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Bretagne: des tonnes de lingots romains découverts dans une épave

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- - Vue aérienne de l'île de Batz, le 27 septembre 2005.

Au large de Roscoff et de l'île de Batz, dans le Finistère, des archéologues ont mis la main sur un véritable trésor antique. Quelque 800 lingos d'étain ont été retrouvés dans une épave datant d'une époque comprise entre le IIe et IVe siècle.

Des archéologues ont découvert un véritable trésor, caché dans l'épave d'un navire romain, naufragé au début de notre ère au large de l'île de Batz et de Roscoff, dans le Finistère. A bord, quelque 800 lingots d'étain, un métal sans valeur aujourd'hui, mais très précieux du temps des Romains. Une vraie mine d'or pour l'époque, estimée entre le IIe et le IVe siècle après JC. 

"Découvrir une telle épave est suffisamment rare pour que cela soit exceptionnel", déclare la responsable des fouilles Olivia Hulot, qui dirige en Bretagne le Département de recherches archéologiques subaquatiques et sous-marines (Drassm). "Ca l'est d'autant plus que la cargaison du navire est également extrêmement rare, par sa nature, sa variété et sa richesse", ajoute l'archéologue sous-marine.

800 lingots

L'équipe scientifique pluridisciplinaire de 24 personnes qui, depuis le 18 août, participait à ces fouilles à bord du navire de recherches André-Malraux, a remonté quelque 800 lingots d'étain d'un poids total de plus de 5,5 tonnes.

Plus exceptionnel encore, une partie des lingots étaient constituée d'un alliage d'étain et de plomb, comme l'a révélé l'analyse effectuée sur les lieux des fouilles par une chercheuse du CNRS, selon Olivia Hulot.

D'une grande hétérogénéité de formes et de poids - entre 500 grammes et 34 kilos pour le plus lourd - ces lingots, très altérés par leur séjour dans les eaux de la Manche, sont gravés d'estampilles à base de lettres ou de symboles.

Retrouver l'origine des lingots 

C'est l'étude de ces signes, qui va désormais commencer, qui permettra d'en savoir plus sur l'origine de la cargaison. "Nous allons chercher à déterminer la ou les mines d'où a été extrait le minerai, mais aussi les procédés d'extraction et le réseau d'approvisionnement et de diffusion dont témoigne ce chargement", souligne Olivia Hulot.

Des petits vestiges de céramique, de vaisselle en étain ou des poids de balance ont également été retrouvés par les plongeurs. L'épave avait été découverte il y a 20 ans par des pêcheurs d'ormeaux, à proximité de l'île de Batz, mais ce n'est que cet été qu'une campagne de fouilles y a été entamée, après une expertise en mai.

C'est la seconde épave antique jamais retrouvée en Bretagne, et dans tout l'arc Atlantique. La précédente avait été trouvée en 1983 dans l'archipel des Sept-Iles, à cinq milles au large de Ploumanac'h, dans les Côtes d'Armor. Datant également d'une période comprise entre le IIe et le IVe siècle, l'épave, dont ne subsistait ni la coque ni le mobilier, gisait par 10 mètres de fond dans une zone de forte houle et de courants violents.

Un tournant dans l'histoire de l'archéologie maritime

Les trois campagnes de fouilles effectuées par le Drassm entre 1984 et 1986 avaient déjà permis de retrouver un chargement de 270 lingots, mais de plomb cette fois, dépassant les 20 tonnes au total. De formes grossières et pesant chacun entre 28 et 140 kilos, ces lingots étaient tous estampillés. Les noms, chiffres et symboles gravés sur ces pièces avaient permis de les relier à des tribus celtiques romanisées de Grande-Bretagne, les Icenes et les Brigantes.

Premier témoignage matériel de l'existence d'un commerce maritime des matières premières en Manche dans l'Antiquité, la découverte de l'épave de Ploumanac'h avait marqué un tournant, selon l'Association pour le développement de la recherche en archéologie maritime (Adramar), basée à Saint-Malo. "C'est à partir de cette découverte que l'archéologie sous-marine française a commencé à se développer dans l'arc Atlantique", souligne Laetitia Le Ru, archéologue à l'Adramar.

C. P. avec AFP