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Société

A Neuilly, une péniche pour les SDF

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Depuis quelques semaines, Neuilly-sur-Seine accueille une péniche dédiée à l'hébergement de sans-abri. Un petit plus pour cette ville qui peine à atteindre ses quotas de logements sociaux ?

Un bateau destiné à accueillir des personnes en grande détresse a jeté l'ancre à Neuilly-sur-Seine, l'une des villes les plus riches de France. Dans la plus grande discrétion, le maire a autorisé l'Armée du Salut à venir amarrer l'un de ses bateaux, l'Amirale Major Georgette Gogibus, sur les quais de Seine, juste en dessous du Pont de Neuilly, porte d'entrée de la Défense.

A bord de cet un ancien remorqueur, 50 logements pour des femmes et des hommes en grande difficulté. Des SDF, des ex-détenus ou encore des couples expulsés. Une vingtaine de personnes se sont installées sur ce bateau depuis la fin du mois de septembre. Avec l'équipe de l'Armée du Salut, ils tentent de construire un projet de réinsertion. Ses résidents, s'ils le demandent, peuvent donc avoir une adresse postale sur Neuilly-sur-Seine, ainsi que l'accès à toutes les activités municipales comme la piscine, le tennis... ou le Golf.

« Un département où beaucoup ont des idées préconçues »

Emmanuel Ollivier est le directeur de ce bateau. D'abord étonné d'avoir eu le feu vert de la mairie de Neuilly, il explique, fier de ce « projet innovent » : « on a un challenge à tenir : on arrive dans un nouveau département, où beaucoup de personnes ont des idées préconçues sur les personnes qu'on reçoit. Et autant nous, on a aussi des idées sur qui habite Neuilly. Ça a été une vraie découverte réciproque. »

« On n'est plus à Neuilly ! »

Découvrant ce projet, les habitants se sont très vite posé des questions. L'Armée du Salut a donc organisé une visite des lieux avec des riverains. Mais les craintes restent. Celles des parents dont les enfants doivent passer devant le bateau pour se rendre aux sports. « On n'est plus à Neuilly ! », lance une propriétaire installée juste en face. Mais la plupart des habitants attendent de voir pour juger, comme l'explique Michelle Trevette, gardienne de l'un des immeubles haussmanniens avec vue sur la Seine et qui font face au bateau. Cherchant ses mots, elle reconnaît que depuis l'arrivée de ces nouveaux voisins, il y a parmi ses copropriétaires et locataires « des personnes à qui ça ne plaît pas trop, qui se disent qu'il y a des personnes, c'est vrai, alcoolisées. Moi, je pense qu'il faut attendre de voir ce qu'il se passe après. »

Sylvain a 38 ans et deux années de vie dans la rue derrière lui. Il s'est installé dans une cabine du bateau, il y a 15 jours maintenant. Vivre à Neuilly, « au début c'est un peu dur, explique-t-il, parce que c'est vrai que c'est une ville très chic mais c'est une question de temps, on s'habitue. » Et Sylvain d'ajouter, en souriant : « Mes anciens amis de fortune me disent : dis donc, tu vas bien toi ! »

Une histoire de quotas ?

Ces 50 cabines tout équipée, d'une dizaine de mètres carrés, devraient bientôt être comptabilisées comme logements sociaux sur Neuilly-sur-Seine. Une demande de la mairie. La ville doit livrer 750 logements sociaux d'ici 3 ans pour répondre à la loi SRU.
Jean-Christophe Fromentin est le maire, Divers droite, de Neuilly-sur-Seine. Il se défend d'avoir accepté l'installation de ce bateau pour faire augmenter son quota : « le projet m'intéressait avant tout. Je n'ai pas raisonné en matière de bénéfice de quota, mais simplement en termes d'humanité et de qualité du projet. Je veux que la ville amène une contribution solidaire ; Neuilly doit montrer ce qu'elle est, de manière objective, et ne pas se laisser réduire dans des raccourcis. »

La rédaction, avec Céline Martelet