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"Une insulte": des médecins généralistes jugent insuffisante la hausse d'1,50 euro par consultation

Le règlement proposé entre l'assurance-maladie et les généralistes propose d'augmenter le prix de la consultation. Jugeant la proposition négligeable, des généralistes menacent de se déconventionner.

Dire qu'il a été accueilli avec scepticisme par la profession serait un euphémisme. Ce lundi a été dévoilé le règlement arbitral mis sur pied par la haute fonctionnaire Annick Morel, afin de mettre fin au différent qui oppose l'assurance-maladie aux syndicats de médecins.

Ce dernier prévoit de faire passer à 26,50 euros le prix d'une consultation chez un généraliste, contre 25 actuellement.

Problème, face à une inflation galopante et afin de rendre plus attractive une profession délaissée par les étudiants, les généralistes demandaient au minimum un passage à 30 euros par consultation, quand ils ne souhaitaient pas que son prix soit doublé, à 50 euros.

Des négociations qui avaient échoué

"C'est une insulte totale. Ça ne rattrape même pas l'inflation", fustige sur notre antenne Jean-Paul Hamon, médecin généraliste et président d'honneur de la fédération des médecins de France.

En février, les négociations entre l'assurance-maladie et les médecins libéraux, visant à la rédaction d'une nouvelle convention médicale, avaient échoué. Un arbitre avait donc été nommé, en la personne d'Annick Morel, afin de fixer les nouveaux tarifs.

Cette dernière a fait le choix de reprendre la proposition d'augmentation générale poussée par l'assurance-maladie, mais qui a déjà été rejetée par la profession. Le ministère de la Santé doit, selon toute vraisemblance, accepter ces nouveaux tarifs.

"Moi, je m'en fous, j'ai ma carrière derrière moi. Mais ce que je pense, c'est qu'on n'aura jamais de successeurs", fulmine Jean-Paul Hamon.

Une dixième année d'études "sans aucune incitation"

L'augmentation du prix de la consultation demandée par certains médecins généralistes entend répondre à deux objectifs. Premièrement, faire face à l'inflation, tout en améliorant les conditions d'accueil des patients, avec l'embauche d'une secrétaire médicale.

Deuxièmement, rendre la profession plus attractive pour la jeune génération, alors que la problématique des déserts médicaux ne cesse de s'aggraver. Pour Jean-Paul Hamon, la faible augmentation tarifaire annoncée "va aggraver la désertification".

D'autant que le gouvernement a décidé de voter une dixième année pour les étudiants en médecine générale, à réaliser dans des déserts médicaux, "sans aucune revalorisation, sans aucune incitation", poursuit le généraliste.

Afin de faire entendre leur voix, la profession commence à réfléchir à un nouveau moyen de pression, détaillé sur BFMTV ce lundi par Jérôme Marty, médecin généraliste et président de l'Union française pour une médecine libre.

"Je mène le déconventionnement collectif qu'on a lancé il y a deux mois. On a 1500 intentions de déconventionnement. Notre but est d'arriver à 10.000, 15.000 médecins, et d'aller voir les politiques pour leur dire: 'voilà, on a 15.000 médecins qui sont prêts à sauter le pas. Qu'est-ce que vous faites pour eux?'", détaille-t-il.

La menace du secteur 3

Pour rappel, en France, quand un médecin est conventionné avec (secteur 2) ou sans (secteur 1) dépassements d'honoraires, le patient reçoit la même somme de la part de la sécurité sociale, à hauteur de 70% du tarif de convention.

Mais quand le médecin n'est pas conventionné, et qu'il opère donc en secteur 3, il est libre de fixer librement ses tarifs. Par conséquent, la sécurité sociale ne rembourse que de manière minime les patients. Sans mutuelle adéquate, le reste à charge pour les malades peut se retrouver conséquent.

"Si on ne peut pas construire une convention qui peut sauver la médecine, alors on fera le fameux secteur 3. Et c'est l'assurance-maladie qui prendra la responsabilité de rembourser ou pas ses patients", menace Jérôme Marty.

Constat partagé par Jean-Paul Hamon: "Franchement, là, cet euro cinquante, c'est une insulte supplémentaire. Et j'espère que les jeunes médecins vont lancer des mouvements de déconventionnement".

Mais avant de passer à l'action, la profession attend la possible ouverture de nouvelles discussions. "Le point positif, c'est que madame Annick Morel a dit qu'elle avait construit son règlement arbitral avec pour volonté de relancer au plus vite les négociations conventionnelles", espère Jérôme Marty.

Jules Fresard