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Stilnox, le somnifère qui tire des patients du coma

Pastilles de zolpidem, également commercialisé sous les noms d'Ambien, Myslee et Stilnox.

Pastilles de zolpidem, également commercialisé sous les noms d'Ambien, Myslee et Stilnox. - -

Une étude américaine montre comment le zolpidem, censé ralentir l'activité neuronale, agit paradoxalement chez des victimes d'accident cérébral.

Et le meilleur traitement pour tirer des patients du coma est... un somnifère! Une étude américaine, mise en ligne le 19 novembre dernier sur le site spécialisé eLife, montre comment le zolpidem, commercialisé en France sous le nom de Stilnox, agit sur des personnes affectées par un accident cérébral en parvenant paradoxalement à restaurer certaines fonctions motrices.

Cela fait plusieurs années que cet effet inattendu du zolpidem, un dérivé des benzodiazépines, est connu sur les patients plongés dans un état de "conscience minimale". La même équipe de chercheurs, dirigés par le docteur Nicholas Schiff, l'avait par exemple observé chez une femme de 48 ans, précise le site spécialisé Medscape (lien en anglais).

Plongée deux années durant dans cet état végétatif après une tentative de suicide, elle ne pouvait plus ni bouger, ni se nourrir, ni même parler. C'est en lui administrant du zolpidem pour traiter son insomnie (en état de conscience minimale, les yeux restent ouverts), qu'elle s'est mise à communiquer, à manger, et à se mouvoir d'elle-même pendant 20 minutes.

Les gestes du quotidien réactivés

Dans la nouvelle étude de l'équipe du docteur Schiff, deux vidéos montrent également un patient en état de conscience minimale, avant et après administration de zolpidem. Incapable de se servir d'un peigne ou d'une cuillère, il réussit à montrer à quoi servent ces deux objets, après administration du somnifère.

C'est en utilisant l'électroencéphalographie, examen qui analyse les ondes électriques du cerveau, que le docteur Schiff et son équipe ont compris comment fonctionnait l'action du zolpidem sur un cerveau atteint par un choc traumatique. En étudiant le cas de trois patients, ils se sont rendus compte que le "pic anormal d'ondes lentes" dû au traumatisme était "fortement réduit sous zolpidem". Il en résulte une amélioration immédiate de leur état de conscience.

Moins + moins = plus

Le "miracle" correspond à une règle mathématique simple: moins + moins = plus, explique Le Monde dans un article publié mardi. En temps normal, l'activité neuronale possède un schéma en forme de boucle: le cortex frontal, siège de plusieurs fonctions cognitives comme le langage et le raisonnement, active et inhibe plusieurs structures du cerveau, jusqu'à la stimulation finale du cortex frontal.

Lors d'un accident cérébral, les neurones chargés d'inhiber le pallidum, une des structures de cette chaîne, ne font plus leur travail. Ce qui aboutit à l'extinction majeure du cortex frontal. Mais comme en temps normal, le zolpidem est chargé de ralentir l'activité neuronale, il parvient dans ce cas à restaurer l'activité du cortex en inhibant les cellules qui inhibent le pallidum.

Une utilisation similaire en psychiatrie

La condition première de l'efficacité du zolpidem est donc que le cortex cérébral n'ait pas été touché. Interrogé par Medscape, le docteur Schiff précise qu'une étude a montré que moins de 10% des patients atteints de lésions cérébrales réagissaient au somnifère.

Les prodiges stimulateurs du zolpidem, néanmoins, ne s'en tiennent pas là: Le Monde rapporte que ces petites pastilles ont déjà été utilisées pour soigner des cas d'aphasie, et en psychiatrie pour soulager des troubles de l'humeur, comme la catatonie.

|||L'état de conscience minimale

Selon la définition de l'Inserm, il s'agit est un "état de conscience altérée, défini par une ouverture des yeux avec une conscience partielle possible, mais de manière insuffisante pour que puisse s'établir une communication fonctionnelle."

M. T.