelant que celles-ci sont dévastatrices en tout point pour l’intérêt supérieur de l’enfant, son droit à l’éducation et sa vie privée.

Mathilde Joris