BFMTV
Société

Boulogne-sur-mer se bat contre la désertification de son centre-ville

La fermeture d'un magasin H&M au centre-ville de Boulogne-sur-mer provoque la colère du maire, Frédéric Cuvillier. Il tente d'attirer l'attention de ses administrés sur le sujet.

A Boulogne-sur-mer, le maire Frédéric Cuvillier ne décolère pas. Le magasin H&M, installé depuis 11 ans en plein centre-ville, a décidé de fermer le 2 décembre prochain. De quoi mettre en danger l'activité du centre-ville. Frédéric Cuvillier a donc décidé de réagir, en placardant dans tout Boulogne des affiches pour fustiger l'attitude de la chaîne de vêtements. "H&M encaisse, H&M délaisse, Stop!", peut-on lire sur ces panneaux, estampillées du logo de la ville.

"H&M ne partira pas de Boulogne en toute impunité", a déclaré Frédéric Cuvillier en conférence de presse mardi soir.

"J'assume mon affichage et le fait que je pointe du doigt cette marque qui pénalise l'ensemble de l'activité commerciale du centre-ville". "Lorsque des agglomérations, qui par dizaines de milliers de mètres carrés développent des grandes surfaces ou complexes commerciaux en périphérie, cela a des conséquences sur les différents centre-villes", a encore estimé Frédéric Cuvillier,

Le maire prend ainsi l'exemple des centres commerciaux de Calais à une trentaine de kilomètres, où est présent H&M, qui "appauvrissent" le centre-ville de Boulogne.

Un rapport pointe la responsabilité des élus

Boulogne n'est pas la seule concernée. En France, près d'un rideau sur dix est baissé dans les villes moyennes, selon un rapport de l'Inspection générale des finances, publié en octobre 2016. "C'est le résultat d'une série de non-décisions", pointe Olivier Razemon, auteur de Comment la France a tué ses villes (éd. Rue de l'échiquier). "On a laissé faire, les élus ont laissé s'installer des zones commerciales et le font encore", martèle-t-il sur BFMTV. Ces centres commerciaux qui proposent de nombreux services gratuits aux consommateurs, choisissent les périphéries pour s'implanter. Et tuent à petits feux les commerces de centre-ville.

Dans un rapport publié en octobre 2016, l'inspection générale des Finances pointe elle aussi le rôle des politiques dans cette affaire: "Il revient aux élus, responsables de la ville et de l'intercommunalité, d'engager et de mettre en œuvre une stratégie globale adaptée à la situation de leur territoire et de leurs centralités", peut-on lire. "La reconquête commerciale du centre-ville nécessite de concevoir un projet politique reposant sur une action volontariste à toutes les échelles du territoire". C'est le cas notamment de la ville d'Arras, qui s'est dotée en 2016 d'un "manager de centre-ville" et de sept salariés chargés d'établir une stratégie pour redynamiser son centre.

La création d'emplois, argument de poids pour les élus

Mais pour le député La République en marche Patrick Vignal, président de l'association Centres Villes en mouvement, l'argument est un peu trop facile. "Les élus ne sont souvent pas armés face à ce problème", explique-t-il sur BFMTV. "On n'a pas accompagné les maires, et bien souvent, les petites communes n'ont pas les moyens de se payer des experts" sur le sujet.

Il rappelle également que la question de l'emploi peut parfois convaincre des élus démunis: "quand vous êtes maire d'une ville moyenne, vous passez votre temps à recevoir des jeunes qui vous disent qu'ils veulent du travail." Difficile selon lui, dans ce contexte, de refuser l'implantation d'un centre commercial qui promet de créer des centaines d'emplois. 

Selon lui, la solution pourrait également passer par la construction de davantage de logements sociaux dans les centres-villes, ainsi que le retour des professions libérales. Mais surtout, il réclame un moratoire d'un an sur l'implantation des zones commerciales. Une demande qui a été rejetée en octobre dernier par le secrétaire d'Etat Benjamin Griveaux, au nom de la "liberté du commerce".

Ariane Kujawski