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Une épidémie de choléra menace-t-elle Saint-Martin et Saint-Barth'?

Agnès Buzyn, la ministre de la Santé, ce mercredi sur BFMTV en direct de l'île de Saint-Martin.

Agnès Buzyn, la ministre de la Santé, ce mercredi sur BFMTV en direct de l'île de Saint-Martin. - BFMTV

La situation chaotique laissée par l'ouragan Irma place les habitants de Saint-Martin et de Saint-Barthélémy dans une grande précarité, à laquelle s'ajoute un risque d'épidémies élevé.

Typhoïde, choléra, leptospirose. Ces maladies dites vectorielles n'ont heureusement pas encore été détectées à Saint-Martin ni à Saint-Barthélémy, frappées de plein fouet par l'ouragan Irma, mais leurs noms sont évoqués.

Agnès Buzyn, la ministre de la Santé, n'a pas caché son inquiétude, mardi soir à l'hôpital de Marigot (Saint-Martin), de voir des épidémies s'ajouter aux difficultés des habitants exposés à la destruction et aux pillages. "Je suis inquiète quand je vois l'état de l'île", a confié Agnès Buzyn au Parisien, accompagnant le Président Macron. "J'ai vu des enfants qui vomissaient depuis trois jours". La ministre s'est en revanche voulue plus rassurante, ce mercredi après-midi sur notre antenne.

"Si la population boit de l'eau potable qui est maintenant distribuée en quantité suffisante, il n'y a pas de risques sanitaires. Mais l'urgence est de nettoyer l'île", a déclaré Agnès Buzyn.

La ministre a également rappelé l'importance pour la population de "suivre les consignes", "de ne pas toucher les déchets" et "en cas de fièvre de consulter les médecins libéraux qui rouvrent leurs cabinets".

Si la crainte d'une épidémie semble s'éloigner quelque peu, "le risque zéro" n'existe pas, rappelle Guillaume Constantin, chargé de recherches à l'Institut de Recherche pour le développement (IRD), actuellement au Sénégal.

Le choléra se soigne bien, mais il faut agir vite

Selon ce spécialiste du choléra joint par BFMTV.com, la prévention passe effectivement par "l'accès à de l'eau en bouteille, sinon un assainissement avec une pastille de chlore ou encore en faisant bouillir l'eau". Cette bactérie qui provoque une maladie intestinale, dont les symptômes sont "des diarrhées et des vomissements", oblige les autorités sanitaires à une prise en charge très rapide.

"Si le choléra se soigne très bien, généralement par une simple réhydratation ou par une antibiothérapie pour les cas les plus graves, on peut rapidement décéder, dans les 24, 48 ou 72 heures", prévient Guillaume Constantin de Magny.

Une difficulté supplémentaire est que "la sévérité des symptômes dépend de la dose ingérée". Si les cas les plus aigus exposent à trois ou quatre crises de vomissement ou diarrhées par heure, et sont donc patents, d'autres peuvent passer pratiquement inaperçus. De fait, les personnes atteintes ne se sont pas toujours hospitalisées.

Chez certains, la maladie entraîne des symptômes que "le malade va pouvoir gérer en automédication. C'est ainsi qu'une 'grosse gastro' se révélera être en réalité un choléra de faible intensité", rappelle le chercheur. Et d'évoquer, cette épidémie en 2004, au Sénégal, dont un père de famille revenant de Guinée avait été le vecteur involontaire, contaminant son fils qui, lui, avait dû être hospitalisé.

Pour en avoir le cœur net, il faut passer par des analyses qui pourront être effectuées par exemple par l'Institut Pasteur, présent en Guadeloupe ou en Guyane.

Une situation différente de celle d'Haïti

Guillaume Constantin de Magny insiste sur le fait que "les deux îles de Saint-Barth' et de Saint-Martin n'ont pas connu d'épidémie depuis longtemps et qu'elles bénéficient d'un niveau d'assainissement très élevé induit par l'industrie touristique de luxe." En leur qualité d'îles, "elles sont préservées du risque de transmission par mouvement transfrontalier de populations arrivant de zones comportant des foyers épidémiologiques, comme ça peut être le cas dans certains pays d'Afrique".

En Haïti, où vit une population beaucoup plus pauvre, l'épidémie ne s'était pas déclarée aussitôt après le séisme de 2010, mais "plus de neuf mois après". Comment? "Les Casques bleus de l'ONU envoyés en renfort depuis Katmandou avaient rapporté la maladie avec eux", souligne le chercheur. Là encore, il s'agissait de personnel qui ne nécessitait pas forcément une hospitalisation, mais qui présentait des symptômes pouvant être confondus avec d'autres pathologies. Le risque qu'un contingent étranger contaminé accoste dans les Antilles françaises, compte tenu des moyens dont dispose notre pays paraît faible, sans être nul. Reste que, dans tous les cas de figure, "la riposte doit être rapide". "Ce qui semble être le cas", avance Guillaume Constantin de Magny, relativement confiant.