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Monument controversé pour les 50 ans d'indépendance du Sénégal

Le Sénégal s'apprêtait à inaugurer samedi, à l'occasion du cinquantenaire de son indépendance, un imposant "monument de la Renaissance africaine", qui suscite de nombreuses critiques quant à son coût et son aspect jugé par certains attentatoire au code mo

Le Sénégal s'apprêtait à inaugurer samedi, à l'occasion du cinquantenaire de son indépendance, un imposant "monument de la Renaissance africaine", qui suscite de nombreuses critiques quant à son coût et son aspect jugé par certains attentatoire au code mo - -

par Mark John DAKAR - Le Sénégal s'apprêtait à inaugurer samedi, à l'occasion du cinquantenaire de son indépendance, un imposant "monument de la...

par Mark John

DAKAR (Reuters) - Le Sénégal s'apprêtait à inaugurer samedi, à l'occasion du cinquantenaire de son indépendance, un imposant "monument de la Renaissance africaine", qui suscite de nombreuses critiques quant à son coût et son aspect jugé par certains attentatoire au code moral de l'islam.

Un imam sénégalais a lancé vendredi une fatwa (édit) condamnant la statue géante, plus haute, de quelques mètres, que la statue de la Liberté, qui montre une femme et un homme regardant vers le ciel et brandissant un petit enfant qui pointe le ciel du doigt. L'imam reproche à l'ouvrage, construit par les Nord-Coréens, son côté "idolâtre".

Le président Abdoulaye Wade balaie les critiques visant la statue de cuivre, qui s'élève au sommet d'une volée de marches sur une colline dominant Dakar. Pour l'inauguration, une trentaine de chefs d'Etat du monde entier, mais surtout d'Afrique, étaient attendus. Parmi les autres personnalités invitées, le révérend américain Jesse Jackson, héraut des droits civiques, et le rappeur américano-sénégalais Akon.

Pour le président Wade, qui a 83 ans et a confirmé son intention de briguer un nouveau mandat en 2012, le monument "est un symbole important".

Dans une interview que publie samedi le Journal du dimanche, il précise que "Ce monument représente l'Afrique qui sort de l'obscurantisme de quatre siècles et demi d'esclavage et de deux siècles de colonisation; l'Afrique qui sort à la lumière, et se présente au monde avec vigueur, avec la volonté enfin de se construire pour être à la table des nations libres et développées".

SENTIMENTS MITIGÉS

"Rien n'est assez grand pour l'Afrique!", ajoute-t-il.

Wade rejette les nombreuses critiques qui visent la soi-disant démesure du projet:

"La statue de la Liberté, est-ce de la démesure? Le christ rédempteur qui domine Rio, est-ce de la mégalomanie? Se demande-t-on pourquoi les Egyptiens ont construit le Sphinx?"

Concernant les accusations de gaspillage financier, il assure que "Cette statue n'a pas coûté un franc au budget du Sénégal: j'ai payé en donnant un terrain".

Dans un autre entretien, accordé à RFI, à TV5 et au Monde, il enfonce le clou:

"Je n'ai jamais dépensé un franc du budget pour la réalisation de cette statue. J'ai dit aux (constructeurs) Coréens que je n'avais pas d'argent mais que je pouvais les payer en terrains".

"Qu'on ne dise pas que j'ai dépensé 23 millions d'euros. Je sais que quand je construis un monument de ce genre, tout l'environnement prend de la valeur(...). Il n'y a pas d'argent sorti. Le coût est de 23 millions d'euros. Mais la valeur, c'est trois ou quatre fois plus!", dit-il dans le même entretien.

"Il y avait de l'opposition au départ mais au fur et à mesure que j'ai expliqué qu'il n'y avait pas d'argent (public), les gens ont compris", continue le chef de l'Etat.

Le sénateur Ahmed Bachir Kounta, allié politique de Wade, rappelle à Reuters que "Chaque oeuvre d'architecture suscite des controverses - regardez la Tour Eiffel à Paris".

Bon nombre de Dakarois, confrontés à des coupures de courant de plus en plus fréquentes, à des infrastructures routières en mauvais état et aux problèmes de chômage, nourrissent des sentiments mitigés envers le monument, construit en bord de mer, et qui fait une cinquantaine de mètres de haut.

"En 2010, l'Afrique se doit de renaître", déclarait un Sénégalais de 36 ans, Thierno Dienj, partisan des socialistes (opposition), qui était parmi la petite foule rassemblée samedi pour une manifestation antigouvernementale.

"Mais ce monument ne prend pas en compte la hausse du coût de la vie ici", ajoute-t-il, en se faisant l'écho des doléances fréquentes de la population face à l'inflation.

Avec Diadié Ba et Kim Gjerstad; Eric Faye pour le service français