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Assassinat de Samuel Paty: comment les professeurs abordent cette journée d'hommages

Un an après l'assassinat du professeur d'histoire à Conflans-Sainte-Honorine, les hommages prendront différentes formes dans les établissements scolaires ce vendredi.

Un an après l'assassinat de Samuel Paty, comment enseigne-t-on la laïcité dans les salles de classe? Alors qu'un hommage est attendu ce vendredi dans les établissements scolaires à la veille de la mort du professeur d'histoire-géographie, les enseignants abordent de diverses manière les commémorations.

Sandrine Mauruc est principale du collège Henri Matisse de Nice. Selon elle, il y a eu un gros travail pédagogique à faire autour du drame durant l'année écoulée. Et un hommage, venant des élèves, va être rendu au sein du rectorat de Nice, avec une photo:

"C'est un travail réalisé l'année scolaire dernière, à la suite des événements. Une classe de 4e avait effectué un travail en arts plastiques et en Français, de façon à se réapproprier et réinterpréter le tableau de Delacroix La liberté guidant le peuple. Ce travail a été retenu par le rectorat et sera dévoilé tout à l'heure, lors de l'hommage à Samuel Paty, avec l'attribution de son nom à une salle spécifique au rectorat", explique-t-elle.

La proviseure témoigne également de l'émotion ressentie par ses élèves à la suite du drame du 16 octobre 2020. Loin du fossé imaginé par beaucoup entre élèves et professeurs, bon nombre d'entre eux se sont inquiétés pour leurs enseignants et sur leur capacité à refaire classe après ce traumatisme:

"L'année scolaire dernière, beaucoup beaucoup d'élèves étaient vraiment inquiets pour leurs professeurs, et attendaient le retour de vacances avec inquiétude" assure Sandrine Mauruc. "Ils s'étaient vraiment interrogés sur ce qu'ils avaient vécu, et comment ils allaient. On a même d'anciens élèves qui ont repris contact avec leurs professeurs, notamment en histoire-géographie, pour prendre de leurs nouvelles."

"Je ne vais pas céder à la barbarie"

Pour beaucoup de professeurs, l'hommage à Samuel Paty passe avant tout par la poursuite de l'enseignement pour lequel le professeur de Conflans-Sainte-Honorine a été assassiné. Aurélia Merle d'Aubigné fait partie de ceux-là. Elle est prof d'histoire-géographie d'un lycée du XIXe arrondissement de Paris, et n'hésite pas à aborder les sujets sensibles, montrer les caricatures.

"J'ai pensé à la mort après l'assassinat de Samuel Paty bien-sûr, parce que moi je le fais tout le temps. Je travaille sur les dessins depuis que je suis enseignante. Mais je ne vais pas céder à la barbarie", assure-t-elle.

Alors pour faire comprendre ces caricatures à ses élèves, leur signification et leur place dans la société, la professeure utilise de nombreux exemples. Notamment celles qui ont été censurées à travers l'Histoire. "En France, on a toujours critiqué les religions", lance-t-elle à ses élèves, qui se relèvent assez réceptifs: "Les caricatures de Mahomet, moi je peux comprendre qu'elles déplaisent, mais ça reste un dessin et ça ne vise pas une personne en particulier", témoigne Dylan, élève de seconde.

"C'est devenu pour moi une urgence, et une importance centrale d'aborder ces sujets", considère Aurélia Merle d'Aubigné. "Parce qu'on les a sans doute, nous-mêmes enseignants, peut-être méconnu, minoré, en se disant que ce n'était peut-être pas la peine et qu'il ne fallait pas fâcher. Et bien si, enseigner c'est aussi rentrer dans des préjugés, les déconstruire, pour rebâtir avec les élèves."

Selon un récent sondage, 90% des professeurs d'histoire-géographie n'ont pas renoncé à enseigner certains sujets sensibles à leurs élèves depuis l'assassinat de Samuel Paty.

Louis Augry