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Société

Bordeaux, épicentre de la mobilisation des gilets jaunes 

Au fil des semaines, la ville de Bordeaux est devenue l'un des bastions des manifestations des gilets jaunes. Au moins deux rassemblements sont prévus dans le chef-lieu de Gironde pour ce 9e samedi de mobilisation.

La détermination des gilets jaunes bordelais ne faiblit pas. 4.600 personnes étaient dans les rues de Bordeaux samedi dernier selon le chiffre de la Préfecture, pour la 8e journée de mobilisation: les manifestants étaient alors plus nombreux à Bordeaux qu'à Paris, où 3.500 personnes ont été décomptées par la Préfecture également. Cinq membres des forces de l'ordre ont été blessés et onze personnes interpellées dans le chef-lieu de Gironde.

À la veille du 9e samedi de mobilisation, les autorités redoutent que Bordeaux soit à nouveau l'épicentre des tensions. Un groupe Facebook dédié à la ville de Bordeaux appelle déjà au rassemblement place de la Bourse à 13 heures. La page précise qu'aucun parcours n'est pour l'heure défini "pour éviter de donner trop d'informations aux forces de l'ordre". Un autre rassemblement a été déclaré en préfecture par l’association "Les gilets jaunes la révolution du peuple français". Les syndicats et les partis politiques ont été invités à rejoindre le rassemblement prévu devant le commissariat de police, cours du Maréchal-Juin, selon le journal Sud-Ouest.

Les gilets jaunes contre le Bordeaux "bourgeois"

Le secrétaire d'Etat au ministère de l'Intérieur a assuré ce jeudi au maire Alain Juppé que le dispositif de sécurité serait renforcé samedi. "On aura un dispositif conséquent", a affirmé Laurent Nuñez, avant de lancer un appel aux casseurs, "qui trouveront en face d'eux des forces de l'ordre extrêmement déterminées". Pas moins de 9 unités mobiles seront déployées dans la ville, contre 6 les samedis précédents.

Bordeaux a vu ses prix immobiliers s'envoler ces dernières années, repoussant les classes moyennes dans les banlieues souvent mal desservies, générant un fort mécontentement populaire qui contribue à alimenter la colère des gilets jaunes. Soucieux de la colère qui monte dans sa ville, Alain Juppé avait annoncé mercredi qu'il installerait des cahiers de doléances dans toutes les mairies de quartier.

Un choix de lieu symbolique

"Le choix du lieu de rassemblement des gilets jaunes est symbolique", explique le sociologue Frédéric Neyrat qui y a scruté le mouvement pour une vaste étude nationale. "En général, les cortèges syndicaux partent de la place de la Victoire, ou de la place de la République. Les gilets jaunes, c'est de la place de la Bourse. C'est le Bordeaux bourgeois, le Bordeaux du Triangle d'Or, le symbole de la puissance et de la richesse commerciale", explique le chercheur.

"Bordeaux fait aussi partie d'une ligne qui va de Rouen à Marseille, une France de l'ouest moins industrialisée", poursuit-il. Les "gilets jaunes", c'est une mobilisation pour des services publics, des services de proximité. Il y a aussi une dynamique de mobilisation. À Bordeaux, on sait qu'il va y avoir du monde".

Commerçants mécontents

Jeudi, les commerçants bordelais avaient lancé un cri d'alarme dans l'espoir que les gilets jaunes cessent de bloquer le centre-ville tous les samedis. "Les commerçants sont tolérants sur le fond des revendications mais sur la forme, ça devient vraiment une misère", a souligné Jérôme Bianchi, le président de l'association des commerçants du cours d'Alsace Lorraine, théâtre plusieurs fois de violences.

"En novembre et décembre, il y a eu une baisse de fréquentation de 20% en ville et de 40% le samedi", expliquait quant à lui Christian Baulme, président de la Ronde des quartiers de Bordeaux. "La baisse moyenne du chiffre d'affaires est de -25% sur la ville, le samedi pour certaines enseignes, on a eu des -50%. C'est tout juste impossible de survivre dans ces conditions là", a déclaré le président de l'association, qui regroupe 1.200 commerces sur les 5.000 que compte la ville.
Jeanne Bulant avec AFP