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"Du gaspillage": une généralisation du SNU rejetée par les professeurs et les organisations de jeunesse

Le Service national universel, qui concerne chaque année des milliers de jeunes, pourrait être rendu obligatoire dans les prochains mois. Une piste qui ne réjouit pas Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU.

Quel sera l'avenir du SNU? Le "Service national universel", promesse de campagne d'Emmanuel Macron, pourrait être généralisé dans les prochains mois. Selon les informations du site Politis, le gouvernement envisagerait de rendre obligatoire ce "séjour de cohésion" de douze jours pour tous les jeunes Français d'une même classe d'âge.

Une volonté venue de l'Elysée, sur laquelle le président de la République devait s'exprimer en début d'année, avant de finalement temporiser, la réforme des retraites ayant mobilisé l'agenda de l'exécutif ces dernières semaines.

Une généralisation sur le temps scolaire?

Mais une généralisation du SNU serait "est une très mauvaise idée", prévient d'emblée au micro de BFMTV Sophie Vénétitay du Snes-FSU. "Ce serait un gouffre budgétaire, du gaspillage", affirme-t-elle.

Car l'organisation de séjours de douze jours avec levers à 6h30 et couchers à 22h30, hors du département de résidence, avec port de l’uniforme obligatoire, Marseillaise, levée de drapeau, et divers modules imposés, coûte cher.

"C'est 1,5 milliard d'euros qui n'iront pas à l'Éducation nationale alors même qu'on en a profondément besoin, c'est 1,5 milliard qui sont retirés aux professeurs, aux élèves, à leur famille. Rien que ça, c'est scandaleux", dénonce Sophie Véntitay.

Si généralisation il y a, elle pourrait surtout se faire sur le temps scolaire. "Inacceptable", dénonce la syndicaliste. Car deux semaines de Service national universel à la place des cours pendant deux semaines signifierait un volume horaire en baisse pour enseigner les programmes chaque année.

"Nous considérons que l’engagement doit rester entièrement choisi"

Le gouvernement veut "faire moins d'école" et "c'est quelque chose qu'on ne peut pas accepter aujourd'hui", martèle Sophie Vénétitay. De nombreuses organisations de la communauté éducative (de professeurs, parents d'élèves, de jeunes) dénoncent une généralisation qui serait obligatoire.

"Nous considérons que l’engagement doit rester entièrement choisi", peut-on ainsi lire dans une lettre ouverte à Emmanuel Macron signée début février par 17 organisations, dont l'Unef, la Fage, Animafac, la Ligue de l'Enseignement ou encore la Ligue des droits de l'Homme.

Les signataires alertent par ailleurs sur les conditions d'organisation des séjours: "A l’heure où l’on manque d’animateur-ices pour permettre aux enfants de partir en accueil de loisirs et colonies de vacances, nous ne pouvons pas créer une concurrence avec le dispositif SNU."

"On veut la gratuité de l’école, pas la militarisation dès la seconde", alerte de son côté la FIDL, syndicat lycéen opposé à la mesure.

El Haïry défend le SNU à l'Assemblée

Interpellée à l'Assemblée nationale ce mardi, Sarah El Haïry, secrétaire d'Etat chargée de la Jeunesse et du SNU, a vivement répondu aux oppositions.

"Être contre le SNU, c'est être contre la mixité sociale, la cohésion nationale et l'émancipation des jeunes", a-t-elle lancé dans l'hémicycle, assurant que le Service national universel est "un projet pour les jeunes et pour la France."

Elle assure qu'une "expérimentation" aura lieu avant toute généralisation et que les consultations sont toujours en cours. "Oui ou non sur le temps scolaire? Oui ou non sur la complémentarité éducative? Oui ou non sur la généralisation ou l’extension?"

Mis en place en 2019, le Service national universel n'a jamais vraiment fait le plein, ni assuré les fonctions de facteur de mixité promis, avec une surreprésentation d'enfants de personnel militaires, policiers ou "corps en uniforme". En 2022, 32.000 jeunes se sont engagés dans le SNU.

Pour le rendre plus attractif, les séjours pourraient dans les prochains mois avoir des modules gratuits comme le passage du permis de conduire ou du Bafa. Mais les derniers arbitrages, attendus avec impatience par les jeunes comme par les personnels de l'Éducation nationale, seront faits par le président de la République.

Ariel Guez