Fermer 17 réacteurs nucléaires d'ici 2025, est-ce réaliste?
Après l’annonce de la fin des ventes de véhicules à essence ou diesel d’ici 2040, Nicolas Hulot a formulé une nouvelle mesure ce lundi, et non des moindres. Invité de la matinale de RTL, le ministre de la Transition écologique s’est engagé à fermer "peut-être jusqu’à 17" réacteurs nucléaires d’ici 2025. Objectif: ramener à 50% la part de l’atome dans la production d’électricité, comme le prévoit la loi sur la transition énergétique.
Près de 30% du parc actuel
La France possède aujourd’hui le deuxième plus grand parc nucléaire du monde avec 19 centrales pour un total de 58 réacteurs, parmi lesquels 34 ont plus de 30 ans. C’est donc près de 30% de la capacité productive totale que Nicolas Hulot souhaite supprimer d’ici les huit prochaines années.
En 2016, la production d’électricité en France a atteint 531,3 TWh pour Terrawatt-heure. Une production issue du nucléaire avec 348 TWh (72,3%), de l’éolien (3,9%), de l’hydraulique (12%), du solaire (1,6%), des bioénergies (1,6%), du gaz (6,6%), du charbon (1,4%) et du fioul (0,6%). En clair, l’Hexagone reste largement dépendant de l’atome. La fermeture de 17 centrales aurait donc des conséquences sur sa structure énergétique. Il est toutefois difficile d’évaluer précisément l’ampleur de la baisse de la production une fois l’arrêt de ces réacteurs effectif, le ministre de la Transition écologique n’ayant pas indiqué les sites concernés.
Est-ce vraiment réalisable?
Beaucoup doutent de la faisabilité d’une telle mesure d’ici huit ans compte tenu du nombre important de réacteurs concernés. D’autant que Nicolas Hulot n’a pas précisé les moyens prévus pour compenser la perte de production. Laquelle obligera vraisemblablement la France à revoir son organisation et à investir massivement dans le renouvelable qui, malgré une hausse non négligeable (+4,8%), n’a couvert "que" 20% de la consommation en 2016, selon RTE.
Et quand bien même la fermeture des 17 réacteurs nucléaires serait actée en 2025, leur démantèlement prendrait du temps. On estime en effet entre 20 et 30 ans le temps nécessaire pour démonter entièrement une centrale. Pourtant, la législation oblige le démantèlement des réacteurs arrêtés "dans un délai aussi court que possible". Une exigence loin d’être respectée puisque la France n’a jamais démantelé complètement le moindre réacteur parmi ceux définitivement arrêtés.
Le problème du coût
Autre problème, le coût. Car si la fermeture de réacteurs réduirait significativement les charges d’exploitation d’EDF, elle pourrait se révéler dans le même temps extrêmement onéreuse. En février dernier, un rapport parlementaire reprochait à EDF de ne pas avoir correctement anticipé le calendrier et le coût de démantèlement de ses centrales. Par exemple, celle de Brennilis (Finistère), censée être démontée en 2018, le sera finalement en 2032, selon les dernières prévisions. Et si le coût total du chantier était estimé à 254 millions d’euros en 2001, on évoque aujourd’hui la somme de 482 millions d’euros. Les opérations de démontage et d’isolation pour 17 réacteurs risquent donc d’aboutir à une facture extrêmement salée.
Enfin, impossible de ne pas se rappeler l’épisode de la centrale de Fessenheim dont la fermeture, promise par François Hollande, n’a été actée qu’après cinq longues années de débat. Or, si l’arrêt d’une seule centrale cristallise à ce point les tensions, il est légitime de se demander si la fermeture de 17 réacteurs peut s'opérer sans la moindre embûche dans les huit ans à venir.
Est-ce suffisant?
Reste à savoir si l'arrêt de 17 réacteurs suffira à atteindre l’objectif prévu par la loi de transition énergétique, à savoir une production d’électricité issue du nucléaire ramenée à 50% dans huit ans. Dans un rapport daté de février 2016, la Cour des comptes indiquait en effet que "17 à 20 réacteurs pourraient être arrêtés" pour atteindre l’objectif. Une évaluation loin de faire consensus.